Chapitre 68

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Après avoir raccroché avec le Professeur Rossi, je dus expliquer à George pourquoi j'avais le sentiment que nous n'avions plus que quelques jours devant nous. Le fait que Charles demande à aller dans sa maison de campagne en Provence ne pouvait vouloir dire qu'une chose et ce n'était pas bon. Mon petit ami savait mieux que personne, parce qu'il le ressentait, que le temps lui était compté. George ne pouvait malheureusement pas le contredire. Tout en lui nous disait que c'était presque la fin. Le teint brusquement changeant de mon homme en était un flagrant indice.

Nous partîmes dans la matinée. Après avoir fait nos sacs et les avoir jetés dans la voiture, nous prîmes la route. Ni Paul, ni George, ni moi-même ne trouvâmes rien à redire à cela. Si c'est ce que Charles voulait alors c'est ce qu'il aurait. Nous le traitions comme un enfant gâté, mais c'était tout ce que nous pouvions faire pour lui et ça n'avait rien d'un caprice. C'était plus une dernière volonté.

Pendant tout le trajet, je ne cessai de penser à ma conversation avec le Professeur Rossi. La situation avait beau être grave, je ne pouvais m'empêcher de sourire. Désormais, tout allait bien se passer. J'en avais l'intime conviction.

Paul conduisit une partie du trajet, secondé par George, installé à la place du mort. Charles et moi étions à l'arrière. Mon amour ne vit rien de notre voyage. Il le passa la tête posée sur mon épaule à dormir.

Nous arrivâmes à destination en fin de journée et je compris instantanément pourquoi c'est ici que Charles voulait être et pas ailleurs. Tout était incroyable.

La maison était vraiment petite à côté de l'immense bâtisse dans laquelle nous vivions, mais elle était charmante. Une petite barrière en bois peinte en blanche délimitait le petit jardin à l'avant, duquel de grosses touffes de lavandes débordaient en tous sens. L'endroit était chaud, il sentait bon et le bruit des oiseaux était si reposant que je n'eus moi-même plus jamais envie de repartir.

L'intérieur était très simple, incontestablement rustique et joliment décoré avec des rideaux vert anis, des canapés moelleux et des coussins partout. Il y en avait véritablement partout, au bord des fenêtres, sur les fauteuils, les canapés, dans les lits et même sur la balancelle à l'arrière de la maison.

C'est l'arrière de la maison qui fut le plus impressionnant. Sans conteste. À notre arrivée, Charles traversa la maison comme un zombie, comme s'il ne voyait rien d'autre, comme s'il n'était pas là pour admirer les cadres de famille accrochés au mur mais pour autre chose. Il passa par la cuisine et prit un petit couloir qui desservait le cellier, les toilettes et la salle de bains. Il prit la petite porte en bois surmontée d'une petite vitre et déboucha à l'extérieur.

Je le suivis sans rien dire et découvris avec une émotion presque paralysante la vue surprenante de cet endroit. Après le petit jardin de pelouse bien tondue, s'étendaient à perte de vue des champs de lavandes. Des insectes bourdonnaient dans tous les sens, l'odeur était enivrante et le ciel se teintait de couleurs orangées et roses face au soleil qui déclinait déjà.

Charles prit une grande inspiration et s'installa sur la balancelle sans un mot. Il resta là, sans bouger et nous en profitâmes pour déballer nos affaires. George, avait dû emporter pas mal de bazar afin de pallier un grand nombre d'éventualités. Nous ne savions pas encore combien de temps nous resterions, mais nous ne comptions pas demeurer ici jusqu'à ce que le cœur de Charles ne flanche. Nous avions bien l'intention de rebrousser chemin dès que son état de santé deviendrait trop instable. Il fallait absolument qu'il soit dans son hôpital, là où des médecins et des chirurgiens de la Potens Research Fondation travaillaient, si son état devait subitement se dégrader. C'était un peu de la folie de se tenir si loin de tout mais était-il encore possible de lui refuser quoi que ce soit ? 

Cœur Artificiel Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant