27 : Levana.

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Levana comprenait sans problème ce que ressentait Selena. Certes, elle, elle avait eu un père qui l’avait élevé et aimé bien qu’elle ne soit pas une vraie princesse, mais elle avait passé sa vie dans l’espoir de voir sa mère venir un jour pour s’expliquer, où, au moins s’excuser. Jusqu’à maintenant, rien. Sarin lui parlait des devoirs, des responsabilités des dieux. Elle, elle en était venue à se dire que la Lune, toute puissante soit-elle, avait peur. Selena, elle, savait qu’elle n’était pas la fille de la reine Mary, mais elle avait cru que sa « mère » l’aimait quand même, pour après apprendre qu’elle s’était servis d’elle, qu’elle n’avait jamais eu l’intention de la laisser décider de ce qu’elle voulait faire de sa vie. Pas étonnant que la fée ait craqué ! Si elle avait était à sa place, Levana aurait sans doute réagit comme elle. Mais malgré sa souffrance, Selena avait tout de même trahi la reine, aidé ses sœurs à s’échapper, fuit tous les siens. Elle a du courage, pensa Levana. Tandis qu’elles couraient dans la forêt, la princesse elfe se rapprocha imperceptiblement de Selena. Elle souhaitait lui parler. Mais le fait qu’Elleana et Melena entendraient leur conversation la refroidissait légèrement. Elle ne l’avouerait sans doute jamais, mais elle avait espéré tisser avec la quatrième un lien aussi fort que celui qui unissait ses deux sœurs. Jusqu’à maintenant, sans succès. Levana chassa ses préoccupations de son esprit et se concentra sur ses émotions. Courir dans la forêt des fées la remplissait d’un doux bien-être, et d’une énergie qui semblait inépuisable. La caresse fraiche de l’air, le parfum léger des arbres, la douceur de l’herbe sur laquelle elle courait, pieds nus, tout cela semblait comme une promesse : « Vous avez fait ce qu’il fallait. Vous continuerez. » Elle avait foi.

***

Une journée s’était passée quand elles arrivèrent enfin à la lisière de la forêt Fajhyceri, sur les rives de la mer Aniethel. Pour une fois, Levana maudissait sa vision d’elfe. En effet, ses yeux  fragiles étaient éblouis par la lumière du soleil.

-C’est le printemps ! s’étonna Melena.

Maintenant qu’elle y pensait, Levana s’aperçut qu’elle avait raison. Il était difficile d’estimer les saisons dans la forêt des fées, avec sa lumière partout identique, mais, maintenant sorties du couvert des arbres, il était évident que l’hiver avait disparu.

-J’ai lu dans un livre qu’il y a quatre saisons différentes dans le reste d’Ellendar, intervint Selena. C’est vrai ?

Levana réalisa alors que les fées ne connaissaient rien d’autre que le printemps perpétuel de leur forêt. Certaines fées sortaient parfois, mais uniquement quand le climat était bon pour leurs ailes. Quelle triste existence !

-C’est vrai, lui répondit Elleana. Le printemps, l’été, l’automne, et l’hiver.

-Et, reprit Selena, c’est vrai qu’en hiver il y a de petites choses blanches et douces qui tombent du ciel ?

-On appelle ça la neige, la renseigna Levana. C’est très froid, et ça fond pour devenir de l’eau.

-J’ai toujours rêvé de voir de la neige… soupira la jeune fée, mélancolique.

Levana échangea un regard perplexe avec Melena. Rêvé de neige ! Tout de même… Pour l’heure, Selena avait toutes les raisons du monde d’être déçue. Une douce chaleur réchauffait leur peau, déjà fouettée par les embruns. La brise marine  chatouillait agréablement leur peau exposée.

-Il nous faut trouver un bateau, dit Selena.

-Pourquoi ? demanda Elleana.

-Regarde, expliqua Levana en dépliant une carte donnée par les elfes. Nous sommes ici (elle indiqua un point au sud). Il nous faut aller là (elle indiqua un autre point, totalement au sud-est). Il faut traverser la mer, suivre le fleuve, passer par les montagnes Deriternal, retraverser cette mer, longer le continent jusqu’à l’embouchure du fleuve Gertisaz. Là, on aura qu’à continuer jusqu’à Astamar.

Ellendar tome 1 :  Le temps d'un secretOù les histoires vivent. Découvrez maintenant