Chapitre 20: Bataillon d'exploration

15 1 0
                                    

Les choses s'annonçaient mal. Depuis plus de trois semaines, la cité tenait bon, et les fortifications en bois tout autour étaient établies. La défense tenait bon, mais les pertes avaient été colossales pour seulement quelques victimes confirmées du côté des prédateurs.

En outre, ce que craignaient les navigateurs et les officiers, c'était l'arrivée d'une vague comme celle qui avait eu lieu la nuit du grand départ. Plus le temps passait, plus la menace d'être assaillis par une horde conséquente grandissait. Malheureusement, plus les fortifications étaient améliorées, plus le temps nécessaire à un progrès notable était important.

Le moral de la cité qui avait explosé à l'annonce des premières victoires sur les monstres avait de nouveau chuté lorsqu'une cité avait été aperçue, chutant du ciel à quelques kilomètres. Le drame était de voir des semblables si proches et pourtant condamnés. On débattait encore des risques de mener une expédition de sauvetage, et des potentiels bénéfices d'une telle action.

Nitram se tenait près de ses chèvres. Avec les deux boucs, elles avaient une importance capitale, car sans doute parmi les dernières représentantes de leur espèce. Le jeune homme était assis songeusement sur sa chaise tressée. L'air était bien plus chaud qu'en hauteur, et Nitram appréciait cette chaleur, vieux souvenir du temps d'avant.  L'éleveur avait un pressentiment  qui le hantait depuis que les polyarques avaient fait mention de l'atterrissage. Il était plein d'espoir, l'optimisme étant naturel chez lui, mais il avait la sensation malaisante qu'une main invisible tentait de lui arracher ses amis d'enfance.

Ce sentiment avait été douloureusement confirmé par le décès de Haru. Nitram n'était pas sûr que les autres soient au courant, mais lui avait vu le corps de son ami arriver en brancard en urgence. Il avait vu le médecin s'affairer, s'essouffler, suer eau et sang pour tenter de maintenir son ami éveillé. Mais il avait surtout vu le drap blanc mortuaire lui couvrir le visage, et l'air navré du docteur lorsque leurs regards se croisèrent.

Puis Khalli était arrivée en courant. Soulevant le drap, elle avait poussé un cri horrifié, le visage déformé par l'horreur de la mutilation de son ami. Pour la première fois, Nitram n'avait su trouver de mots réconfortants, et seuls des pleurs avaient eu leur place. Un navigateur était venu chercher Khalli pour lui demander de garder la posture de son rôle, mais un regard de braises lancé par la jeune fille avait suffi à dissuader le navigateur de prononcer le moindre mot.

Finalement, après un long débat, il fut décidé qu'une armée serait envoyée chercher des survivants. Pendant ce temps, les défenseurs devraient se tenir aussi discrètement que possible. Les ressources et renforts ramenés par l'expédition sauraient améliorer les chances de survie de toute la cité. L'objectif étant que l'armée attire les bêtes susceptibles d'attaquer la cité uniquement, on ne devrait affronter que les monstres qui tôt ou tard auraient été un danger pour la population.

L'expédition fut donc levée. La moitié des habitants de la cité se mit en ordre de marche, tandis que l'autre, consistant en la moitié la moins apte au combat, se barricadait. Thibault faisait parti de l'armée bien que n'ayant jamais appris à se battre. Il avait été affecté aux ordres d'un garde qui ne se sentait visiblement pas ou plus affecté par ce qui se déroulait sous ses yeux. D'une voix morne et vide, le garde avait expliqué au groupe composé de moitié par des artisans, qu'ils allaient faire partie de l'arrière garde, et qu'il ne fallait paniquer sous aucun prétexte, la panique gênant le bon déroulement des opérations. Il désigna ensuite, toujours avec flegme, le garde qui devait prendre la relève si il venait à mourir, puis le suivant, puis les suivants. Si certains étaient paniqués, l'absence d'émotivité du chef de patrouille passait aux yeux de Thibault pour une certaine sagesse.

La colonne s'ébranla, et le voyage commença. Des petits groupes de chevaliers, tout en armure rutilante, couraient en arpentant la colonne, contrôlant la bonne marche, et transmettant les messages. Le corps central était majoritairement constitué de gardes alors que les chevaliers et écuyers étaient massés dans l'avant garde, et les miliciens à l'arrière.

Tout d'abord, ce furent quelques attaques isolées. Les groupes orbitant autour de la colonne principale subirent quelques attaques, mais les monstres se repliaient sitôt que des renforts arrivaient. Mais bientôt, lorsque la colonne arriva en vue de la cité écrasée, les éclaireurs rapportèrent que les bêtes s'étaient massées aux alentours, et se préparaient selon toute vraisemblance, à attaquer la carcasse de la cité.

L'armée se mit de nouveau en branle, à marche forcée, et se positionna de sorte à menacer le rassemblement des bêtes. Pendant que les gardes se mettaient en position frontale, les chevaliers se répartissaient sur les flanc et en seconde ligne, alors que La section de Thibault ainsi que la majorité des miliciens furent envoyés sur le lieu du crash pour secourir les rescapés.

Des chariots étranges qui avaient voyagé en milieu de colonne furent installés en troisième ligne.

"Une arme secrète, dit un navigateur lorsque Thibault lui demanda si il savait ce qu'ils pouvaient contenir. Y'a que les chevaliers qui les poussent qui savent ce que y'a d'dans. On m'a dit que les chariots ne seraient ouverts qu'en cas d'extrême nécessité..."

Cytad'ailesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant