Un être cher

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A mon réveil, le soleil n'est pas encore levé et seul les rais de lumière lunaires pénètrent par la fenêtre de ma chambre. La faible luminosité ne m'empêche cependant pas de constater l'absence de Béatrice. Est elle partie durant la nuit ? À t-elle réellement été là à un moment ? Mes pensées s'embrouillent et je commence à remettre en question mes propres souvenirs. Je n'ai alors pas le temps de divaguer que déjà l'une de mes questions trouve une réponse. Béatrice est là, dans le pas de la porte, elle à dû aller au petit coin me dis-je,mais je déchante vite en la voyant tout tremblante tituber vers son couchage. Peut être est-ce le fait que j'ai toujours voulu avoir une sœur mais je sens comme un élan d'empathie et lui dit de venir s'asseoir près de moi. Sans discuter elle vient s'installer au bord de mon lit et pose sa tête sur ma poitrine. On dirait un enfant qui à fait un mauvais cauchemar, elle frissonne de partout et...elle pleure. Je transfère ma couverture sur nous deux et lui passe la main dans ses cheveux et elle cesse instantanément de trembler.Je passe le reste de la nuit à lui caresser les cheveux, même lorsqu'elle trouve le sommeil je continue machinalement, perdue dans mes questionnements incessants. Que s'est il passée pour être dans cet état ? Y a t-il un rapport avec sa réaction de cet après-midi lorsque je lui ai posé la question de ses soins au Sanctuaire Central ( c'est comme ça que l'a appelé Béatrice) ?Je finis par m'endormir, sa tête posée sur moi, comme moi avec ma mère lors d'un orage quand j'étais petite.

« -Elie, Elie... réveille toi, maître Ammon voudrais te voir.

-mmh... j'arrive tu peux m'aider s'il te plaît ? » à mon deuxième réveil Béatrice est là, assise au pied du lit, les rayons du soleil filtrant dans ses cheveux qui prenne une teinte plus rousse et plus légère. Nous échangeons peu pendant qu'elle m'aide à m'habiller,loin de toute forme d'hostilité, au contraire nous n'avons pas besoin de parler de cette nuit, les gestes suffisaient pour comprendre ce qui n'allait pas. Je pense savoir de quoi il était question pour avoir eu une amie dans la même situation il y à quelques années, elle m'en parlera lorsqu'il sera le moment pour elle d'en parler ouvertement.

Elle m'aide à me placer sur mon siège roulant et me pousse jusqu'au salon en me chuchotant qu'il ne me faut pas utiliser mon potentiel d'Ombre inutilement car j'en aurai besoin aujourd'hui. Le vieil homme que j'ai vu faire un saut de cinquante mètres de haut sans dommages se tient là, tranquillement assit sur son fauteuil sirotant une tasse de je ne sais quel liquide,bien plus noir que du café ordinaire.



«

-Ahhh voilà nos deux jeunes amies. Elie, la nuit n'a pas été trop compliquée ?

-non... » je répond machinalement, en réalité je n'ai plus trop pensé à mes jambes cette nuit, j'étais bien plus inquiète pour Béatrice que pour moi. «

-... non ça va merci

-Tant mieux car tu vas avoir besoin de toutes tes capacités mentales et physiques aujourd'hui. Ça sera probablement très dur mais si on arrive à ne serait-ce qu'un morceau de résultat, nous aurons fait un grand pas en avant. Avale quelque chose et rejoins moi dehors lorsque tu es prête. »

Je me contente d'opiner et demande à Béatrice si elle pourrait me faire une tartine de pain avec une quelconque garniture. Quelques minutes plus tard elle revient avec un plateau contenant 4 tartines à la crème de marron et deux tasses de lait chaud. Nous prenons silencieusement notre petit déjeuner, je lance quelques regards inquiets vers Béatrice mais elle me répond par les mêmes regards déconcertés. Aucune de nous ne sais ce qui m'attend à l'extérieur du chalet. Notre petit déjeuner englouti,nous nous dirigeons vers la porte, Béatrice me prend les mains, les yeux baignés de larmes :

« merci beaucoup pour cette nuit, je ne peux pas venir avec toi aujourd'hui mais je t'attendrai ici ce soir » elle dépose un baisé sur mon front et part encourant vers la chambre et j'entends la serrure cliqueter. Ce moment me redonne du baume au cœur et me motive pour l'entraînement.

