Les couleurs de Poudlard

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La nuit était lugubre.

Un violent orage déchirait l'obscurité, d'immenses jets de lumière éventrant brutalement les pâles ombres des nuages. Le sol détrempé de la pelouse luisait étrangement sous une pluie diluvienne, l'herbe se faisant battre inlassablement par de violentes bourrasques de vent. Le faible murmure d'un hululement de hibou arrivait parfois à résonner, son écho se mourant presque soudainement, comme noyé sous le grondement du ciel.

Au loin, l'imposante silhouette du saule cogneur se dessinait parmi la pénombre, ses longues branches semblant se recroqueviller comme pour se protéger de la tempête.

Alors, surgissant derrière une colline, une silhouette noyée dans l'obscurité errait misérablement, les violentes bourrasques de pluie l'assommant un peu plus à chaque seconde.

Au loin, les murs de Poudlard se laissent deviner dans la nuit noire, le pâle halo jaune des torches semblant résonner comme un appel à la douceur.

Mais Remus ne se retourna pas.

La pluie glaciale s'était imprégnée de ses vêtements, sa démarche vacillante faisant trembler son être un peu plus à chaque pas.

Ses tempes bourdonnaient. Ses dents s'entrechoquaient. Il pleurait.

Il n'arrivait plus à respirer. Sa gorge semblait lui brûler la poitrine, ses poumons refusant de s'emplir d'air. Et ses gémissements plaintifs se mourant parfois entre ses dents, ses sanglots l'empêchaient de hurler sa douleur.

... un loup-garou... un monstre...

Il lui semblait qu'on lui arrachait le cœur de la poitrine, le laissant agoniser au milieu de ses tremblements et souvenirs. Alors, dans un hoquet brisé, il enroula ses bras autour de lui, la bouche déformée par cet affre qui menaçait de l'engloutir vivant.

Ses jambes ne le tenant plus, il s'écroula dans l'herbe luisante et glaciale de la nuit.

Un terrible râle animal lui éventra la poitrine, le faisant péniblement remuer dans la boue. Le tremblement de ses mouvements saccadés l'empêchait de se relever, comme pour lui rappeler où était sa vraie place. Sous la pluie... Dans la boue...

Un violent haut le cœur, le secoua soudainement.

Il porta sa main pleine de terre au visage, ses yeux grands ouverts continuant de laisser les larmes et la pluie s'entremêler.

Il ne su combien de temps il resta ainsi... Gisant dans la boue... S'attendant à vomir comme pour rejeter cet abysse qui le consumait... Les battements de son cœur semblaient ralentir, chaque pulsion résonnant dans tout son être tel le gong annonçant la fin...

Il ne su pourquoi mais quelques mots de Sirius lui revinrent en mémoire à cet instant. Cette simple phrase qu'il avait entendu il y a maintenant des années de cela...

Il y a souvent moins de danger dans les choses que nous redoutons que dans les choses que nous désirons.

Si seulement il avait su... Si seulement il avait compris à cet instant là... Compris toute l'ampleur... Tout le poids que cette simple phrase aurait sur lui... Mais maintenant... Alors qu'il se relevait péniblement sous la pluie battante, il lui sembla que la fatalité s'était jouée de lui... Se complaisant à semer des indices dans les méandres de son passé ...

Alors comment ? Hoqueta t-il dans une plainte brisée. Comment Eilya pourrait elle comprendre le sens de cette vie à laquelle il était enchaîné ?

Il voulait hurler ces mots qu'il avait tant besoin d'entendre.

Mais le silence l'étouffait de toute part, tel un monstre qu'on tentait de faire disparaître.

Un jour... Peut être... À la lisère de leurs souvenirs... Quand bien des années auraient passées... Peut être qu'Eilya comprendrait le sens de cette misérable existence... Et même si il lui avait menti, c'était bien pour elle que son cœur avait chanté jusqu'à son dernier souffle...

Les serpentards ne sont pas tous des abrutis [Terminée]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant