Tout a commencé avec un cocktail, des yeux trop grands et une guitare oubliée. Pour Matt, serveur dans un bar pour payer ses études, cette rencontre est le début d'une relation bouleversante...
Stray Cat est une tranche de vie yaoi à l'ambiance méla...
Je restai assis par terre, les joues trempées, trop sonné pour faire autre chose qu'appuyer encore une fois pour rejouer cette chanson qui avait mis à terre toutes mes convictions, me laissant dans les ruines d'un mélange d'horreur et de soulagement. Me rendre compte que je n'étais pas le seul à ressentir ça me soulageait étrangement. Je le sentais, une émotion aussi forte ne pouvait pas être artificielle.
On sonna à l'interphone. Comme un somnambule, je me levai pour répondre.
— C'est moi, murmura la voix de Sacha.
Je souris malgré moi. À croire que c'était le destin.
— Monte.
Quelques secondes plus tard, j'ouvris la porte de mon appartement et le vis lever vers moi des yeux inquiets.
— Ça va ? murmura-t-il.
Cela se voyait sans doute que j'avais pleuré.
— Tu as entendu la dernière chanson de the Mistaken Ones ? demandai-je, négligeant sa question.
— Je ne les ai pas écoutés depuis mon départ, dit-il d'une voix nouée.
— Assieds-toi, et écoute, ordonnai-je en désignant la place que j'occupais devant mon ordinateur.
Intimidé, il obéit, et je lui remis la chanson. Je ne fus pas surpris de voir les larmes lui monter aux yeux. Une fois le morceau fini et les crépitements des applaudissements coupés, je me penchai vers lui.
— Alors ?
— Ils se débrouillent mieux sans moi, murmura-t-il d'un ton distant, comme anesthésié.
Je ne pus m'empêcher de le gifler.
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Il porta sa main à sa joue et me fixa, choqué.
— Abruti ! explosai-je. J'ai écouté toutes les vidéos, tous les morceaux ! Le groupe s'est complètement cassé la gueule après ton départ. Si cette chanson-là est la meilleure qu'ils aient faite depuis, et c'est uniquement parce qu'elle parle de TOI !
— De... de moi ?
— Est-ce que tu as écouté les paroles au moins ?
— Tu connais mon niveau en anglais.
— Mais fais un effort enfin ! C'est une putain de chanson d'amour, et tu n'es même pas foutu de comprendre ça ? ! Merde, je comprends qu'il ait pété un câble au bout d'un moment !
Il me regarda avec ses grands yeux, tourna la tête vers l'écran, puis vers moi de nouveau, rougissant de plus en plus. Le silence de la pièce était de plus en plus pesant, et je sentais mes mains trembler, mon corps secoué à chaque battement de cœur, tandis que j'observais les expressions se succéder sur son visage. Il prenait enfin la mesure de ce que je voulais dire. Moi qui aurais juste voulu l'allonger sur le sol et l'embrasser à n'en plus finir.
— Va le voir.
Il m'adressa un regard stupéfait. Je le comprenais, quoi de plus stupide que de le pousser dans les bras de mon rival ? Seulement, mon combat était perdu d'avance. Je savais ce que j'avais à faire, pour lui comme pour moi. Ce n'était pas ce qu'il attendait de moi, ce n'était pas ce qu'il avait obtenu jusque-là.
— Va le voir, répétai-je d'une voix rauque. dis-lui que tu as entendu sa chanson, dis-lui que tu veux revenir. Dis-lui que tu l'aimes.
— Mais... Il m'a chassé parce que je suis un glandeur insupportable et que j'ai un niveau de merde à la guitare. Il ne voudra pas me revoir !
— Mais ta gueule, tu te rends compte des progrès que tu as fait ?! Tu te rends compte que l'âme du groupe, c'était l'alchimie que vous aviez tous les deux ? Réfléchis un peu, merde ! Ce mec, là, il a mis ses tripes sur la table, et tu me dis que tu ne comptes rien faire ? Tu te rends compte que tu te comportes avec les gens comme si tu t'en avais rien à foutre de leur sentiments ? Tu réalises à quel point ça peut être douloureux ?
J'avais parlé au nom de Jonathan, mais ces mots étaient aussi les miens, parce que je me projetais trop bien, je me représentais trop clairement ce qu'il avait pu éprouver face à l'indifférence éthérée de Sacha.
Je l'avais forcé à se relever, le tirant par le col, et il semblait bouleversé et perdu comme jamais tandis que je le menais vers l'entrée avec une fermeté presque brutale.
— Je ne veux pas me faire rejeter encore une fois, supplia-t-il en se raccrochant à ma manche.
— Est-ce que tu t'es demandé combien de fois lui s'est senti rejeté ? demandai-je froidement.
A ces mots il baissa les yeux, honteux, au bord des larmes. Je ne savais pas grand-chose de leur histoire, mais je connaissais assez Sacha pour deviner qu'il avait beaucoup à se reprocher.
— Pardon...
— C'est normal d'avoir peur.
— S'il me rembarre et me hurle qu'il ne veut plus jamais me revoir...
— Tu n'auras qu'à revenir ici. Je serai là.
Il leva vers moi des yeux brouillés de larmes.
— Ça ne va pas de dire des choses pareilles ? bredouilla-t-il. Comment veux-tu que j'aille le voir alors que... que tu es... comme ça avec moi ? Ce serait tellement injuste... Tu mérites... tellement mieux.
— Parce que si tu ne le fais pas, tu loupes une occasion d'être heureux. Et ça, je ne te le pardonnerai pas de sitôt.
La chaleur de sa peau à travers ses vêtements me donnait envie de l'envelopper de mes bras, de glisser mes doigts dans ses cheveux, dans sa nuque, de l'embrasser, encore et encore. Pourtant, je parvins à sourire en l'écartant de moi. Cela faisait des jours que je cherchais comment parvenir à m'arracher à lui, sans y parvenir. Mais s'il pouvait être heureux, ça en valait la peine, non ? J'avais enfin une motivation suffisante.
— Va le voir. Maintenant.
Le ton était sec, autoritaire. Il resta planté là comme un animal trop effrayé pour obéir.
— Allez, casse-toi avant que je change d'avis et que je te saute dessus ! insistai-je avec un peu d'autodérision.
Il hocha la tête, la gorge nouée, et recula à contrecœur, ses yeux criant des excuses, avant de se décider à faire demi-tour et à courir vers les escaliers.
— Allez, bon vent abruti ! Tâche d'être heureux ! m'exclamai-je en sentant mon visage se tordre.
Je refermai la porte, posai mon front contre le bois, attendant de ne plus entendre le bruit de ses pas avant de m'effondrer et de me recroqueviller par terre, pleurant toutes les larmes de mon corps.
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