Chapitre 22 - Elle

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Je passe les portes de « Sensuel » de mauvaise humeur. Je pense qu'on peut même dire que je suis d'une humeur de chien. Heureusement, les rayons de soleil m'accueillent, atténuant quelque peu mon état d'esprit. Comme à mon habitude, je reste quelques secondes, immobile, le visage tourné vers l'astre chaud. Le soleil a toujours eu le don d'apaiser mes humeurs. Il faudrait peut-être que j'envisage de déménager dans le sud. Oui, une fois tous les problèmes derrière nous, je pourrais embarquer Noham et Rose, direction le bord de la méditerranée. A nous la chaleur, le beau temps, la mer ! La vie serait sûrement plus belle, plus douce. Sans compter que là-bas les loyers doivent être bien moins chers. On pourrait peut-être avoir une maison, avec un jardin pour Noham. Peut-être même le potager dont Rose rêve. Elle pourrait y planter tout ce qu'elle veut, des légumes, des fruits. Parce qu'elle a beau avoir la main verte et adorer jardiner, Paris n'est pas le lieu de prédilection pour faire pousser quoi que ce soit. Ici, tout meurt en un temps record. Sans compter que nous n'avons qu'un minuscule balcon.

Oui, on serait tous bien. Ce serait un nouveau départ, une nouvelle vie.

Je n'aurai plus à me prostituer pour gagner de l'argent. Je ne serai plus obligée de subir la compagnie désagréable d'hommes qui se pensent tout permis, car leur compte en banque affiche un montant à plus de six chiffres. Exactement comme le client que j'ai eu hier soir. Il était si imbu de lui-même, persuadé d'être le plus beau, le plus intelligent, le plus doué. Celui qui pissera le plus loin en somme. Mais il ne faut pas se mentir, quand on doit payer pour pouvoir approcher une belle femme, il faut se poser des questions. C'est quelque chose que je n'ai jamais compris, pourquoi toujours vivre dans le paraître ? Les hommes vont vouloir rouler des mécaniques et prouver qu'ils ont les plus belles réussites. Les femmes, si elles sont mariées vont chercher à prouver qu'elles ont décroché le gros lot, si elles ne le sont pas vont jouer de leur physique pour attirer les meilleurs partis. Ils devraient plutôt essayer de vivre pour eux-mêmes au lieu de vouloir exister à travers le regard des personnes qui les entourent. Je connais par cœur ce monde, riche, bourgeois, hypocrite. Tout ce que vous dîtes, tout ce que vous faîtes est observé, jugé et critiqué.

Avec un soupir, je lâche l'entrée puis m'engouffre dans la station de métro la plus proche. Evidemment, comme ma nuit n'a pas été suffisamment compliqué, il faut maintenant que j'aille retrouver Hector qui m'a donné rendez-vous. Le vieux barbu là-haut doit vraiment avoir une dent contre moi pour m'infliger tout ça. Ou alors j'ai été une vraie garce dans une vie antérieure et mon karma me rattrape. Quoi qu'il en soit, ma vie est compliquée !

Une fois sortie de la station, j'active le GPS pour me guider dans les rues de ce quartier que je ne connais pas du tout. Mon instinct se met en route à ce moment-là. Je ne comprends pas pourquoi Hector a changé notre point de rendez-vous. Cela a toujours été le même, cette petite ruelle, pas très loin de chez nous. Là, sans raison apparente, il décide de changer. Déjà quand il me l'a envoyé, je ne le sentais pas. Mais plus je m'enfonce dans les rues vides et moins je suis en confiance. Quand le GPS m'indique que je suis arrivée à destination, je prends quelques secondes pour observer. Juste face à moi se trouve un bar à l'allure miteuse. Le logo PMU clignote faiblement. Les vitres couvertes d'affiches et de crasse, ne laisse rien voir de ce qui se trame à l'intérieur. Clairement là, je ne suis pas rassurée !

Ma conscience et mon instinct me hurlent de fuir, mais je sais ce qu'il pourrait me coûter de défier Hector. Si je ne me présente pas, il le prendra comme un affront. Je ne peux pas prendre le risque. En colère, il serait capable de venir à l'appartement. Je ne peux pas imposer ça à Carmen et Rose, encore moins à Noham. Surtout quand je connais la passion de ce malade pour les couteaux. Repensant à cet horrible événement, je gratte la cicatrice qui me barre l'épaule. Elle me fait souffrir à chaque fois que les souvenirs de cette horrible soirée m'assaillent.

Embrase-moi - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant