Chapitre 11 : Tourne autour

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Une mélodie m'extirpa du sommeil et je me coulais hors du lit en tentant de ne pas faire bouger le matelas, laissant mes deux amants se reposer autant qu'ils pouvaient en avoir besoin après pareille nuit. Je passais rapidement par la douche. Le jet était chaud. Je ne m'attardais pas, je n'étais toujours pas d'humeur.

Je descendis la volée de marches qui me séparait du rez-de-chaussée, trouvant le salon impeccablement nettoyé de fond en comble. Même mon œil avisé ne put distinguer la moindre trace de sang sur le parquet pourtant antique de la maison. La baie vitrée avait été remplacée et je fus accueilli par les premiers rayons du soleil.

Jack était au piano, il me tournait le dos. Son imposante stature de mécanicien aéronautique était toute focalisée sur le clavier où courraient ses doigts comme s'il avait toujours fait cela.

Je m'approchais pour mieux écouter quand il repéra le son du froissement de mes vêtements et qu'il sursauta en cessant son activité pourtant plaisante.

« — Ah ! Excusez-moi, j'voulais pas vous réveiller... J'viens de l'accorder, les militaires d'hier ne sont pas trop des lumières en matière d'instruments... J'ai pas pu résister quand j'ai commencé pour vérifier si j'avais bien ajusté tout...

— Ce n'est rien, je suis le seul à m'être réveillé. Ce n'est pas la peine de s'arrêter pour si peu. »

Je le laissais choisir ou non de reprendre cette jolie mélodie qui avait su me réveiller avec un sentiment nouveau. Mes pas me menèrent naturellement dans la cuisine où je constatais que le carnage de la veille avait également été parfaitement effacé. Je m'appliquais ainsi à préparer de quoi nourrir la petite armée qui résidait entre ces murs. C'était assez divertissant de s'imaginer combien pouvait manger un Daï de la dimension d'Ari et si le tout petit volume occupé par Dom était réellement une valeur sûre pour juger de son appétit.

C'est alors que je la sentis. La présence brutale et massive derrière moi. Pourtant je ne sentais aucune animosité. J'avais seulement la certitude qu'au corps à corps, je ne gagnerais pas contre la personne à qui je faisais dos. Lentement, je me retournais pour me retrouver progressivement face à mon double.

Un Haug, aussi grand que moi. Une peau bleu pâle, des cheveux blancs, interminablement longs.

Il s'approcha de moi, je restais tétanisé. Je n'avais jamais rencontré aucun de mes congénères. Il posa sa main sur ma joue. Ses yeux sont aussi noirs que les miens, il semblait ne pas croire ce qu'il voyait, au moins autant que moi. Je n'osais pas bouger. Je n'avais pas peur, je ne savais pas ce que je devais faire.

« — Je t'ai senti passer, hier soir. J'ai vu Dalmas tomber par la fenêtre du garage et je m'apprêtais à prévenir les autres quand je t'ai senti passer. »

Je ne trouvais rien à répondre, il devait être celui dont le gouverneur avait parlé la veille, celui qui restait en permanence dans son cockpit. Il avait toujours sa main sur ma joue. Elle traçait les lignes qui se dessinaient sur mon visage, mes stigmates. Ils avaient toujours été là, mais personne ne semblait jamais les voir. Il était le premier à les toucher, le premier à les remarquer.

« — Je ne suis pas monté hier, il y avait trop de grabuge ici, et je ne suis pas à l'aise avec les gens. Je n'avais jamais vu un Haug apprivoisé avant, tu es le premier. »

Je ne savais pas si je devais me sentir outré ou non à cette dernière phrase. C'était vrai au fond, j'étais apprivoisé. Parce que les miens n'étaient pas venus me chercher ici et qu'il avait bien fallu que je vive, même si ça voulait dire parmi les humains.

Il recula d'un pas pour me regarder mieux. Je tentais de ne pas faire attention à son regard attendri qui me mettait presque mal à l'aise. Je finis de préparer le petit-déjeuner, préparant un plateau pour mes deux amants.

SurplombeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant