C'était le premier jour du plus grand procès jamais organisé à Lebel. Le plus grand procès pour plusieurs raisons. Sa durée, sûrement plusieurs jours, voire mois. Daniel Moscov en était en centre. Et enfin la qualité des témoignages fournis par les plus grands dirigeants de ce monde. Aysha d'Auguste arriva le matin du procès. Son escorte, conséquente gagna l'Ambassade d'Auguste. Elle adorait et détestait Lebel. Elle y avait rencontré le maladroit Prince Jacob, qu'elle avait perdu. Elle n'avait qu'une hâte, repartir vers son pays, retrouver ses trois enfants, et oublier Daniel Moscov. L'Ambassadeur l'a reçu avec joie et lui indiqua ses appartements. Toutes les ambassades se trouvaient dans le même quartier, juste en face celle de l'Allénie était mise à l'honneur, drapeaux dressés, et portait d'Alexane et de Léonie en couverture. Aysha n'avait eu qu'une exigence concernant sa venue à Lebel: voir son fils. Anwar se présenta seulement deux heures après l'arrivée de sa mère. Les retrouvailles furent intenses. Aysha serra son fils contre elle si fort qu'il cru étouffé. Elle pleura un peu, et plaça ses mains sur ses joues afin qu'elle puisse regarder ses pupilles:
-Quand je te vois, je le vois.
-Je sais. Murmura Anwar. Je sais Maman.
-Je suis si heureuse de te revoir. Asseyons-nous. Racontes moi ta vie ici.
Ils prirent place devant des verres d'Iluilia. Quand Aysha repensait au bonheur d'avoir ses enfants, elle avait souvent une idée qui lui revenait. Elle était l'enfant d'un viol, et chacun des siens étaient l'enfant d'une amour puissant et transcendant. Comme une vengeance sur Damir. Anwar parla de ses cours, de Rowen qui attendait dans le hall actuellement, et de cette jeune femme ravissante:
-Qui est-elle? Demanda sa mère vivement intéressée.
-Juste une femme de mon cours de Littérature.
-Bien. Tu as le droit d'avoir des petits coup de coeur.
Aysha resta pensive. Anwar se mit à genoux devant elle, et posa sa tête sur les siens. Elle lui caressa les cheveux doucement. Il murmura sincère:
-Je sais que cela va être difficile.
-De quoi parles-tu?
-Du procès. Tu vas devoir raconter la mort de Papa.
Elle eut une soudaine colère qui monta en elle, et une tristesse infinie dans le regard. Sentant son corps se remplir de peine, elle posa sa tête contre celle de son fils. Il sentit les larmes clisser jusqu'à son cou:
-Anwar...Pour lui j'aurais affronté tout...Tout...Je me sens vide depuis qu'il est parti. Je suis vide. Vide.
Il la laissa pleurer:
-Je vais devoir raconter à toutes ces personnes comment ce monstre à abattu mon mari devant mes yeux. Comment il m'a laissé avec son cadavre durant des heures dans une roulotte...Comment il m'a torturé psychologiquement...
-Je sais.
Anwar commençait doucement à verser quelques larmes. Il avait peur pour sa mère, peur qu'elle craque, qu'elle renonce à la vie, qu'elle renonce à tout pour rejoindre la seule personne qu'elle a toujours aimé. Ils restèrent ainsi un long moment, le front d'Aysha sur l'arrière du crâne chaud de son fils. Ils pleurèrent ensemble. Anwar avait quelqu'un d'autre à voir.
Après Aysha, l'escorte d'Alexane d'Allénie arriva à Lebel. Léonie l'avait accompagné pour connaître le monstre qui avait tué son père. Dans le véhicule qui les menait à l'Ambassade, Léonie parlait de la beauté de Lebel, terre de sa famille. De plus elle avait hâte de croiser sa tante Pauline, et son oncle Ronor. Alexane s'énerva soudainement:
-Léonie, arrête de penser aux retrouvailles avec notre famille, alors que nous allons affronter l'horrible Moscov!
-Maman! Je suis attristée par les raisons de notre présence ici, mais j'essaye de voir le côte positif de la situation. Grand-mère Pia sera présente, Herny est un cousin que j'apprécie énormément, et...
-Ça suffit! Je sais bien que tu as toujours été curieuse, d'où ta volonté de venir avec moi, mais ce n'est pas un jeu!
