Monnaie d'échange (Tome 2)

13

J'attends seulement avec impatience le retour de celui que j'aime pour lui annoncer la bonne nouvelle.

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J'ouvre la porte du réfrigérateur à la recherche de quelque chose à grignoter. Mes yeux se posent amoureusement sur le gros pot de fromage blanc. Je l'attrape, avec le pot de marmelade. Je ferme le réfrigérateur et prends dans le tiroir à couvert un cuillère à soupe. Je m'assois à l'îlot, et ouvre le pot de confiture. J'en dépose une couche sur le fromage blanc, et enfourne le mélange dans ma bouche. J'avais beaucoup trop faim. C'est délicieux. Gourmande et affamée, je continue mon repas nocturne. Je ne devrais pas manger autant... Mais j'ai si faim! Du broownie ne serait pas de refus. La lumière de la cuisine s'allume soudainement, ce qui me surprend. Je tourne la tête vers la présence et soupire en voyant Mitch, les bras croisés sur le torse, me fusiller du regard.

"Quoi?
-Finis ce que tu as dans la bouche avant de me parler. C'est malpoli.

J'avale ma cuillère de fromage, et souris.

-Qu'est-ce que tu as à me regarder ainsi?
-Il est trois heures du matin, pourquoi tu manges?
-Parce que j'ai faim.
-Comment peux-tu avoir autant faim? Tu as mangé deux assiette à table tout à l'heure.

Je souris de toutes mes dents et caresse automatiquement mon ventre.

-Je mange pour deux.
-Ils sont dix plutôt!
-Une ou dix, qu'est-ce que ça change?
-Beaucoup de chose.
-Dis-moi, Mitch. Tu sais quand Scott rentrera?
-Malheureusement, non. Mais je suis sûr qu'il sera là d'ici une semaine.
-Il n'était même pas là quand j'ai su que j'étais enceinte. J'aurais dû attendre son retour, et...
-Arrête. C'est peut-être mieux que tu l'ais appris sans lui. Ça lui fera une bonne surprise.
-Pour une surprise, s'en est une!
-Sa mère l'a bien pris, tu as vu comme elle était heureuse?
-Oui. J'espère que Scott réagira pareille. Bon, changeons de sujet. Ma gynécologue... Madame Pavarotti, elle t'a fait de l'effet?
-C'est une belle femme, je dois l'avouer.
-Si tu veux, j'ai son numéro. Elle me l'a laissé si jamais j'avais des questions ou un problème. Invite la à aller boire un verre, ou à dîner.
-Tu penses que je t'ai attendu? À qui penses-tu que je parle sur mon téléphone et que tu m'ennuie à connaître?
-C'est vrai?
-Bien sûr.
-Mitch! Tu me cache des choses! Moi, je te dis tout!
-Il n'y a rien à savoir. Pour le moment c'est juste comme ça.
-Rien?
-Nous allons dans un bar demain soir. Mais je te le dis seulement parce que c'est Joe qui te surveillera. Et non pas pour te faire plaisir.
-Tu l'as invité! Tu me raconteras lorsque tu rentrera, promis?
-Promis."

Je lui tends le pot de fromage blanc et il plonge sa cuillère dedans. Je lui souris, la bouche pleine de crème. Il ricane, désespéré.

Je regarde Mitch monter dans sa voiture, puis le véhicule partir à toute vitesse. Je quitte des yeux la fenêtre, et les sur la toile face à moi. Je continue calmement de peindre, inspirée par le coucher de soleil. Deux petits coups se font entendre. Je dis à la personne de rentrer, et la petite tête de Sophia passe le chambranle de la porte.

"Tu es occupée? me demande-t-elle.
-Non, entre.

Elle ferme la porte derrière elle et s'avance vers moi.

-Je pensais que tu dormais, je ne voulais pas te déranger.
-Je ne fais pas que dormir, tu sais.
-Oui, oui.

Je sens son regard appuyer sur moi, alors je l'observe du coin de l'oeil. Elle fixe mon ventre, des étoiles dans les yeux.

-Tu veux toucher?
-Oui! Enfin... si tu veux...

Je lui fais signe de s'approcher. Je relève mon tee-shirt, enfin, celui de Scott, et lui souris. La voyant hésiter, je prends son poignet et pose sa main sur mon ventre. Elle affiche un sourire, ce qui me rend joyeuse.

-Elle n'a pas encore bougé pour l'instant, mais ça arrivera.
-Tu te rends compte... Tu as une vie en toi...
-Je m'en rends compte le soir lorsque je ne peux pas dormir sur le côté.
-J'ai si hâte que tu accouches!
-Et moi donc! Je n'ai qu'une envie c'est de la prendre dans mes bras.
-Tu voudrais l'appeler comment?
-J'avais pensé à..."

Nous entendons des cris stridents et horrifiants venir du rez-de-chaussée. Je regarde Sophia, cherchant à savoir si elle sait quelque chose. Les hurlements ne cessent pas et m'appelle. Quelqu'un m'appelle. Après un petit moment, je reconnais la voix de la mère de Scott. J'entends la douleur dans sa voix. Je laisse tomber mon pinceau au sol, et me lève. Je m'empresse de sortir de la chambre et de descendre. Je la retrouve en pleure sur le pas-de-porte. Je m'avance vers elle, ne sachant pas quoi faire. Joe la retient, puis elle se jette dans mes bras. Je l'emmène au salon, et elle se calme peu à peu.

"Madame Ludig, qu'y a-t-il?
-Il y a eu une attaque.
-Où donc?
-Où Scott et Dany résidaient, à Detroit.
-Mon dieu...
-Dany est mort...
-Mon dieu... Et Scott?
-Je ne sais pas comment il va...
-Qui vous a prévenu?
-Scott lui-même. Mais il semblait...
-Reposez-vous, je... Je vais l'appeler."

Je me lève, et vais me mettre à l'écart dans la cuisine. Tremblante, je prends mon portable et cherche à joindre Scott. Mais il ne répond pas. Mon dieu... Scott... Réponds! Réponds! Répondeur... Je soupire et essuie les larmes qui bordent mes yeux. Je pose mes coudes sur le plan de travail et enfuis à tête dans mes mains. Dany est mort. Scott ne répond pas. Comment ça a pu arriver? Enfin, tout allait bien. Je peignais, Sophia me posait des questions. Et puis les cris. L'attaque. C'est allé trop vite. Tout allait bien. Et Scott ne décroche pas. Dany... Il était si gentil, si bienveillant. Il me protégeait comme si j'étais sa fille. Il était si... Et Scott? Il doit être anéanti. Mon dieu... Je ferme les yeux, prise d'un vertige. Je me redresse, me sentant mal. Mes jambes cèdent sous moi, et je sens mon dos frapper le carrelage glacé de la cuisine.