Julia Caesaris

(18) Fougueuse jeunesse - 1ère analepse César

Le froissement du tissu contre ma cuisse.
Je regarde Pompée. Lui aussi a du mal à s'habituer à porter cette toge...
Elle nous entrave dans chacun de nos mouvements, ce qui est une bonne symbolique pour le passage à l'âge adulte qu'elle marque.
Nous nous rendons jusqu'au forum, où nous devrons effectuer les offrandes coutumières aux nombreux dieux qui peuplent notre mythologie.
En espérant que dans leur infinie magnanimité, ils nous pardonnent notre comportement d'hier...

Angoissés tous les deux, nous ressentions le besoin de plaisanter pour détendre l'atmosphère qui pesait des tonnes sur nos épaules. C'était quelques instants avant la cérémonie présidée par nos pères, devant ma villa.

Nous avons ri de nos ancêtres décédés à la guerre et demeurant sans sépulture.
Nous avons même tenté de les invoquer !
Quelle impudence...
Nous avons tous deux ressenti une intense culpabilité durant tout le long de la cérémonie.
Je le sais, je lis dans le regard de Pompée comme je lirai dans un parchemin...

Car en effet, les ancêtres se sont montrés.
Il eût mieux valu que ce ne fut pas le cas, leurs sombres prédictions flottent encore autour de nous.

Nous étions plongés dans la pénombre, la lointaine lueur des astres nous éclairant à peine. Nous croyions à un simple jeu, sans imaginer un instant que nos incantations auraient un quelconque effet.

Nous nous fourvoyions amèrement...

Ils sont apparus dans toute leur splendeur ectoplasmique, les contours flous comme tout spectre qui se respect(r)e.

Ils nous ont dit de rester soudés quoi qu'il advienne, que la paix entre les hommes ne durerait pas...
Nous étions tétanisés, tant cette rencontre était improbable.

Depuis cette soirée, nous sommes penauds en permanence et ni Cornelia ni Fabia ne comprennent. Elles tentent d'interférer dans nos humeurs, d'y inférer un peu de gaieté mais c'est peine perdue. Nous sommes des hommes maintenant. Un homme, ça ne plaisante pas.