Embrase-moi - Tome 1

Chapitre 15 - Lui

Assis dans le camion, je regarde le paysage défiler par la fenêtre. Les yeux perdus dans le vague, je me concentre sur les battements aléatoires de mon cœur. Mes doigts se crispent sur mes cuisses et mon ventre se tord. Je déteste cette journée, je hais les entrainements incendie. Je devrais être habitué pourtant, nous en faisant régulièrement. Mais il n'y a rien à faire, à chaque fois que je me retrouve sur le chemin, je panique.

Ironique non, pour un pompier d'avoir peur de feu !

Malgré moi, l'image de Mathieu vient s'imprimer sur ma rétine. Ses yeux sombres et le sourire toujours présent sur son visage viennent me hanter. Je presse fortement mes paupières, sachant que d'autres images vont bientôt arriver. Je ne veux pas m'en souvenir, surtout en ce moment. Je force mon esprit à penser à autre chose. Immédiatement, la silhouette d'Athénaïs m'apparait. Je me concentre dessus, visualisant les contours de son visage. La clarté de ses iris quand ils viennent se fixer aux miens. Je dessine ses lèvres pleines et gourmandes. Je m'applique à les faire sourire, comme elle le fait si souvent. Je me concentre sur la façon dont ses yeux pétillent naturellement, ou alors celle dont ses pupilles se dilatent quand je m'approche d'elle. Je frémis en repensant à ça. J'adore la façon dont elle réagit à mon contact. Ces petites choses qu'elle fait sans le vouloir, sans en avoir conscience. Son corps répond au mien, sans que nous puissions le contrôler. Cela me soulage de savoir que je ne suis pas le seul à être perturbé. Je repense à la texture douce et chaude de sa peau sous mes doigts. A ses frissons après ce touché si simple.

Même perdu dans mes pensées, je sens le camion ralentir. Mes coéquipiers commencent à bouger. Mon cœur reprend ses battements irréguliers, ma respiration accélère.

Inspirer profondément, expirer doucement.

Je me répète plusieurs fois cette phrase, la mettant en application. Quand je sens une pression sur mon genou, j'ouvre les paupières. Mon regard tombe sur celui de Bastien, qui m'observe, inquiet. Je lui adresse un petit sourire alors que ses doigts se resserrent sur ma chair.

— On veillera toujours sur toi, Max.

Sa phrase me rassure, m'apaise. Je me lève rapidement pour sortir du camion, le blond sur mes talons.

La plupart de nos exercices incendie se font dans des conteneurs spécialement prévus à cet effet. Mais parfois, quand un bâtiment est voué à la destruction, les promoteurs immobiliers ou les administrations françaises, le mette à notre disposition. Cela nous permet de nous entraîner en conditions réelles. De nous préparer au mieux pour ce qui nous attend en intervention. La bâtisse qui se tient devant nous a tout d'un squat. Les murs sont tagués, les fenêtres sont toutes explosées. Une horrible odeur de pisse et de cannabis flotte dans l'air.

Inspirer profondément, expirer doucement.

Nos chefs de section sont déjà là depuis un moment. Ils terminent de mettre tout en place pour que nous puissions intervenir correctement.

— Préparez-vous.

La voix de Luc résonne dans le silence. Nous nous dirigeons tous vers le fond du camion pour récupérer nos affaires. Nous sommes quatre aujourd'hui à faire cet exercice. Bastien, Julie, Etienne et moi. Luc et Stéphane, seront nos deux superviseurs pour cet entraînement. Concentré, je me prépare consciencieusement. Rien ne doit être laissé au hasard. Notre équipement pour le feu est très lourd, dans les vingt kilos, il est aussi très encombrant. Pourtant, nous n'avons pas le choix. Nous devons agir avec cette masse qui pèse sur notre corps. Je termine d'attacher mon masque quand je sens une intense chaleur me lécher le dos. En me tournant, je découvre que de hautes flammes dévorent déjà les murs du squat.