Chapitre 23

250 27 3
                                    

Je descendais Baker Street tandis que le ciel se teintait de magnifiques dégradés de couleurs chaudes. Je pénétrais dans le restaurant et vit Moran au fond de la salle, déguisé comme un jeune étudiant qui aurait un rencard (un « date »). Ça changeait de ses vêtements si sombres ou militaires.

Je m'asseyais en face de lui et croisais les jambes.

« Ton aide nous a été bien précieuse Serena, commença-t-il en regardant son verre de scotch entamé.

-Je n'ai fait ce que le Boss aurait attendu de moi.

-A vrai dire tu nous a donné plus de ficelles qu'il n'en fallait.

-Un travail se doit être fait en entier et correctement. Toujours avoir des coups d'avance. Ce n'est pas toi qui répétait cela ? »

Ma vision des choses lui plut et ses lèvres s'arquèrent d'un sourire.

« Je vois que tu n'as rien oublié de tes leçons à l'Organisation ».

Il me tendit une clé USB. Une bouffée d'excitation et de curiosité m'envahit. J'allais récupérer le seul moyen de pression qu'avait Moran sur moi. Malgré ma connaissance du contenu, je savais pertinemment que la première chose que je ferais en sortant de ce RDV plus que maudit serait de détruire cet objet de manière à le supprimer de la surface de cette planète.

Mais au moment où je tendais les doigts pour récupérer le motif de mon déplacement, je sentis un embout métallique froid pressé contre mon genoux.

« Changement de programme Serena. », déclara-t-il malicieusement.

Merde, c'est un piège ! , percutai-je avec amertume. Comment ai-je pu me faire avoir ainsi, comme une bleue ?!

D'ailleurs sur le chemin j'avais senti qu'on me filait, mais j'avais trouvé l'excuse de la sécurité ou de ma paranoïa. Je le savais que c'était bien trop facile ! Je me donnais quelques claques mentales pour ne pas avoir écouté mon instinct cette fois-là.

« Et en quel honneur ?, demandai-je posément.

-Il s'est avéré que tu es bien plus performante qu'auparavant et j'aurai encore besoin de tes services.

-Je ne suis pas l'un de tes sbires Moran. Ce n'est pas parce que tu es resté bloqué dans le passé que je le suis aussi. Je n'ai aucune attache si ce n'est que je souhaite récupérer ce qui me revient de droit. Donc si tu veux me tuer ici et maintenant alors vas-y. »

La pression du canon sur ma rotule augmenta ce qui fit apparaître une douleur locale. Mais je restais impassible afin de n'éveiller aucun soupçon dans le restaurant.

« Visiblement tu ne tiens pas à ta vie, souligna-t-il. Mais continuons cette passionnante discussion à l'extérieur, veux-tu ? »

En effet il n'avait pas tort. Ce genre de discussions ne pouvait se régler ici. Tous mes sens en alerte et prête à n'importe quelle éventualité, nous nous levâmes en même temps et sortîmes. Moran me prit sous son bras, nous faisant ainsi passer pour un couple ordinaire aux yeux du monde. Sauf que sous ce câlin en apparence plein d'amour, se cachait le canon de son revolver collé à mes côtes. J'eus un haut-le-cœur de ce contact physique et de cette image plus qu'hypocrite. Nous arrivâmes dans un bâtiment en construction visiblement à l'abandon. La planque parfaite.

Il me plaça au milieu de la pièce, toujours sous la menace de son arme.

« Tu croyais vraiment me prendre pour une cruche Serena ?

-Ça dépend, dis-je avec haussement d'épaules.

-Les fichiers que tu m'as envoyé été cryptés et verrouillés. Aucun de nos informaticiens n'a réussi à entièrement les exploiter,essayait-il de se contenir.

-Pffff, des incapables. Le bon personnel est difficile à recruter de nos jours. », le narguai-je d'un rictus provocateur.

En effet c'était un algorithme complexe, proche de ceux utilisés par Moriarty pour faire son fameux « Triple Coup ». On ne pouvait avoir accès que partiellement aux données, comme un avant-goût alléchant. Mais il fallait par la suite désactiver nombre de programmes grâce aux mots de passe associés. 3 essais ou tout sera détruit à tout jamais.

Il chargea son arme d'un cliquetis et me regarda intensément avec menace.

« Les mots de passe Serena. »

Il fallait que je sorte de là. La fatigue et la faim que j'accumulais me rendaient beaucoup moins patiente et plus nerveuse.

« Mais tu sais bien plus que moi que les murs ont des oreilles, essayai-je de gagner du temps en ayant fait un pas doucement en sa direction mais me rapprochant de la porte (sans compter le nombre de ses pantins dont regorgeait cet endroit). Tu comprend donc que je ne peux les dire aussi haut ! »

Moran me regarda avec suspicion. Étais-je réellement sincère ou me payai-je sa tête ? Il était bloqué car il ne pouvait pas me tuer là maintenant puisque je détenais la clé de sa vengeance. Mais l'art du bluff avait toujours été ma spécialité. Méfiant, il fit quelques pas en pesant chacun d'entre eux sans me lâcher du regard. Moi je me tenais droite et ferme pour qu'il ne soupçonne pas le moins du monde mon bluff et le doute qui me rongeait. Je fis un effort dans le contrôle de ma respiration. Arrivé à mon niveau, il abaissa légèrement son arme et se pencha pour entendre les mots magiques. Erreur. Mes muscles tendus prêts à l'action et ma pression artérielle battant à plein régime, j'approchais mes lèvres de son oreille et murmurais :

« Tu peux toujours courir Moran, the game is off. »

[FR] Holmes a day, Holmes forever ... [OFFICIAL/!\]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant