~Respirer La Corde Au Cou~ [TERMINÉE]

2- Somnanbule Aux Heures D'été

J'alterne souvent les points de vu omniscient et externe de Katsuki, c'est voulu et j'espère que ça ne choquera pas à la lecture. ❤️

***

Le réveil fut accompagné d'un grognement, une fois encore le sommeil ne fut pas réparateur. La petite s'était avachi sur son ventre, ses yeux émeraudes attendant visiblement que le grand garçon se lève, et en vu de la joie qui s'exprimait dans la lueur de ces derniers lorsqu'il se retira enfin du lit, cela devait faire un moment déjà qu'elle attendait.

-Katsu !

Dans un cri aigu, elle lui sautilla dessus, comme chaque matin lui arrachant quelques plaintes d'insatisfactions. Pour toute réponse, il la fit tomber gentiment, accompagné de chatouilles devastatrices.

-Arrêtès haha ! Je vais mourir !

Mais c'est si bon de l'entendre rire, oubliant un peu pourquoi il est là, et pourquoi les nombreux soirs sombres se gorgaient de saumure.
Le petit monstre et lui même decampèrent de la chambre pour rejoindre la salle de bain.

Devant le miroir, il remarque que ses joues se creusent de l'ossature de sa mâchoire, à fleur de l'épiderme, et sa main se perd sur la rivière violacée qui serpente malhabilement la peau de ces yeux. La peur de ne plus se reconnaître s'installe, prend ces aises dans son esprit d'ores et déjà tourmenté.

J'ai tord d'être pris d'un doute, je ne me reconnais plus depuis bien longtemps.

-Katsu Katsu on fait quoi aujourd'hui ?!

Katsuki n'a pas la foi de répondre à ces innombrables questions (toujours les mêmes par ailleurs) dès le matin. La jeune Yuri se contente de suivre le fauve un peu partout dans la maison à ses risques et périls. La crainte d'un méchant coup de griffes ne l'arrête pas le moins du monde. Battifolant de droite à gauche elle entame des discussions à sens unique, enthousiaste, en sachant pourtant qu'elle n'aurait pas de réponses.

-Ça sent bon Katsu !

Le denommé préparait des pancakes ce matin là, et c'était là son soucis premier : il veillait toujours à ce que la mioche mange bien, et de tout.

-Tient sale gosse.

Il déposa son assiette, les yeux de l'enfant devinrent pétillants. Elle se précipita dessus, quitte à s'étouffer du délicieux petit déjeuné.

-C'est toujours meilleurs que ceux de Papa !

Katsuki laissa tomber sa cuillère dans un grand fracas. La paralysie a atteint le cœur et l'esprit, et dès lors son corps ne répond plus de rien.
Son bras s'est comme raidi à l'entente de cette phrase innocente et assassine.
La gamine elle même avait perdu son sourire joyeux.

Plusieurs minutes que Katsuki regardait cette cuillère maintenant, étalée dans la poussière de la cuisine, et il songeait qu'il devait faire le ménage tôt ou tard. Qu'il devait faire les courses mais qu'il n'y avait plus d'argents à dépenser pour ce mois ci.

Katsuki souffla, puis ramassa la cuillère dans un geste qui sembla lui demander beaucoup d'efforts.

-Papa me manque...

Yuri avait l'habitude de le voir se perdre de temps en temps comme ça. Et pourtant, dès qu'elle le voyait au bord du gouffre, c'était plus fort qu'elle. Elle devait lui faire subir son interrogation, lui rappeler sans cesse qu'il était le seul à l'imaginer avec eux. Et qu'irreverssiblement, il n'était pas là.

Katsuki s'installa à table, la cuillère de nouveau en main mangeant sans conviction les pancakes trop sucrée. Et sur la chaise, en face, ce "satané nerd" apparaissait comme un spectre, le sourire inépuisable se retroussant en fossettes jonchées de tâches.
Un fantôme, ou bien un souvenir, qui le suit du jour comme la nuit, dans chaque pièces, chaque odeurs et chaque sons.
Et c'était fatiguant de l'ignorer. Fatiguant de pleurer à chaque fois.
Alors il a fini par céder, il a fini par lui parler, par lui crier dessus d'abord, par le supplier ensuite.

Je me suis finalement habitué à ta vision morte devant mes yeux vides, et je saurais dire si c'était là une bonne chose.
Je te parlais, silencieusement, dans ma tête tout en te regardant comme je m'adresse aux photos : aucune réaction de ta part. Et j'avais cette habitude maladive de te fixer, conscient de regarder une coquille sans âme, une chaise vide, une image traître.

Je suis désolé, Deku.

-Je suis désolé, Heather.
Cette fois ci la phrase avait franchi le seuil de sa bouche, et il ne pouvait plus ravaler les mots maudits.

-Maman ? Dit elle, a l'écoute et perdue. Une fois encore Katsuki connaissait le schema qui se dessinait au bord des yeux de la gamine. Elle allait finir par hurler et éclater en sanglot. Katsuki était trop maladroit, trop fragile, et Yuri en payait les conséquences.

Alors il se leva de table, soudainement prit d'une détermination sombre. Katsuki devait retourner travailler, se changer les idées, revoir du monde. Respirer avec grand mal autre chose que cette l'air de maison rempli de poussières, de souvenirs et de larmes.
Voir autre chose que le visage torturée de Yuri chaque fois qu'il avait l'inadvertance de dire le noms de ses parents.

Il devait Sortir de ce cauchemar éveillé.

***