Chapitre 4

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 Juin 2020

Harry

La voiture se gara dans la cour, faisant sursauter un chat qu'il n'avait jamais vu auparavant.

Quatrième jour.

Lottie était déjà dehors, en uniforme, son téléphone à la main. Harry savait que sa mère était déjà au travail car elle commençait plus tôt le vendredi. Il avait appris que son mari était actuellement en voyage d'affaires. Il n'avait aucune idée de qui allait déposer Lottie au lycée, mais elle n'avait pas l'air de se poser de questions. Ses cheveux étaient attachés en un chignon qui dégageait ses yeux bleus. Et ils ressemblaient tellement à ceux de son frère qu'il en eut mal au cœur.

Elle vint serrer la main d'Anne, puis fit la bise au bouclé. Ils s'étaient tous deux rapidement rendus compte que se serrer la main alors qu'ils n'avaient que deux ans de différence était assez idiot.

"Louis dort encore parce que ma mère ne voulait pas le réveiller. Ça faisait longtemps qu'il n'avait pas fait une nuit complète."

Charlotte avait le visage d'une poupée mais le regard de quelqu'un qui avait vu toute la misère du monde. Pire, de quelqu'un qui l'avait vécu. Il n'arrivait pas à être à l'aise avec elle, même si elle était adorable. Il se sentait trop petit devant elle, trop insignifiant. C'était impossible à expliquer, peut-être était-ce un pouvoir que la famille Tomlinson exerçait sur lui.

"Harry ? l'interpella Anne. Tu pourrais aller chercher Louis ?
_Louis ? répéta l'intéressé, visiblement sonné.
_Oui, j'ai besoin de m'entretenir avec Charlotte quelques minutes. Réveille-le doucement surtout et annonce-lui ce que j'ai prévu de faire aujourd'hui, ça va peut-être le motiver à sortir de son lit."

Cette idée ne l'enchanta absolument pas mais il comprit bien vite que ce n'était pas négociable. Et il s'était promis d'essayer d'être moins égoïste alors c'était le moment ou jamais.

Il s'engouffra dans le salon où un canapé en cuir noir leur faisait face. Une canne blanche était plaquée contre le mur, juste à côté de la télévision mais Jay leur avait déjà expliqué qu'il ne l'avait jamais vraiment utilisé. Harry avait sincèrement du mal à comprendre pourquoi. Anne lui avait dit qu'elle avait rarement vu un handicapé renâcler autant face aux aménagements qui lui étaient proposées. Et le bouclé dans tout ça ? Il se sentait définitivement dépassé par tout ça.
Il se dirigea finalement vers le fond du couloir, là où se situait la chambre du plus âgé. Il y était déjà allé une fois, lorsqu'il avait dû faire la visite de la maison avec sa mère pour déterminer les aménagements qu'ils devaient mettre en place.

Et pourtant quand il ouvrit la porte de sa chambre après avoir doucement frappé, il eut l'impression de n'avoir jamais mis les pieds ici. Il était déjà sept heures quarante mais la pièce était baignée dans une lumière rouge orangée causée par les rideaux tirés devant une fenêtre ouverte. Il faisait horriblement chaud aujourd'hui, et malgré cela le corps de Louis était recouvert par une couette épaisse. Le lit était large au point de pouvoir contenir quatre personnes sans problème, et pourtant, il était recroquevillé sur lui-même. Harry pensa qu'il ne devrait peut-être pas le regarder dormir, mais c'était plus fort que lui. Alors il s'approcha lentement en faisant le moins de bruit possible et son souffle resta bloqué dans sa gorge.

Il était tellement beau, c'était presqu'inhumain. Il avait probablement trop chaud lui aussi parce que des gouttes de sueur longeaient ses tempes et ses cheveux étaient collés à son front. Il devait être en train de rêver car ses sourcils se fronçaient puis s'haussaient, faisant son nez se plisser, et il ne put s'empêcher de sourire face à cette vue. Sa bouche s'entrouvrait parfois, comme s'il s'apprêtait à parler dans son sommeil, et il se demanda si c'était possible. Il ne se souvenait presque plus du son de sa voix. Mais là, tout de suite, il s'en fichait. Il s'en fichait de tous ses problèmes car il avait l'air tellement paisible qu'il voulait seulement qu'il reste comme ça pour toujours. Qu'il rêve pour l'éternité. Il avait l'air imperturbable ainsi. Harry avait l'impression que même s'il avançait sa main vers lui il n'arriverait jamais à le toucher tant il semblait dans un autre monde. Et, quelque part au fond de lui, un élan de lucidité le poussa à se demander s'il rêvait de Zayn en ce moment. Si ce n'était pas pour ça qu'il avait l'air aussi concentré et apaisé. Son cœur se contracta.

Blinded [L.S.]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant