Le Pré de l'Asphodèle était l'endroit parfait pour les affrontements à venir. C'était une vaste étendue verte sans aucun obstacle. De jolies fleurs blanches poussaient de manière aléatoire. Elles égaieraient le champ de bataille.
Il hébergeait d'ordinaire les âmes n'ayant commis ni fautes, ni actions vertueuses durant leur vie sur terre. Un terrain neutre en d'autres termes. Se battre en terrain neutre était un symbole fort pour les femmes. Cela leur permettrait de recommencer à zéro en cas de victoire et d'élaborer de nouvelles règles. Des règles plus justes. Pourquoi des tueurs et des violeurs étaient-ils envoyés aux Champs Élyséens ? Parce-que dans le monde bâti par les hommes, seule la loi du plus fort comptait. Dans le monde que bâtiraient les femmes, il en serait tout autrement.
Les troupes ennemies se virent de loin. Il n'avait fallu que quelques jours aux hommes pour s'organiser et être prêts à se battre et ils arrivèrent casqués et armés de pied en cap.
Ils étaient conduits par les plus grands héros de tous les temps : Achille et Hector, adversaires historiques, avaient fait la paix pour abattre leur ennemi commun. Hercules, Persée, Thésée et bien d'autres, menaient leurs soldats vers le camp des femelles. Celles-ci n'auraient jamais cru que ces hommes se manifesteraient. C'était considérer leurs mères, épouses et filles comme une vraie menace et jamais les femmes n'auraient pensé être vues comme telles. Cela dit, elles se méprenaient. Ils n'étaient pas là pour lutter contre un danger mais pour avoir le plaisir de corriger ces arrogantes qui croyaient pouvoir renverser leur autorité.
Antiope était à la tête des troupes féminines. Montée sur un destrier massif à la crinière blanche, elle portait une splendide armure qui étincelait à la lumière rougeâtre du soleil infernal. Une longue cape blanche flottait majestueusement derrière elle. Elle avait une prestance incroyable et à cet instant, la mortelle amazone était bien digne d'une déesse. En voyant les rangs masculins approcher, elle couvrit sa tête de son heaume et son écuyère lui tendit une belle lance en argent au manche couvert de lierre. Lorsqu'elle s'en saisit, la plante grimpa le long de son avant bras et elle ne fit plus qu'un avec son arme. Elle poussa un cria de guerre et mena les femmes à l'attaque. Celles-ci se précipitèrent derrière elle, certaines à pied, d'autres également à cheval. Toutes étaient animées par la même fureur de vaincre.
Les deux armées s'entrechoquèrent dans des bruits de métal et d'acier. Les épées venaient taper les boucliers, heurter les armures ou trouer les chairs fantômes. Les premiers corps ne tardèrent pas à être piétinés.
Athéna était également en première ligne. Elle protégeait Ariane, qui avait tenu à se battre comme tout le monde. Mais la jeune fille n'était pas vraiment habile au combat. Pendant que la déesse tuait à elle seule une centaine d'hommes, la jeune femme se débattait maladroitement contre un seul qui lui donnait du fil retordre. Profitant d'un moment d'accalmie de son côté, Athéna lui vint en aide en transperçant l'homme de sa lame.
-Merci, cira Ariane au milieu du tumulte.
La déesse hocha gravement la tête et recommença à se battre.
Un peu plus loin dans la mêlée, Hélène n'avait eu aucun mal à repérer Pâris. Le pleutre restait caché derrière son frère, Hector, et il s'illustrait dans l'art de l'évitement. La jeune femme se faufila entre les combattants et les combattantes, et profitant du fait qu'Hector soit aux prises avec trois femmes déterminées, elle sauta au coup de son ravisseur, faisant fi des risques qu'elle encourait. Quitte à ne tuer qu'une seule personne et mourir, elle voulait que ce soit lui. Elle le renversa à terre et lui ravagea le visage de coups de poings.
-Content de me revoir ? lui hurla-t-elle.
-Hélène... Arrête...
Se furent les seuls mots qu'il put dire avant que ses dents ne tombent. Les phalanges d'Hélène étaient meurtries mais elle ne sentait rien d'autre que le goût délicieux de la vengeance.
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Une saison en enfer
General FictionQui est cette femme, qui va et qui vient, qui peut sortir des Enfers sans même être vue de Cerbère, le chien à trois têtes ? A qui doit-elle rendre compte de cette mission qui l'amena loin de chez elle, loin du royaume des Morts ? Et de quelle missi...