Prélude

73 9 24
                                    

Et voilà, encore un connard. Je viens de me faire vulgairement jeter comme une malpropre. Malgré toutes mes précautions pour éviter une nouvelle rupture désastreuse, je retombe une fois encore dans les tréfonds de la solitude et les méandres de l'échec. Qu'ai-je bien pu faire pour mériter ça ? Suis-je simplement un aimant à gros con ? Pourtant, rien ne me prédestinait à une telle fin. J'ai veillé à ce que plus jamais je ne sois traitée comme un jouet qui serait jeté dès qu'un nouveau plus attirant se présenterait. J'ai pris mon temps, je n'ai pas bousculé les choses, je ne me suis pas enflammée aux moindres battements de cils. J'ai pris toutes les précautions pour éviter les déconvenues.

Mais non, malgré ce stratagème, je viens d'être salement abandonnée. Inlassablement, j'essuie des échecs encore et encore. Je suis comme marquée au fer rouge par mes erreurs, mes mauvais choix et mes mauvaises fréquentations qui m'ont fait sombrer. A croire que jamais, je ne serais relâchée par cet étau qui m'étouffe et qui m'empêche de faire peau neuve. Ces années troubles me suivent comme une ombre crasseuse. Pourtant, j'essaye d'esquiver, je changer de direction, d'aller là où jamais je ne serais aller pour... pour respirer. Mais l'air me manque à chaque fois. Le karma est vraiment une chienne.

Je reste assise, à même le sol, adossée contre les parois de la salle de bain, incapable de bouger ou même d'émettre le moindre son. Je suis comme paralysée dans ma propre souffrance. Les larmes ne coulent même pas, les hurlements ne sont pas non plus bloqués dans ma gorge, j'ai juste l'impression d'être à mille lieux de tout ça. La rupture n'est pas en elle-même ma plus grosse déception, bien que mon attachement pour lui demeurait réel, je me suis juste une fois de plus trompée. Un énième mur, une énième claque, un monde qui s'écroule et le vide qui grignote encore un peu plus ma douleur.

Ce qui me fait le plus mal, c'est cette sensation d'échec cuisant. J'ai l'impression d'avoir fait cent pas en arrière, je suis comme ramenée à une période où la solitude était ma fidèle amie. Je crois que c'est ça qui me rend lamentable. Perdre cet homme n'est en soit pas triste, enfin pas le plus triste. Ce qui est le plus affligent, c'est le naufrage de ma relation parce qu'elle marque une seconde fois mon incapacité à garder les gens auprès de moi. Lamentable n'est-ce pas ? ou simplement le reflet de mes failles ?

J'ai eu tout faux sur le compte de cet homme, que je pensais être le bon. Sans un regard vers moi, il est parti. Comment oublier trois ans de relation avec si peu d'état d'âme ? Je ne parle pas d'une avalanche de désespoir digne de mauvais acteur de télénovela bas de gamme mais au moins un peu d'égard. Son détachement m'a fait frémir d'angoisse. Comment ai-je pu ne pas voir ce trait de personnalité chez lui ? Pour être capable de quitter quelqu'un sans même un regard, il faut être un beau salaud ou pire, ne jamais avoir aimé la personne. Je penche quand même vers un beau salaud sans cœur qui aime plus sa bite qu'un quelconque être humain et même elle était décevante.

Mais je dois bien l'avouer, il ne porte pas toute la faute de notre rupture et le désastre de cette situation. Même si j'ai envie de crier sur tous les toits que c'est le grand méchant de l'histoire, je dois reconnaitre que j'ai ma part de responsabilité. Ce fiasco est à double tranchant. Sa froideur a eu raison de mon éloignement et mon manque d'investissement l'a égaré. J'ai perdu trois ans de ma vie avec un homme distant et je n'arrive toujours pas à extérioriser. Je suis là, à même le sol, le regard vide, le cœur gelé et la tête en vrac. Tout ça pour une histoire qui n'avait même pas de futur. La cassure était inévitable, elle est simplement arrivée un peu trop brutalement comme tous les évènements dans ma vie.,

Pourtant j'ai beau avoir la tête en pagaille, j'arrive à refaire le fil de mes relations et rien de glorieux n'en ressort, à croire que les belles histoires me sont interdîtes et que je n'ai le droit qu'aux pots-pourris.

La première n'est guère gratifiante, mon égo a pris un sacré coup. Lors d'une soirée en boite en deuxième année d'étude, l'alcool m'a fait perdre la tête et toute trace de timidité. Sans vraiment comprendre comment j'ai réussi à attirer cet homme dans mes filets, nous avons vécu une petite histoire, pas très romantique ni passionnelle mais d'apparence stable. Malheureusement, six mois après, une malencontreuse coïncidence, appelée Jessica, a clôturé la relation. Il faut dire que cette fâcheuse circonstance avait un coffre vocal très puissant, enfin de ce j'ai entendu du couloir.

La deuxième n'est pas fameuse non plus. Pendant cinq mois, je pensais être enfin dans les bras d'un homme bon et surtout qui me correspondait vraiment. Mais alors que tout roulait, que notre vie prenait un tournant de stabilité, il m'a lourdement reproché tout un tas de choses et est parti comme un voleur, emportant avec lui l'ensemble de mon estime et de ma fierté. J'ai tout fait pour le récupérer, j'ai même accepté des miettes jusqu'à ce qu'on me les reprenne.

En résumé, ma vie sentimentale est le paroxysme de la catastrophe et malheureusement ma carrière prend le même chemin. Je viens, en plus, de me faire virer par mon misogyne de boss qui n'a rien trouvé de mieux que de me faire la morale sur mon comportement et ma manière de gérer mes responsabilités. En clair, je fais honte à sa boite, qui soit en dit passant est connu pour le grand côté beauf de son directeur. À se demander ce qui est le pire : une simple employée qui fait « honte » ou un homme qui a les mains baladeuses ?

En l'espace de deux jours, j'ai perdu mon mec et mon job, le combo parfait pour faire une dépression. Mais comme dit si bien le proverbe « jamais deux sans trois », mon appartement va aussi devoir passer à la trappe. Mon compte en banque, bien qu'assez garni, ne va pas tenir assez longtemps pour payer le loyer. Ma seule porte de sortie pour éviter de finir seule, ruinée et à la rue est de retourner vivre chez mon père. Quelle belle perspective d'avenir... Autant m'apporter une corde tout de suite. 

À L'AUBE DE NOS SECRETS II TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant