Chapitre 2

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Deux jours se sont écoulés depuis l'annonce du voyage et je n'en reviens toujours pas. Depuis des années, je rêve de faire une croisière, qui plus est avec ma meilleure amie. Connaissant Alizé, le voyage ne sera pas de tout repos. C'est une fille du genre tête brûlée, qui a plus peur de s'ennuyer que de s'attirer des problèmes. Enfin, c'est le type de nana que tout le monde rêve d'avoir comme amie, pour profiter au maximum de la vie, pour ne pas la cloisonner d'interdits. De toute façon, Alizé les balaye d'un revers de main. Il faut dire qu'elle ne se fond jamais dans la masse, autant physiquement que dans sa manière de se comporter.

Je suis tellement surexcitée par ces vacances que mon côté maniaque du contrôle prend peu à peu le dessus. Depuis ma plus tendre enfance, dès que je pars vers une destination ou qu'il y a un changement dans ma vie, j'angoisse pour un rien. Même ma valise, grande ouverte, me rappelle inlassablement de la remplir pour mon voyage qui se rapproche à grands pas. Or je me sens bloquée, prise dans un étau qui se resserre.

— Adèle ? Adèle ? crie mon père dans le couloir.

— Je suis dans la chambre.

Des pas lourds se dirigent vers moi. Mon père a toujours eu la même démarche. C'est encore plus frappant avec le parquet. Il toque un petit coup et passe la tête dans l'entrebâillement de la porte. Il me lance un sourire, mais fronce les sourcils à la vue de ma valise toujours vide trônant en plein milieu sur le tapis.

— Pourquoi n'as-tu pas fait ta valise ? Je te rappelle que tu pars dans deux jours et vu ta capacité à faire des choix, il ne te reste plus beaucoup de temps, s'amuse-t-il.

— Oui je sais, lui répondis-je sans grand enthousiasme.

— Ça ne te fait plus plaisir ? On peut changer si tu veux. Les billets ne sont pas remboursables mais ce n'est pas grave. Dis-moi mignonnette, qu'est-ce qui te ferait plaisir ? m'interroge-t-il soucieux.

— Non, ça me fait plaisir, c'est juste que c'est un gros cadeau que tu me fais. J'ai toujours voulu en faire une, le rassuré-je.

— Alors pourquoi tu es toute morose ? Ce sont les excursions qui ne te plaisent pas ?

— Non, bien sûr que non. C'est génial. J'ai juste l'impression que je ne le mérite pas. Certes, je suis à nouveau chez toi, mais c'est comme si tu me gâtais pour avoir tout perdu. Je n'ai rien fait au final pour le mériter, déclaré-je gênée.

Il vient s'installer à côté de moi et prend ma main dans la sienne qui la recouvre totalement.

— Écoute, je ne t'offre pas cette croisière pour ça. Tu as traversé tellement d'épreuves depuis toutes ces années, tu mérites de souffler un peu, loin de la ville, du quotidien qui peut être étouffant. Je te connais par cœur. Je sais que quand tu te remettras en selle, tu te plieras en quatre pour être à la hauteur. Tu t'acharneras sur ton travail quitte à faire des heures supplémentaires, à sacrifier tes vacances, même à faire le travail des autres. Je devance juste la situation.

Je lui souris le cœur lourd. Je prends conscience une fois de plus que mon père est d'une bonté inégalable. J'ai tellement de chance d'être sa fille. Mais parfois, je me demande si je suis réellement à la hauteur de toute sa générosité.

— Allez maintenant, tu te bouges, tu prends tes vêtements, tes sacs, tes chaussures, tout ton bordel et tu le jettes dans ta valise, ordonne-t-il en me laissant de nouveau d'attaque.

Il m'a fallu des heures pour faire entrer toutes mes affaires. Quelle idée d'être une fille ? C'est vrai quoi, est ce que les mecs ont besoin d'une dizaine de paires de chaussures, de milliers de bijoux, du maquillage à ne plus savoir qu'en faire, des tenues à en perdre la tête ?

À L'AUBE DE NOS SECRETS II TOME 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant