20 : Elleana.

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C'est tellement beau... Marchant entre les rayonnages de la bibliothèque du palais du roi, Elleana ne cessait d'admirer sa splendeur. La bibliothèque était immense, et baignait dans une lumière bleutée. Les rayonnages étaient tellement grands et nombreux qu'il était extrêmement difficile de se rendre compte de la forme et de la taille de la pièce, mais au bruit de ses pas, Elleana devina qu'elle était au moins aussi grande que la salle du trône. Guenièvre aurait adoré, ne put s'empêcher de penser la jeune fille. Alors qu'elle gambadait dans la nature en compagnie de Melena, Elleana avait plus ou moins réussi à tenir son manque loin d'elle. Mais maintenant qu'elles pouvaient enfin se reposer, elle ne cessait de repenser à sa famille adoptive. Elle lui manquait tellement ! Son père, avec ses plaisanteries d'un genre douteux, sa mère, avec ses sourire et ses câlins, Amaniel, avec sa compréhension et ses entrainements, Guenièvre, avec sa manie de l'embêter dès qu'elle la voyait. Liliana, et ses petites manières bien à elle, et Eve. Surtout Eve. Les deux sœurs se ressemblaient fort, et elles avaient l'habitude de rester ensemble dès que la moindre petite chose n'allait pas. J'aurais vraiment besoin de toi, trésor, pensa tristement Elleana. Pour oublier sa tristesse, elle prit un ouvrage au hasard et commença à lire.

Elle lisait depuis plus d'une heure ce qui s'était révélé être un ouvrage de contes d'Ellendar quand elle se rendit compte qu'elle n'était plus seule. Relevant la tête, elle aperçut Levana entre les rayonnages, en train de l'observer. Voyant qu'elle était découverte, la jeune fille vint rejoindre Elleana sur le fauteuil en velours rouge. En se souvenant de la colère qui l'avait habité la veille, Elleana s'écarta légèrement, gênée.

- Salut ! dit Levana en adoptant un air joyeux, mais il était évident qu'elle avait remarqué son geste de recul.

- Salut, répondit Elleana, incapable de trouver autre chose d'adapté.

Elles restèrent silencieuses un moment. Levana, avisant le livre sur les genoux de sa sœur, lui demanda :

- Tu l'aimes ?

- Oui, il est magnifique. J'adore le conte avec les deux oiseaux, le doré et l'argenté.

Levana sourit, et elle parut vraiment magnifique, subitement :

- C'était mon livre préféré, quand j'étais enfant. J'aime aussi celui avec la grenouille.

- Je ne l'ai pas encore lu... OH NON ! s'écria Elleana d'un coup. Je devais chercher des informations sur les filles de la Lune !

- Relax, rit Levana. Tu aurais perdu ton temps. Il n'y a rien, ici. Pas là-dessus.

- Oh, répondit simplement Elleana, son enthousiasme subitement refroidi. Vraiment rien ? demanda-t-elle avec espoir en direction de sa sœur.

Levana secoua la tête, elle aussi apparemment déçue :

- Non, rien du tout, désolée. Il doit bien exister des ouvrages, mais ils sont conservés ailleurs. Désolée.

- Ce n'est pas grave, marmonna Elleana, dépitée. Merci, Levana.

Les deux jeunes filles restèrent là un moment, sans parler. Enfin, Levana dit lentement :

- Je suis désolée, pour hier. Je me suis montrée... assez égoïste.

- Ne t'inquiète pas, je sais ce que c'est que se comporter en égoïste. Je t'avoue que je n'ai pas compris ta colère, mais je la respecte.

- Merci, murmura Levana.

Elles restèrent silencieuses un moment, puis la princesse sourit :

- Il y avait une question à déduire, n'est-ce pas ?

- Seulement si tu as envie d'y répondre, lui répondit doucement l'humaine.

Elleana se sentait gênée d'avoir poussé Levana à se confié. Et si la princesse décidait de garder ça pour elle ? Il était évident qu'elle n'avait pas envie de rester sur sa colère, sur sa douleur... Levana la regarda un moment, puis repris la parole, visiblement gênée :

- Je croyais être seule. Toute ma vie, je me suis préparée à un destin extraordinaire, j'avais l'impression... que ma mère était fière de moi. Quand j'ai appris que j'avais des sœurs, qui en plus ignorait totalement qui elles étaient... je l'ai pris comme une insulte au lieu de le voir comme c'est : une chance.

Un long silence accueilli cette tirade. Finalement, Elleana posa sa main sur le bras de sa sœur, et lui dit :

- Merci.

- Pourquoi ? lui demanda l'elfe, surprise.

- Pour t'être confiée. Pour avoir fait un pas vers moi. Pour être là. Il y a plein de raison.

- Merci à toi, lui répondit la princesse, gênée. Pour tout.

La jeune fille se leva et s'éloigna. Elleana allez la perdre de vu lorsque, prise d'une inspiration subite, elle s'écria :

-Attends !

La princesse revient sur ses pas, et Elleana sortit le carnet d'émeraude de sa poche et le tendit à Levana.

-Tiens. Comme premier cadeau de famille. Merci.


Ellendar tome 1 :  Le temps d'un secretOù les histoires vivent. Découvrez maintenant