À bord de mon siège fabuleux je passe le seuil de la porte et m'avance un peu dans la clairière. Je respire l'air frais et humide du matin, je profite un moment avant de revenir à la réalité. Ammon n'était-il pas censé m'attendre dehors ? BANG !!! le souffle de l'explosion me projette contre un arbre et le choc me coupe la respiration. Que s'est il passé ? Le dos plaqué contre l'arbre je me retrouve face au chalet, en feu, partiellement détruit. « Béatrice !!! Béatrice !!! » je hurle à plein poumons, non, c'est impossible, je ne peux pas la perdre comme ça. « Elie !! au secours !!!Argh!!!El... Pan !! »Non !! je me dégage des bandes velcro qui me maintenaient encore sur mon fauteuil et je rampe jusqu'à la maison en flamme. Je m'accroche à la moindre petite racine pour avancer, la progression est lente et insupportable. Impossible, elle ne peut pas être morte,elle n'avait rien fait à personne.

Soudain,en tournant la tête sur ma gauche, j'aperçois deux silhouettes drapées de capes noires tâchées de blanc portant ce qui semble être une personne à qui il manquerait un bras. En apercevant la chevelure cuivrée de Béatrice sur les épaules de ces deux enfoirés masqués, mon sang ne fait qu'un tour, d'ailleurs je le sens, il coule dans mes veines comme un liquide glacial. Il semblerait même que je le sente jusque dans mes jambes. Tout à coup dans un élan de haine mon corps n'en fait qu'à sa tête et me voilà maintenant debout, en train de poursuivre mes proies comme un chien de chasse. Ma vitesse est invraisemblable, je fuse à travers les arbres et rattrape en un clin d'œil les deux hommes et dans un accès de colère inexprimable je plante ma lame sortie de nulle part dans le dos de celui qui porte le corps de mon amie. Je ne saurais expliquer comment mais je me retrouve devant les deux masqués, l'un s'effondre et l'autre se précipite sur moi mais avant qu'il n'ai pu sortir son arme, je suis déjà placée à sa gauche, je me retourne et le tranche de l'épaule au bassin sans ressentir aucune résistance dans ma lame. J'entends son corps s'effondrer à côté de moi et je reste là un moment avant de me retourner vers les trois corps. Celui de Béatrice gît à côté du premier homme masqué que j'ai abattu,j'accoure vers elle mais je sais qu'il est déjà trop tard. Son visage est brûlé par l'explosion et ses yeux bleus  expriment la surprise. Mes larmes commencent à couler et gouttent sur le visage balafré de la seule personne qui semblait me comprendre, emportant la suie de son visage en coulant,les larmes se fraient un chemin jusqu'à son menton. Je suis en train de tenir le corps d'une femme innocente, une femme si douce qui se laissait comprendre. Je ne peux pas y croire... je reste là avec sa tête sur mes genoux durant de longues minutes, des heures peut-être mais je m'en fiche. Un sentiment d'injustice se mêle à la tristesse et la colère, comment peut-on oser tuer de un être humain de cette manière ? Sans prendre de risque,simplement en planifiant une explosion depuis une cachette sécurisée. Tous mes sentiments s'emmêlent et la lame que je tiens dans ma main est de plus en plus sombre et brillante à la fois, comme si une certaine puissance s'en dégageait. Les petites volutes de fumée noire se répandent un peu partout autour de moi, comme l'air froid. Crac ! Je me retourne instantanément vers l'origine du bruit. Entre deux arbres se tient une créature tout droit sortie des enfers. Sa forme semble indéfinissable, des volutes noires descendent le long de ses pattes squelettiques. On dirait un énorme molosse, pas le temps de réfléchir il me fonce droit dessus. Je ressens une force incommensurable se déverser dans mes deux jambes et en moins d'une demi-seconde je me retrouve une dizaine de mètres au dessus du monstre et sans hésiter je vise le bas de ce qui semble être sa nuque sans savoir pourquoi mais une fois la lame plantée dans le cou de la créature, elle se met a tituber et s'écroule sur le sol en émettant un grognement rauque à faire frissonner le plus courageux des hommes. Une sorte de cri lointain et désespéré. Le temps de réaliser que je suis pleine de sang, l'abomination a laissé place à un corps de femme, un corps décharné qui se décompose à vue d'œil. Ce spectacle manque de me faire vomir mais à l'instant où je m'apprête à courir vers le corps de Béatrice mes jambes ne répondent plus et je chute violemment sur le sol feuillu. Non pas maintenant,je peux à peine bouger mes bras impossible donc de ramper, je sens mes forces me quitter et durant mes derniers instants de conscience je perçois une voix grave : « je crois que tu à bien mérité ta place parmi nous »

Le Troisième SoupirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant