VI

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Mercredi 9 décembre (suite).

En tête de course, je laisse échapper un grognement alors que William, sous les encouragements de ses camarades, me rattrape à vive allure. Dans une manœuvre pour éviter une carapace verte, je dérape et manque la courbe finale. Le bolide de William me dépasse et l'écran se remplit de confettis lorsqu'il franchit la ligne d'arrivée. Enterrant la musique du jeu vidéo, les adolescents autour de moi applaudissent et crient pour féliciter William. Ce dernier me fixe, les bras croisés, fier de lui.

— Avoue, je suis meilleur que toi, me lance William.

— Meilleur que moi, Princess Peach ? dis-je, faussement offusquée.

Désireuse de prendre ma revanche, je sélectionne l'option « nouvelle partie ». Avant d'avoir eu le temps d'appuyer sur le bouton, je sens mon téléphone vibrer dans ma poche. Je le regarde rapidement pour m'assurer qu'il s'agit bien d'Irène, puis me lève, brandissant la manette devant moi.

— Qui veut affronter le maître ? demandé-je avec un clin d'œil vers William.

Plusieurs « moi » se font entendre, je me croirais devant la bande de mouettes dans Trouver Némo. Je laisse finalement tomber l'appareil dans les mains de mon féroce adversaire. Il choisira lui-même son prochain combattant. Je salue mes chers amis, leur promets de revenir bientôt, et sors du salon pour rejoindre Irène, qui m'attend avec Théo.

Une légère appréhension me serre la gorge. Je frotte mes paumes contre mon pantalon, mais le tissu rêche de mon tailleur ne permet pas d'absorber leur moiteur. La porte du bureau d'Irène est grande ouverte. Restant sur le pas de celle-ci, je toque pour signifier mon arrivée. Irène tourne la tête vers moi alors que celui qui doit être Théo se lève. J'entre, sourire aux lèvres, et serre la main qu'il me tend. À peine plus grand que moi, l'homme me paraît dans la trentaine, voire la fin vingtaine, selon ses traits. Ses cheveux châtains, coupés à la façon militaire, sont soigneusement peignés d'un côté. Ses yeux pâles, cachés derrière une paire de lunettes rondes, et son sourire digne d'une pub de dentifrice m'accueillent chaleureusement. Il porte un costume gris clair et une chemise blanche, immaculée, sans un pli. Sa cravate, parsemée de minuscules poissons argentés sur fond marine, attire mon attention l'espace d'une seconde. Je reviens rapidement à son visage, habillé d'une légère barbe bien taillée.

— Enchanté de te rencontrer, dit-il.

— Enchantée aussi.

Irène fait les présentations, plus par convention que par nécessité, puis je prends place à côté du nouveau venu. L'intervenante en chef nous expose alors son plan de match.

— Bon alors, commence-t-elle. Vous allez former une équipe. Je vous connais très bien tous les deux et je sais de quoi vous êtes capables, chacun de votre côté. Voilà pourquoi je veux que vous collaboriez pour aider Eliott.

Irène me jette un de ces regards qui tuent.

— Lana, je me doute de ce que tu penses à propos du travail d'équipe, mais fais-moi confiance sur ce coup. Théo, c'est pas Alex, d'accord ?

J'acquiesce, ne laissant pas paraître mon malaise.

— Théo, poursuit-elle, je suis consciente qu'on sort de ton domaine, et c'est pourquoi tu interviendras seulement en compagnie de Lana. Tu devras compter sur elle. Et toi aussi, Lana, tu devras compter sur Théo. Vous avez chacun vos forces, mais il faudra les mettre en commun pour venir à bout de cette situation. Loin de moi l'envie de renvoyer Eliott dehors.

J'appuie les paroles d'Irène d'un constant hochement de tête. Je lance de rapides coups d'œil en direction de Théo, qui semble tout aussi déterminé. Ça me rassure.

Pur AmantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant