Mortal Bonds

8. After Dark (1/2)

Avoir accepté ce rendez-vous est une erreur, Yalina le sait. L'aura inquiétante de Mr. Zintchenko la paralysait comme une biche face aux phares d'une voiture, incapable de s'enfuir ou de ne pas regarder la mort dans les yeux. Maintenant, forcée de travailler avec lui, elle n'a plus le choix que de devoir le côtoyer. Son emploi compte pour la jeune femme, elle qui a dû se battre et redoubler d'efforts pour arriver là où elle en est. S'il le veut, le russe peut faire s'effondrer sa ridicule carrière de traductrice en un claquement de doigts. Et elle a comme l'impression qu'il en serait capable, sans remords. De plus, refuser de collaborer avec un client aussi riche, qui ramènera une bonne somme à l'entreprise de traduction, ne l'aiderait pas auprès de Ballard. Yalina serait surement pénalisée, il ne l'assignerait plus aux cas importants de son service, et elle retomberait en bas de sa liste des « meilleurs employés ». Ces facteurs ont fortement contribué à la décision, à contre cœur, de la jeune femme.

Voilà comment elle se retrouve garée sur un parking, près du bar où elle doit se rendre. Apprêtée, maquillée, coiffée, comme si elle se rendait à un date. En faisant des recherches elle s'est rendu compte que le lieu choisi par Mr. Zintchenko est plutôt bien fréquenté, évidemment. Yalina a donc dû opter pour un style plus élégant que ce qu'elle porterait habituellement. Elle est aussi consciente que si elle ne s'apprête pas on pourrait la prendre pour une enfant et lui demander sa carte d'identité au bar, ce qui serait extrêmement pénible pour elle. La jeune femme porte une jupe noire moulante, un haut cache-cœur vert sauge et une paire de cuissardes noires à talons. Une tenue qui ne l'aide pas à se sentir en confiance, les vêtements moulants et décolletés mettent en avant son absence de formes. Les hauts talons et le maquillage aident heureusement à créer l'illusion de la maturité. Sentir l'air frais sur ses cuisses, lorsqu'elle sort de la voiture, la met un peu plus mal à l'aise. Plus habituée aux jeans et aux pantalons qu'aux robes ou jupes. Elle attrape son sac à main, ferme sa voiture et se met en route vers le bar qui n'est qu'à quelques dizaines de mètres.

Une fois entrée dans l'établissement, elle découvre une grande salle où des groupes de personnes dansent à leurs tables, recouvertes de bouteilles. La musique est assez forte et la lumière plutôt tamisée, Yalina commence à chercher celui qui l'a invité, mais elle est arrêtée par une serveuse, légèrement vêtue, en chemin.

-          Bonsoir ! Vous cherchez une table en particulier ? Crie la serveuse pour se faire entendre à travers la musique.

Yalina ne sait pas vraiment quoi lui répondre, puis elle repense à la façon dont le russe avait été accueilli dans le restaurant, lors du rendez-vous professionnel. L'homme semble avoir ses endroits favoris et celui-ci doit forcément en faire partie.

-          Je cherche Mr. Zintchenko. Répond Yalina se rapprochant de l'employée pour ne pas hurler.

La serveuse lui montre alors du doigt une porte un peu plus loin dans la salle, lui expliquant qu'il se trouve surement par là-bas, « comme à son habitude ». Yalina ne serait pas étonnée s'il avait une salle privée, les personnes riches aiment souvent gaspiller leur argent dans ce genre de luxes. Contrairement à ce qu'elle pensait, quand la jeune femme pousse la porte indiquée, elle se trouve sur une grande terrasse où le volume de la musique est plus bas et les tables moins nombreuses. Elle balade son regard sur les différentes personnes présentes, pour trouver Mr. Zintchenko. La plupart des gens fument et discutent, certains dansent, mais tous ont l'air plus ou moins sous l'emprise de l'alcool. Un mouvement dans sa vision périphérique attire son attention, elle voit le russe à une table éloignée, qui lui fait signe de la main en levant le bras. Une vague glacée de panique la submerge,  mais ses jambes continuent de fonctionner par automatisme.

-          Bonsoir, Mr. Zintchenko. Dit Yalina, faussement assurée après s'être approchée.

-          Bonsoir, Miss Rey Morenos. Vous avez trouvé facilement ?