- Chapitre 23 -

11 2 0
                                    

19h56. J'attends dans la bibliothèque de l'académie la personne qui m'a laissé ce mot. Je me balade en attendant dans les couloirs les plus reculés de la bibliothèque. Des livres d'une centaine d'années y sont répertoriés, tous aussi poussiéreux les uns que les autres. Des bruits de pas se font entendre, ils semblent aller dans ma direction. Je me tapis dans l'ombre, aussi proche du mur que je le peux. Une silhouette apparait au bout du couloir dans lequel je suis et s'arrête. Je reconnais les cheveux bruns d'Hunter, il regarde sa montre et commence à déambuler dans les différents couloirs. Je soupire silencieusement.

Sérieusement ? 

Après avoir attendu que les pas de mon mentor s'éloignent, je sors de ma cachette et traverse le couloir des vieux livres pour rejoindre le couloir central de la bibliothèque. Pas de Hunter à l'horizon. Je souffle et me retourne puis me tape violemment contre une masse de vingt centimètres de plus que moi. 

- Pourquoi tu m'évites ? dit Hunter d'un ton sec.

Je me frotte la tête et pose les yeux sur lui. Il a l'air sérieux.

- Je ne t'évites pas. dis-je d'un ton tout aussi sec.

- Tu n'es pas venue de la journée à l'entrainement et quand tu m'as vu arriver tu t'es planquée. Pourquoi tu mens ? Et après c'est à moi qu'on fait des discours sur la confiance mutuelle !

Je fronce les sourcils et repousse Hunter. Il me regarde d'un air froid. 

- Pourquoi tu voulais me parler ?

Il baisse les yeux. 

- Parce que tu es en droit de savoir maintenant. Tu sais Charlie, cette histoire de Résistance, c'est pas des conneries. Je sais que tu es surveillée par le gouvernement parce que tu es une future super agent et tout. Mais pas seulement pour ça. Tu es spéciale et ça je l'ai vu dès qu'on s'est rencontré pour la première fois. 

-Tu veux dire la fois où tu m'as fait bouffer la poussière et que je me suis retrouvée à l'hosto ?

Il se gratte l'arrière de la tête un peu gêné. 

- Oui, précisément. J'étais obligé de faire ça. Non seulement pour mesurer tes capacités mais aussi pour faire tenir ma couverture.

Je le regarde sans comprendre.

-Ta couverture ?

-Oui. Comme je te l'ai expliqué, Aubrey m'apprécie et donc me connait bien. Si je ne te faisais pas de cadeaux s'était pour lui prouver que tu étais comme mes autres élèves. Je dois reconnaître que j'ai du y aller plus fort que d'habitude pour te mettre au tapis. Enfin bref. Tu dois partir tout de suite.

- Pardon ?

- Tu vas aller à l'École et tu vas trouver Daniels. Donne lui ce message de ma part.

- À Daniels ?

Hunter me tend une lettre scellée et me sourit.

- Une révolution ne se fait pas sans sacrifices. Je te rejoindrai dans quelques jours à l'École. Promets moi que tu feras attention à toi !

- Mais toi, qu'est-ce que tu vas faire ?? je demande après un moment de silence à regarder la lettre.

Je le regarde intensément, sans dire quoi que ce soit, serrant l'enveloppe de papier entre mes doigts. Il me regarde un moment et sourit, puis dépose un baiser sur ma joue.

- Charlie, ça va aller. me chuchote-il a l'oreille.

Il se décolle de moi et je baisse les yeux. Je ne sais pas ce qu'il compte faire, mais je lui fais confiance. De toutes façons je ne peux pas faire autrement. Il faut que je retourne à l'École pour donner cette lettre à Daniels. Ça veut dire qu'il sait pour la Résistance. Hunter m'avait bien dit qu'ils avaient des agents infiltrés partout dans l'UNS. Mais je ne pensais pas j'en côtoyais ! Maintenant que je suis entrée dans les rouages du système, je vais forcément ouvrir les yeux sur la réalité des choses... C'est difficile de s'imaginer que les personnes qui m'ont élevé, m'ont enseigné les règles et codes de la vie dans l'UNS l'ont fait en réalité à contre cœur...

***

À pas de loup, je me faufile dans les locaux de l'École. Je traverse le bar dans lequel mes amis et moi avions pris notre dernier cocktail quelques mois auparavant. J'ai l'impression que ça fait une éternité... J'inspire profondément et me détourne du bâtiment pour me focaliser sur l'entrée de service du bâtiment principal. Si je passais par l'entrée principale, je me ferai repérer direct. Arrivée devant la porte, je sors un magnet de ma sacoche et l'accroche à la porte. Je me recule prudemment et pianote sur ma montre, puis me bouche les oreilles. Un ultra-son désactive instantanément la porte qui s'ouvre béante. Heureusement pour moi, le bruit strident a une faible portée, plus on est proche, plus les oreilles souffrent. Je me glisse à l'intérieur du bâtiment et me dirige vers les escaliers pour enfin arriver au 4ème étage, les dortoirs.

Je pousse la porte de la chambre de Daniels après l'avoir désactivé comme pour la porte d'entrée. La chambre est baignée dans le noir, mais je peux distinguer une silhouette dans le lit au bout de la grande pièce. Je m'avance lentement, camouflant comme je l'ai appris le bruit de mes pas et de mon souffle. J'atteins le lit, où je perçois mon ancien enseignant, les yeux clos et respirant calmement. Je m'assois sur la chaise à côté de lui et l'observe quelques secondes.

- Vous pouvez arrêter de faire semblant vous savez. dis-je calmement.

- Je vois que tu mets bien en pratique tout ce qu'on t'a appris ces 12 dernières années.

La silhouette dans le lit se met à bouger. Daniels se redresse et je sens son regard se poser sur moi malgré l'obscurité. Un silence s'installe dans la pièce, créant une atmosphère assez pesante.

-Alors. Qu'est-ce que tu fais ici, Charlie ? dit-il au bout d'un certain temps à me détailler dans le noir.

- Hunter m'a donné ça pour vous. 

Je lui tend la lettre que je sors de ma sacoche. Daniels s'en saisit, puis allume la lumière de sa table de nuit. Je remarque qu'il est entièrement en uniforme. Il devait s'attendre à de la visite pour être aussi armé. Et par de la visite, je veux dire que je ne pense pas qu'il s'attendait à moi.

- Alors ça y est ! dit-il sans décrocher son regard du bout de papier.

Après avoir passé encore quelques secondes à survoler les mots de la lettre, il daigne enfin m'adresser un regard. Mais ce n'est pas ce regard bienveillant que j'ai toujours connu. Non. Ses yeux sont pleins de rage mêlé à une joie presque folle. Il se lève de son lit et se dirige vers moi. Son visage se rapproche rapidement du mien pour s'arrêter à quelques centimètres de mon oreille.

- La révolution commence enfin !

CharlieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant