- Il lui faisait confiance, il devait lui faire confiance.
Gabriella n'attendit pas et se reconcentra sur le corps devant elle. Elle déchira les vêtements que Milon portait au niveau de la blessure et analysa les dégâts.
- J'ai besoin de serviettes, de fils et d'alcool.
- Quelle sorte d'alcool ? demanda une domestique non loin.
- Le plus fort que vous avez. Une aiguille ! Rapportez-moi une aiguille avec le fils ! Et une pince de cheminée, la plus fine que vous pouvez trouver.
Plusieurs servantes coururent au château pour aller chercher ce que l'ancienne servante du roi demandait.
Une femme chercha à se frayer un chemin dans la foule. Les gardes cherchèrent à l'empêcher de traverser mais sa voix hurlante attira l'attention de Gabriella.
- C'est la femme de Milon ?
Il hocha la tête.
- Fais-la venir ici.
Le souverain s'exécuta. Les gardes libérèrent l'emprise qu'ils avaient sur cette dernière et elle s'approcha en courant, les yeux inondés de larmes.
- Je ne connais rien à la médecine... murmura-t-elle.
- Ne vous en faites pas, j'ai juste besoin de vous pour rester auprès de votre époux. Tenez-lui la main et parlez-lui autant que vous le pouvez, il ne faut pas qu'il s'endorme.
La femme hocha la tête vivement.
- Seigneur Milon, vous m'entendez ? reprit Gabriella.
Le garde sembla cligner des yeux.
- Je veux que vous gardiez le maximum de vos forces, d'accord ? Votre femme va vous tenir la main, serrez-la fort si vous en ressentez le besoin. Il vaut mieux éviter que vous parliez alors quand je vous poserai des questions, clignez des yeux une fois pour me dire oui et deux fois pour me dire non. Vous comprenez ?
Le brun cligna une fois des yeux.
- Parfait.
L'épouse hésita un instant puis attrapa la main de son mari et en commençant de lui parler de leur projet d'enfants, de leur vie, de leurs habitudes.
- Gabriella ? Que fais-tu ? demanda Airy.
- Je dois attendre que les servantes me ramènent ce que j'ai demandé, en attendant je maintiens au mieux la plaie fermée.
- Et après ?
La servante releva la tête vers son ancien amant.
- Je vais devoir retirer le bout de la flèche qui est resté à l'intérieur quand le médecin l'a cassée. Ensuite je vais recoudre la plaie pour qu'il ne perde plus de sang.
- Et l'alcool ? La pince à cheminée ?
Sa voix était clairement terrorisée, il était en train de perdre son plus grand soutien.
- L'alcool est un désinfectant, je vais en passer sur tous les outils. La pince m'aidera à retirer la flèche, le fil et l'aiguille à recoudre la plaie. Les serviettes sont pour le sang.
Le roi hocha la tête. Il n'osait pas prononcer la phrase de trop, la question dont elle n'avait aucune réponse de toute façon.
Est-ce qu'il va vivre ?
Les domestiques revinrent enfin avec le matériel. La doctoresse improvisée se concentra sur la plaie puis releva la tête vers le roi.
- J'ai besoin de toi.
Le souverain s'approcha du corps de son ami et s'y agenouilla, juste en face de Gabriella.
- J'ai besoin que tu places tes mains juste au-dessus des miennes, quand je vais les retirer, tu appuieras très forts sur la plaie d'accord ?
- Ça lui fera mal ?
- Oui. Mais il faut que je prépare mes outils sans que trop de sang ne s'échappe. C'est nécessaire Airy.
Il hocha la tête.
- Près ? Un, deux, trois !
La jeune femme retira ses mains et le dirigeant appuya les siennes contre le corps gémissant de son ami. Attrapant la bouteille d'alcool, elle imbiba la pince de cheminée et le corps du blessé le faisant ainsi hurler de douleur.
- Tenez bon Seigneur Milon, dit-elle. Ok Airy, quand je te le dirais, tu vas retirer tes mains. Un, deux, trois, maintenant !
Le roi obéit et la femme plongea avec la pince dans la plaie. Le garde ne pouvait retenir ses hurlements à ses côtés, mais elle ne s'arrêtait pas.
- Je ne la trouve pas... grinça-t-elle des dents.
Après quelques secondes, elle jeta la pince au loin. Celle-ci tenait fièrement le bout de flèche, auteure du drame.
- Rappuie sur la plaie.
Le souverain s'exécuta. Milon continuait de crier mais étonnement, Airy ne doutait plus. Il savait que Gabriella faisait tout pour le sauver, et même, qu'elle y arriverait. La jeune femme regarda autour d'elle et remarqua la ceinture qu'elle portait sur sa robe et la retira à toute allure, salissant encore un peu plus ses vêtements de sang.
- Seigneur Milon, je vais vous bouger légèrement. Cela va faire mal mais ça ne durera qu'un instant.
Habilement, la jeune femme passa le bout de la ceinture sous le corps du garde puis réussit à le faire passer de l'autre côté. Comme elle l'avait anticipé, l'homme s'époumona une fois de plus, mais elle devait maintenir le sang au mieux. Une fois la ceinture sous lui, elle rejoignit les deux bouts sur son torse et la serra le plus qu'elle put.
- Que fais-tu ?
- C'est une sorte de garrot qui empêchera le cœur de donner trop de sang vers la plaie, commença-t-elle en attrapant le fil et l'aiguille qu'une des servantes avait déjà eu l'idée d'assembler. Je dois recoudre vite si je ne veux pas qu'il perde ses jambes.
Les yeux de la femme de Milon s'écarquillèrent mais Gabriella n'y fit pas attention et plongea l'aiguille au bord de la blessure. A chaque fois que l'aiguille transperçait sa peau, l'homme gémissait de douleur.
- Airy, tiens-le.
Le roi appuya ses mains sur les épaules de son ami tandis que son ancienne servante continuait de passer point après point le fil le long de la plaie. Régulièrement, elle s'arrêtait pour faire un nœud avec le fil puis reprenait sa tâche.
Enfin, après une longue minute de supplice, elle termina sa couture. Elle détacha aussitôt la ceinture, soulageant le blessé.
- Je vais remettre de l'alcool une fois de plus Seigneur Milon, cela va vous brûler.
Il cligna des yeux une fois puis elle s'exécuta. Il agrippa la main de sa famille avec force. Gabriella ne pouvait rien faire de plus, le destin était désormais le seul à pouvoir décider de l'avenir du garde royal.
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La Servante du Roi
Historical FictionL'ancienne servante du roi de Nekavland est partie, et Gabriella doit dorénavant la remplacer. Mais il se pourrait bien que le roi Airy ait besoin de plus qu'une cheminée allumée à son réveil, comme par exemple d'une présence féminine dans son lit. ...