4. Elias

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— Qu'est-ce que tu veux que je te dise ?

— Lya, ne joue pas à l'idiote, bon sang ! intimé-je, sentant qu'elle risque de jouer avec mes nerfs.

Je me lève pour me servir un verre dont j'aurais bien besoin, puis me rassois face à elle, son dossier posé sur la petite table entre nous. En silence, j'avale une gorgée alcoolisée en attendant qu'elle daigne de faire un effort aussi minuscule soit-il. Mais au vu du regard sombre qu'elle me jette, je crains l'avoir – encore – contrariée et, elle ne semble pas prête à s'ouvrir à moi.

— T'es con ou tu crois réellement qu'après m'avoir traité d'idiote je vais te parler ?

— Je pense que nous sommes quittes niveau insulte, alors maintenant, tu décides et, vite !

Plus aucun de nous deux fuit, comme si nous étions entrain de nous affronter dans un véritable combat. Je suis redoutable à ce jeu-là, mais Lya ne semble pas encore en avoir conscience. Son charme ne me mettra pas à genoux qu'elle le désire ou non. Je replace ma cravate dans l'espoir qu'elle finisse par craquer. S'il le faut, je pourrais patienter longtemps, j'ai l'habitude des clients qui restent muet. Elle s'agite, puis, enfin, j'obtiens ce que je souhaitais : Lya explose.

— Bordel, Elias ! Je ne sais même pas ce que je peux te dire. Oui, j'ai volé dans ce magasin. Oui, ce n'était pas la première fois, ni même la seconde. Tu veux savoir pourquoi ?

— Je l'aimerais, en effet, souris-je victorieux.

— J'ai une gosse de huit ans. J'ai un job de merde avec un salaire quasiment inexistant peu importe les efforts que je fournis pour obtenir un vrai travail. Alors, désolé de te le dire, mais tu vis dans un monde de bourge sur ton petit nuage rose ! Tu as mis les pieds dans la vraie vie ?

Elle monte dans les tons avant d'effectuer les cent pas dans mon bureau. Je la laisse évacuer la montagne de sentiments négatifs qui la ronge de l'intérieur. J'espère seulement que mes collègues ne vont pas débarquer alerté par les cris de Lya. Ses bras s'agitent dans tous les sens, alors que son visage se tend un peu plus à chaque mot prononcé.

— Je n'y peux rien, Lya, donc baisse d'un ton qu'on discute calmement si tu le veux bien !

Soudain, elle s'immobilise au milieu de la pièce avant de s'approcher de moi. Ses baskets claquent lourdement sur le sol jusqu'à ce qu'elle atteigne ma hauteur. Elle se penche dans ma direction, m'offrant une vue plongeante sur sa poitrine dont je pourrais me délecter durant plusieurs minutes. En revanche, sa mâchoire serrée au point d'en être douloureuse, j'en suis certain, ne m'annonce pas rien qui vaille. Tandis que je m'apprête à ouvrir la bouche, la claque qu'elle m'administre retentit dans tout mon bureau. Sous la surprise, ma bouche s'entrouvre. Personne ne m'avait giflé, au point que j'hésite à lui en retourner une à mon tour. Un avocat qui lève la main sur une cliente serait mal vu, alors je m'abstiens. Mais je ne peux pas ne pas réagir à cet affront, hors de question qu'elle prenne la confiance. J'attrape son poignet et la tire un peu plus près de mon visage.

— Ne recommence jamais ce que tu viens d'oser faire parce que tu risques de le regretter amèrement ! persiflé-je avant de la relâcher. Assieds-toi, immédiatement, Lya.

Les tensions suspendues dans l'air, elle reprend sa place dans le canapé d'en face, alors que je me dépêche d'ouvrir le dossier, cachant mon trouble. Je déglutis, puis reprends la discussion.

— Il va falloir que tu me parles de tes difficultés à trouver un job, financières, et toutes celles que tu rencontres dans ton quotidien. On va pouvoir jouer la carte de l'émotion. En plus, tu as une petite fille ; c'est tout bénéfique. Comment s'appelle-t-elle ?

Seconde chanceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant