Chapitre 12 - Mythologie

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Dès que Lynn eut disparu de son champ de vision, Saya chancela, la vision trouble et la respiration bloquée. Tous ses muscles se changèrent en coton, incapable de soutenir son poids et elle bascula sur le côté. Elle serait tombée si on ne l'avait pas rattrapée par les épaules.

— Saya, est-ce que tout va bien ? s'enquit la voix inquiète de Diarmuid.

L'entendre lui fit prendre conscience qu'elle ne respirait plus. Saya aspira une grande goulée d'air, et en voyant le monde redevenir net, hocha la tête. Voyant qu'elle tenait debout, Diarmuid s'écarta. Saya raffermit sa prise sur la baguette de pain qu'elle tenait dans ses bras. Voir son professeur de Magie avec un sac de courses dans la main lui arracha un faible sourire.

— Oui, je... J'ai eu un malaise, mais c'est passé, merci.

— Tu ferais mieux de t'asseoir un p-

— Lynn ! s'exclama-t-elle en pointant la ruelle où avait disparu sa voisine. Lynn est partie par là-bas, elle dit qu'elle a vu quelque chose, comme une silhouette ou peut-être...

— J'y vais, s'empressa de répondre Diarmuid en posant ses courses par terre. Ne bouge pas, reste bien dans l'allée centrale.

Saya acquiesça. Elle n'avait de toute façon pas la force de le suivre. Ses genoux flageolaient encore. Elle se laissa tomber sur le banc le plus proche et se força à manger quelques bonbons. Elle se sentait si fatiguée... Elle essaya de contacter Lynn par télépathie, mais ne récolta qu'une migraine aiguë. Son état lamentable lui donnait envie de pleurer.

À quoi ça servait d'être la meilleure élève de leur petit groupe, si elle ne pouvait même pas les aider quand ils en avaient besoin ? À défaut, Saya se contenta de scruter la ruelle en se rongeant et les ongles et les sangs, priant pour que son amie et son professeur en ressortent en un morceau.

— Saya ! cria Lynn. Oh mon Dieu, tu bouges, merci merci merci !

Saya se retrouva noyée sous une masse de cheveux blonds apparus miraculeusement devant elle. Lynn n'était pas là une seconde plus tôt et voilà qu'elle la serrait dans ses bras comme si c'était elle qui était morte, et non l'inverse. Saya lui rendit maladroitement son étreinte, confuse.

— Je viens de vivre le truc le plus bizarre de toute ma vie, s'excitait la métamorphe sans pouvoir s'arrêter. J'ai bien cru que j'allais y passer, et juste après, j'ai cru que j'étais coincée dans une dimension parallèle je-

— Attends, attends, quoi ? Tu n'as pas vu Diarmuid ?

— Diarmuid ? s'étonna Lynn en s'écartant. Non pourquoi ?

— Je viens de le croiser, il est parti à ta recherche.

Les yeux gris-bleu de Lynn s'écarquillèrent sous la panique.

— Mais il y a encore le monstre ! s'exclama-t-elle. S'il est parti et qu'on ne s'est pas vus, il est peut-être en danger ! On ne peut pas le laisser là-bas !

— Tu ne vas pas y retourner, quand même ?

— Diarmuid a à peine cinq ans de plus que nous, on est dans le même bateau et je refuse de laisser quelqu'un tout seul face au truc dans la ruelle, c'est mort !

— Je viens avec toi, annonça Saya.

— Tu rigoles, tu es toute blanche !

Saya la défia de l'en empêcher et ce fut décidé : elles s'élancèrent vers la ruelle, toutes leurs affaires plus le sac de Diarmuid dans les bras. Elles déboulaient sur la scène quand un flash bleu les éblouit. Leurs tympans crissèrent sous la force du sifflement que poussa le monstre. Saya n'eut que le temps de voir ses quatre pattes hypertrophiées se déliter sous la brûlure de la Magie, avant que tout ne s'éteigne. Diarmuid baissa le bras et les dévisagea toutes les deux, surpris de les trouver là.

L'Âme de la Magie [T1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant