Prologue

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     << Ta hantise est de mourir sans avoir vécu, sans avoir pu apaiser ta soif,sans avoir rencontré ce que tu ne saurais dire mais qui te fait si
douloureusement défaut....>> Lambeaux (1995) de Charles Juliet

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Sokhna Maimouna Fall

L'échec est un sentiment, bien avant d'être une réalité. C'est le fruit de la combinaison entre la vulnérabilité et le manque de confiance en soi, qu'aggrave ensuite, souvent délibérément, la peur...

Assise sur la moto de ma petite sœur que j'ai emprunté à son insu,je roulais à grande allure,je roulais comme si de cette course ma vie en dépendait.

Je roulais encore et encore,rien n'avait d'importance que ma course en ce moment,et j'en oubliais tout,rien ne comptait en ce moment que cet état fiévreux dans lequel je me trouvais,cet état qui allait me délivrer d'un moment à l'autre.

Ma course folle sur la moto était pour moi une sorte de délivrance,l'adrénaline était au rendez-vous et j'avais l'impression de frôler la mort et j'aimais ce sentiment,ça avait l'odeur de la délivrance,plus de souffrance,plus de douleur ,juste le goût de la délivrance.

Si ma petite sœur était là,elle aurait piqué une crise de me voir sur son trésor comme elle avait l'habitude de l'appeler mais elle n'est pas là ,les jours passent,se transforment en semaines,puis en mois et elle n'est toujours pas là.
Loin de moi,enfermée entre quatre murs tél un animal,Sophie vit ses pires moments,elle est au plus profond du gouffre plus que jamais tourmentée par ses démons comme chaque année,comme chaque période d'hivernage...sa période où elle livre un combat sans merci à l'intérieur d'elle même ou deux monde semblent se bousculer,le bien et le mal...
Elle souffre et sa souffrance me perce le cœur .
Comment je le sais ?

Je le sens,car même si nous ne partageons que la même mère,séparées par deux géniteurs différents,ce qui nous lie va plus loin que notre mère,en commençant par notre relation fusionnelle et en terminant par la tâche de naissance que nous avons toutes les deux au bas du dos,au même endroit.
Et si la mienne est une simple petite tache sombre ,la sienne par contre a une forme de serpent qui au fil des années devenait de plus en plus grandissante.

Et si ma mère était là,elle aurait crié au scandale de voir son aînée si posée,si réfléchie et si prudente narguer la mort comme ça mais elle n'est pas là, les jours passent,se transforment en semaines,puis en mois et elle n'est toujours pas là.
Loin de moi,couchée sur un lit d'hôpital,elle était à bout de souffle et au bout de sa vie où elle livrait une bataille sans merci entre la vie et la mort...

Et à la pensée de ces deux être que je chérissais tant,la réalité me frappa en pleins fouets,et je me rappelai de tout ,je me rappelai de la lourde tâche qui était mienne,celle d'être forte pour elles et de porter en moi le poids de la douleur familiale et je freinais brusquement provocant un bruit fort et assourdissant.

Les battements féroces de mon cœur me criaient qui j'étais et pourquoi et pour qui je me battais...
Je me rappelais que je me battais pour ma famille
Je me rappelais que je me battais pour tout ce que j'ai perdu et que je me dois de retrouver
Je me rappelais que je me battais à la quête de ma raison d'existence sur terre .

L'échec de la charge familiale hante mon corps si frêle et si faible .

Comment suis-je sensée être forte pour les autres alors que moi même je ne suis pas forte?
Puis je endosser les maux d'autrui en plus des miens ?
Prêcher la vie alors que moi même je me sens condamnée ?

HANTISEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant