Chapitre 73

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Nous rentrâmes à la maison et Charles alla se coucher dans la foulée sans que nous ayons pu aborder ce qui venait de ce passer. Je restai malgré moi seule avec George qui revenait déjà de sa chambre avec tout le nécessaire pour refaire mes points de suture.

Je m'étais installée dans la cuisine et observai la bouteille de blanc et le verre à pied qui traînaient sur le plan de travail. Paul avait dû passer une bonne soirée.

J'attendis, avec toute la patience dont je pouvais faire preuve à cette heure tardive, que George s'installe sur la chaise à côté de la mienne, prête à ce qu'il me fasse la morale. Il sortit ses instruments et prépara le fil qui allait servir à refaire les points qui avaient sauté.

- Tu dois apprendre à te maîtriser ! me dit-il d'un ton très paternaliste.

- Elle n'avait pas à faire ça, bougonnai-je.

- Et ça t'a avancé à quoi ? Regarde dans quel état tu es maintenant ! Tu aurais pu simplement lui demander d'effacer cette photo et elle l'aurait fait.

- Ça, tu n'en sais rien. Et puis, je te signale que c'est toi qui m'as fait mal.

- C'est de ton fait ! se contenta-t-il de répondre avant de commencer à piquer.

Ce fut très douloureux, mais je pris sur moi pour ne pas trop me plaindre.

- J'étais comme ça aussi avant, sortit-il entre deux points.

- Tu veux bien développer ?

- J'ai toujours surprotégé Charles à cause de sa maladie cardiaque et plus encore quand il a pris cette décision stupide d'être le patient à qui on implanterait sa propre invention.

- Et ce n'est plus le cas, lui fis-je remarquer en me remémorant la manière un peu raide dont il le traitait ces derniers temps.

- Ça ne sert à rien de le materner. Il y aura toujours un moment où il finira par te décevoir. Tu peux donner tout ce que tu as pour lui, ton temps, ton amour, ta vie, mais au final tu en recevras bien peu en retour. Tout ce que tu récolteras à t'accrocher à lui comme ça, c'est de la souffrance et très peu d'estime de toi.

- Pourquoi tant de pessimisme ? m'enquis-je en serrant les dents.

- Je te dis ça en connaissance de cause.

- Il t'aime, affirmai-je après avoir cherché la raison qui pourrait le pousser à me dire toutes ces choses désagréables.

- Ça, c'est ce que tu as envie de croire, parce que s'il est capable de m'aimer moi alors il est capable de t'aimer aussi.

- C'est le cas. Je n'ai pas besoin qu'il me le dise pour en être sûre. L'amour ça va bien au-delà des mots.

Je n'avais vraiment pas envie d'avoir cette énième conversation avec lui. J'étais crevée et n'avais qu'une envie, me rouler en boule sous la couette aux côtés de Charles. Malheureusement pour moi, j'étais prisonnière du fil qui me reliait aux instruments qu'il tenait en mains.

- Alors tu te moques complètement de savoir que je t'aime ? dit-il en coupant le fil qui nous reliait.

Je restai figée sur place. C'était la première fois qu'il le disait si clairement. Je l'avais compris depuis bien longtemps, mais j'avais toujours décidé de faire comme s'il s'agissait de quelque chose d'anodin, une chose dont je n'avais pas à me soucier.

- Ne te sens pas obligé de répondre quoi que ce soit à ça, ajouta-t-il devant mon mutisme et voyant que je cherchais les mots adéquats pour répondre. Contente-toi de ne jamais l'oublier.

Cœur Artificiel Tome 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant