[Le fil du Destin] Tome 3 {Terminé}

XVIII

'Personne ne sait ce qui est juste.' Levi Ackerman

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Tout était silence et calme dans la grande salle de réception. Des bancs placés semblablement à ceux d'une église soutenaient le poids de centaines de personnes venus observer et célébrer la remise de nos médailles. Un objet doté d'un émeraude entouré d'or comme remerciement de nos actes de bravoure envers l'humanité.

La reine Historia Reiss portait avec fierté sa couronne, ses cheveux blonds enroulés en un magnifique chignon, une longue étoffe rouge écarlate sur ses épaules et dont la finition longeait le sol. Dans ses fines mains elle transportait sur un coussin, tout aussi rouge que sa toge, nos médaillons, précieusement. Elle était belle. Vraiment très belle. Sa prestance et sa beauté n'avait d'égal celle d'une princesse de Disney. Les survivants du bataillon d'exploration, les rescapés de la mission de reconquête du mur Maria, étaient agenouillés devant elle. Et j'en faisais partie. Nos poings sur nos cœurs, on attendait patiemment son discours et son acte de remerciement. L'assemblée restait toute aussi silencieuse que nous. C'était reposant. Et quelque peu stressant.

Historia se pencha vers Sasha, en première position de notre ligne solennelle. Elle l'a remercia pour son courage et lui entoura le cou de sa médaille. La miss patate lui baisa la main en signe de politesse et se redressa calmement. Connie et Jean firent de même. Puis vint mon tour. Elle sentait divinement bon. Une odeur de cerisier. Une odeur qui me rappelait celle de Levi.

- Par ce geste, je te remercie d'avoir offert ton cœur à la survie de l'humanité, Ren.

Elle se pencha et mit le collier autour de mon cou avec aisance et délicatesse. Je prenais sa main et embrassait celle-ci, les yeux fermés pour apprécier ce contact chaleureux de cette douce reine, ancienne cadette de la 104ème brigade d'entraînement, amie des membres du bataillon d'exploration.

Je me relevais en veillant à ne pas faire craquer mes os dorsaux fracturés par ce connard de titan bestial. J'allais rentrer chez moi avec de sacrées séquelles physiques et psychologiques.

Ce fût au tour de Levi de baiser la main de la jeune femme. Un pincement au cœur vint me pousser à ne pas me sentir jaloux de ce genre de choses. C'était juste une cérémonie, avec des gestes de politesse, une coutume. Rien de plus, rien de moins. Je chassais mes mauvaises pensées en voyant Eren bloquer sur la main de son amie. Comme si un électrochoc lui parcourait le corps avec ce contact bénin. Il serrait les dents et son regard laissait transparaître... de la peur. Il venait à nouveau de découvrir un secret caché de sa mémoire. Je le ressentais au fond de mon gésier.

- Eren ? Murmura doucement la blonde.

Tous les regards se posèrent sur le jeune homme, pétrifié. Pas de réponse. Il ne lâchait pas la petite main. Il avait eu un déclic. Un gros déclic. Un dangereux déclic. Il faisait la même tête en rentrant à la Capitale. Ce qu'il venait de découvrir n'annonçait rien de bon. J'avais de nouveau ce sentiment de voir naître la folie chez ce jeune homme. Une folie pure, légitime et monstrueuse. J'espérais secrètement que son amour pour l'autre Levi puisse apaiser son désir fou de venger sa mère et retrouver sa liberté.

- Tu marches trop vite pour quelqu'un qui a les os fracassés, gamine.

En effet, j'avais accéléré le pas en quittant la cérémonie. Pour je ne savais qu'elle raison, je ne voulais pas reconnaître le sentiment de monstruosité ressenti et partagé avec mon autre moi. Je me doutais de ce qu'il avait compris de la vérité sur les titans. Et ce n'était pas joyeux du tout. Ça m'effrayait.

J'arrêtais ma course pour laisser le temps à mon court sur pattes de me rattraper. Je serrais ma médaille dans le creux de ma main moite.

- T'as aussi une mouche qui t'a piqué pour avoir une tête comme ça ? Je sais que toi et le gamin vous êtes pareils mais ça devient flippant de voir le même regard dans vos yeux.

J'avais la bouche entrouverte, mais aucuns mots n'arrivaient à sortir. Une agréable chaleur envahissait ma joue en pleine cicatrisation. Il me fixait tendrement, avec une once d'inquiétude. Il était terriblement beau avec ses cheveux tirés en arrière avec du gel, dont les substances et ingrédients restaient inconnus, pour l'occasion. Il était élégant et fier de porter tout le mérite de ses sacrifices. Il sécha une larme solitaire de son pouce.

- J'aime pas quand tu pleures sans me dire la raison de ton chagrin... Tu veux qu'on aille faire un tour et en parler ?

Je secouais la tête négativement. Je voulais rentrer chez moi. Point final. Il était temps de rentrer, notre mission était achevée. L'autre Ackermann avait été suffisamment formé par mon noiraud pour s'en sortir dans ce monde. Plus rien ne nous retenait ici. Je plaçais sa main froide dans le creux de la mienne en souriant doucement.

- Désolé de t'inquiéter pour rien, c'est juste l'émotion. Je veux rentrer à la maison maintenant, Levi.

- Comme tu veux. Je me fis à ton jugement, Eren.

Une sensation de déjà vu me parcourait le corps.

- Je vais dire au revoir à l'escouade, on se rejoint dans le labo d'Hanji ? Demandais-je en m'éloignant.

Il hocha la tête et s'en alla loin de mon regard perturbé par toutes ces émotions soudaines. Au loin, Mikasa, Jean, Connie, Armin, Floch et Eren semblaient se crêper le chignon. Le ton était sec et fort. À ma vue, Floch souffla et partit loin de nous, sans même m'adresser un signe de politesse. Ce garçon ne me plaisait pas, tant dans sa façon d'agir, tant dans sa façon de penser. Erwin par-ci, Erwin par-là, c'était trop pour ma capacité à comprendre la durée d'un deuil pour certaines personnes. Et son attitude pendant la mission ne m'avait pas plût du tout. Sasha, Connie et Jean suivirent le mouvement du rouquin en me saluant d'un clin d'oeil amical.

- Je viens vous dire au revoir, avant de partir comme un sauvage avec le Caporal.

- Tu ne restes pas avec nous ? On a besoin de ton talent pour sécuriser l'enceinte du mur Maria des derniers titans pourtant.... Fit Armin, une petite moue boudeuse sur ses lèvres.

- Je dois prendre mes responsabilités dans mon monde. Vous irez bien sans moi, et sans Levi. Vous avez son remplaçant et l'espoir de l'humanité à vos côtés, je ne me fais pas de soucis pour vous, ça ira.

Je leur sourie tendrement. Je mentais. Je me faisais beaucoup de soucis. Ils n'étaient pas au bout de leurs peines. Le jeune Jeager était celui qui me rendait le plus nerveux et effrayé. Sans le vrai Caporal-Chef Levi, je doutais qu'ils puissent arrêter la folie titanesque de ce grand dadet, seuls. Mais je me trompais peut-être. Je devais peut-être faire confiance au destin, voir même à l'amour qui pourrait guérir un tant soit peu ses blessures. Non. Je ne devais pas me faire un sang d'encre pour eux. Ce n'était pas mon rôle. Mon but était assouvi. Je n'avais plus aucunes raisons de rester entre les murs. Je devais leur faire confiance. Croire en eux plutôt qu'en mes capacités. C'était mon choix. Un choix sans regrets.