-J'en ai conscience!
Alexane admirait sa fille pour son intelligence et sa répartie, néanmoins elle était encore inexpérimentée malgré ses 26 ans. Jeune mariée, elle passait le plus clair de son temps auprès de son époux, espérant avoir beaucoup d'enfant. Iréne était tellement différente, mais après tout c'est une Radmacher, née pour faire des bêtises. Cependant elle était calme et peu entreprenante dans la vie de tous les jours. Si Léonie suivait son instinct, Iréne réfléchissait à deux fois avant de parler. Léonie était blonde, grande, le regard enfantin de son père, et un menton large. Elle avait un air sérieux à tout moment, sûrement pour se préparer à son rôle d'Impératrice. Elles gagnèrent l'Ambassade d'Allénie, recouvert de leurs portraits. Alexane s'isola pour préparer son témoignage. Elle téléphona à Francis et Iréne.
C'était sûrement la personne la plus attendue du procès, en effet étant donné son âge, elle se déplaçait peu. Pia de Harval, Hospodar sans partage des pouvoirs, débarqua au dernier moment, juste deux heures avant le début du procès. Elle n'arriva pas seule. Ida de Harval était présente. Âgée d'une trentaine d'année, les Manaés s'inquiétaient de ne pas avoir encore d'héritier. Ida n'était pas mariée, et aucun prétendant n'avait été annoncé. À dire vrai Ida de Harval était avec le même homme depuis 15 ans. Anders Blake qui l'accompagnait partout. Il était là, caché. L'Ambassade des Îles était ravie d'accueillir leur souverain car cela faisait une dizaine d'année qu'elle ne se déplaçait plus. Elle avait tant perdu à cause de Daniel Moscov. Deux fils. Deux enfants. Elle s'assit sur une chaise de la terrasse. Un serveur lui apporta une boisson qu'elle ne toucha pas:
-Est-il arrivé? Demanda-t-elle à Ida qui était en face d'elle.
Le belle blonde aux petits yeux bleus répondit:
-Pas encore Maman. Il doit être avec sa mère.
Un homme arriva et annonça:
-Le Prince Anwar d'Auguste.
Pia se leva pour recevoir son petit-fils qu'elle n'avait pas vu depuis quelques années. Le jeune prince s'inclina devant sa grand-mère qui lui ouvrit les bras pour l'accueillir. Anwar avait toujours eu un peu peur de sa grand-mère. Elle avait ce regard froid, le visage droit, et le front haut. L'enlacer était une épreuve. Elle le regarda et fut subjugué par ses yeux:
-C'est comme-si son âme était en toi Ivar.
Pia appelait tous ses petits-enfants de leur prénom Manaé. Ainsi Sofiane se nommait Harald, Samira, Pia et Lina, Isabella:
-Les yeux sont le reflet de l'âme. Insista Pia.
-Merci Grand-mère.
-Quelle joie de te revoir. Comment vont ton frère et tes soeurs?
-Bien. Bien.
-Et ta mère?
-Mal. Très mal. Souffla Anwar.
-Je mesure sa douleur. Affirma Pia. Je mesure sa perte. Il était le meilleur d'entre nous.
Anwar en avait assez. Son père était glorifié à un point qu'il n'arrivait plus à y croire. Comment un homme aussi merveilleux avait pu mourir aussi tôt, dans de telles circonstances et vivre ainsi dans son ombre...C'était un poids énorme sur ses épaules de jeune homme. Il se tourne vers sa tante Ida qui l'enlaça chaudement avec le sourire. Pia s'assit et dit:
-Qui est le premier témoignage?
-Cousine Alexane. Dit Ida.
-Elle va être courageuse, elle est comme sa mère. Ma défunte soeur. Pourquoi notre famille est si maudite? Pourquoi...
-Ce n'est pas notre famille qui est maudite! S'exclama Ida. C'est Daniel Moscov qui est une malédiction!
Anwar ne dit mot. Dans une heure, le procès débutait. Dans une heure la face du monde connu allait changer.
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Les Seigneurs de Fallaris Tome 4: Auguste
Historical FictionHistoires politiques, amoureuses et fictionelles sur un monde dominé par les Seigneurs de Fallaris. http://lesseigneursdefallaris.tumblr.com/ "Le plus beau jour de la chute d'un tyran, c'est le premier" Tacite Cela fait presque 20 ans que Jacob de...