Eragon, Tome 5 : Le peuple Gris

Chapitre 6 : Númendil

Après avoir salué les différents membres du conseil -sauf Duumba dont le regard semblait vouloir l'anéantir- Eragon quitta prestement la grande salle pour aller rejoindre Arya.

Il fut arrêté par l'elfe Númendil, qui l'attendait à la sortie. Elle lui saisit le bras :
-Quoi que ce soit, je veux en être, commença-t-elle.
-Pardon ?
-Ne vas pas me dire que vous avez parlé de cuisine là dedans, railla-t-elle. La reine des elfes, le Murtagh de la légende, toi... Tous réunis au même endroit. Je ne suis pas née de la dernière pluie, Eragon. Ma main à couper que vous étiez en tain de décider du sort de l'Alagaësia entre ces quatre murs...
-Détrompe toi, la coupa-t-il. Nous faisons face à quelques mystères, certes, mais rien d'alarmant pour l'instant.

Il eut néanmoins un petit sourire. Après tout, qu'est-ce qui l'empêchait de la prendre dans son équipe ? Númendil avait beaucoup d'expérience et, si elle ne brillait pas forcément toujours par l'épée, elle avait un don pour se sortir des situations les plus désespérées. Ce talent pourrait leur être utile, car il sentait les ennuis poindre à l'horizon. Et puis son ardeur lui plaisait.
-Bon écoute, dit-il, tu vas me promettre de ne rien répéter à qui que ce soit d'autre que Turganor.
-Il écoute déjà notre conversation, mais je signe si tu promets de me faire rejoindre le groupe.
-Dans ce cas, nous avons un marché.
Ils se tapèrent dans les mains, puis Númendil promit, et Eragon lui résuma la situation.
-Donc, dit-il, tu nous rejoins ?
-Évidemment !
-Alors va te coucher.
-Quoi ? fit-elle incrédule. Mais...
-Il se fait tard. Nous commencerons les recherches demain.
Elle finit par acquiescer, à contrecœur.
-Dans ce cas, je t'attendrai devant tes appartements à la première heure, Ebrithil ! Et n'essaie pas de m'éviter ! l'avertit-elle avant de s'en aller.

« Ouf ! souffla Eragon. Enfin débarrassé d'elle. Pour peu de temps malheureusement... »
Il s'empressa de parcourir le couloir pour rejoindre Arya.

*******************************************

L'elfe attendait sur la terrasse, dans une obscurité tenace, seulement chassée par endroits par de petites lanternes sans flamme.
Elle se pencha par dessus les créneaux devant elle pour jeter un coup d'œil au paysage, mais une masse nuageuse lui masquait la cité qu'elle avait aperçu à son arrivée.
« Il en met du temps... », pensa-t-elle.

Elle se demanda s'il était encore avec cette femme qui l'avait abordée subitement quand il était sorti.
Du coin de l'œil, sans pour autant se retourner, elle les avait observés un court instant bien qu'elle ne put entendre leur conversation : cette elfe aux cheveux d'argent et à la peau d'albâtre semblait lui parler avec une certaine familiarité. Seraient-ils... Non, c'était sûrement son imagination.
Elle sentit dans son esprit le rire si particulier de Fírnen.
« Qu'est-ce que tu as ? fit-elle irritée. »
« Tu es jalouse, on dirait... »
« Moi ? Pas du tout. Je me demandais juste qui... »
Ils n'eurent pas le temps de prolonger leur échange mental, car Arya entendit des pas dans le couloir.
Un instant plus tard, elle le vit.
-Désolé. J'ai eu un petit contretemps, dit-il en souriant.
Bien qu'elle avait prévu de lui afficher une mine contrariée, Arya se surprit à lui rendre son sourire.
-Ce n'est rien, répondit-elle malgré elle, que voulais tu me dire ?

Sans un avertissement, il lui prit la main pour l'emmener dans un petit escalier en colimaçon, caché dans la pénombre. Elle le laissa faire, curieuse.
-Attention aux marches, l'avertit le jeune homme.
Elle remarqua une curieuse note dans sa voix qu'elle n'avait pas entendu jusqu'ici depuis son arrivée à Tarak'fell, et qui déterrait des moments passés avec lui jusqu'ici enfouis profondément dans sa mémoire. Il grimpait les marches quatre à quatre, tenant toujours sa main dans la sienne, si vite qu'elle avait presque du mal à le suivre. Le jeune homme lui semblait léger, libre de tous ses soucis.
De son côté, ses jambes percluses de courbatures, l'elfe se rappela qu'elle avait chevauché Fírnen durant tout le jour ainsi que la nuit dernière.