- Vous allez me faire le plaisir de laver cette veste Mademoiselle ! déclara tout à coup le Capitaine après le long silence qui avait régné jusqu'à ce que l'on pénètre dans son bureau.
- Et vous la mienne je vous signale ! Réussi-je enfin à dire!
- Oh mais je crois bien que c'est VOUS qui m'avez foncé dedans je me trompe ?! Vous croyez que je vais me laisser ridiculiser par une petite infirmière telle que vous ? Et décidément, vous ne vous faites que remarquer depuis le début ! Dit il froidement en fronçant les sourcils.
- Je vous demande pardon ? Vous croyez que je l'ai fait exprès ? C'était un accident et je vous signale que vous auriez aussi pu m'éviter ! Mais je peux tout à fait laver votre veste si cela vous fait plaisir Capitaine !
Là je crois que je l'ai vraiment énervé, je le voyais se crisper de colère et ses doigts se resserrer dans leur paume. C'était du grand n'importe quoi de s'énerver pour si peu ! Franchement ! On dirait des enfants...
- Je pense que si vous arrêtiez de penser à l'Adjudant Major Prousto, tout irait beaucoup mieux !
Ses propos furent alors comme une violente claque en plein visage. Comment se fait-il qu'il parle de cet homme si subitement, comme s' il nous avait vu flirter ensemble, alors qu'il ne s'est absolument rien passé, et que c'est CET homme qui en pince pour moi ! C'est absurde !
- Il ne s'est absolument rien passé entre lui et moi Capitaine, alors je vous prierai de me dire pourquoi vous sortez tout cela !
Son expression change alors, sa mâchoire et son buste se contractent et ses yeux me fixent lourdement. Il est intimidant.
-Je n'aime pas le ton que vous employez avec moi. Déclare-t-il froidement, en réduisant en même temps la distance qui nous sépare.
Aucun mot ne sortit de ma bouche. Je voulus répliquer mais... il avait raison, j'étais à l'armée et l'homme que j'avais en face de moi était un Capitaine bien trop intimidant et important ici pour que j'en vienne le défier comme si de rien n'était.
Il ne fit rien jusqu'à ce qu'il retire soudainement sa veste, le laissant ainsi seulement vêtu d'une chemise blanche qui mettait sa musculature parfaitement en valeur.
- Assez parler, prenez ceci et donnez moi la votre, histoire que cette situation se finisse au plus vite.
Cette demande fit virer mes joues aux rouges, et sans le faire plus attendre, je retire à mon tour timidement ma veste tachée avant de la lui donner et de prendre la sienne dans mes bras.
Je sentis alors une odeur de menthol et de tabac explorer mes narines et faire palpiter mes sens. Nous nous regardons silencieusement.
Je pris ensuite conscience de l'endroit où je me trouvais, c'est-à-dire du bureau de Konrad Aleksandrov. Là où il passe le plus clair de son temps.
Il était d'une simplicité élégante, avec simplement ses médailles, des photos de groupes et des drapeaux accrochés aux murs.
Sur son grand bureau de bois était disposé un ordinateur, un clavier, un pot à crayons et un calendrier faisant office de sous de table, sans aucun gribouillage contrairement au mien.
- Venez récupérer votre veste demain soir chez moi. Je vis dans le quartier officier et mon BCC est le numéro 10. Je vous attendrai alors n'oubliez pas. Est-ce clair ?
très clair.
A ces mots, le Capitaine passa à côté de moi en me frôlant l'épaule, puis se planta devant sa porte.
- Je vous souhaite une bonne journée. Ne loupez pas le rassemblement une fois de plus.
C'est avec un léger signe de tête bien formel qu'il ouvrit la porte et la referma une fois que je fus sorti. Il part ensuite je ne sais où, me laissant ainsi là, planté comme une idiote devant la porte, maintenant fermée de son bureau, avec sa veste dans les bras.
C'était quoi cette situation encore ? Mon cœur battait à toute à l'allure rien qu'en repensant à ce qui s'est passé. Quel homme étrange"et beau" TAIS TOI MINI MOI!
Au bout de quelques secondes, je décide d'aller en direction de ma chambre pour y déposer la veste du Capitaine.
Mais soudain alors que je venais à peine de prendre la direction des logements, je tombe sur l'Adjudant-Major Prousto qui marchait au sens inverse. Je fus d'abord étonnée de le voir ici ,et lorsqu'il me vit, il posa son regard sur la veste que je portais dans mes bras, constata la disparition de la mienne, avant de me fixer étrangement.
Oh non que s'imagine t il ?! Pitié pas ça, qui me dit qu'il ne balancera pas une rumeur ou quoi?!
- Comment allez-vous Anne ? Vous revenez du bureau de notre cher Capitaine Aleksandrov ?
- Et bien nous avons eu un petit accident...
A mes mots, l'homme éclata de rire.
- Pas de chance, tout le monde vous a vu, mais j'espère au moins qu'il ne vous a pas trop sermonné. Sur ce je vous laisse, je suis pressé. Au revoir. Et surtout n'hésitez pas si vous changez d'avis...
Et il partit aussi vite qu'il était venu, me laissant à nouveau seule au milieu du couloir, une fois de plus déboussolée par ses dires...
Une fois dans ma chambre, lorsque je ferme la porte, je me mets dos à celle-ci.
Il s'était passé beaucoup trop de choses en une matinée !
Je pose ensuite le vêtement sur ma chaise quand soudain, une envie impensable me traversa l'esprit, et me fit suspendre tout mouvement.
Je regarde du coin de l'œil longuement la veste grise du Capitaine, hésitante, avant de la reprendre en main puis d'apporter le tissu jusqu'à mon nez, et de respirer son odeur. Mon esprit se brouille alors à mesure que j'umais ce parfum masculin.
Qu'elle était grande et large. Cela me donna envie de l'essayer, et c'est ce que je fis ensuite.
Moi, petite femme de 1m61, dedans, je ressemblais plus à un sac à patate qu'autre chose.
Je m'admire dans le miroir de ma salle de bain quand tout à coup, je prends conscience de tout ce que je viens de commettre !
"Mais bon sang mais qu'est ce qu'il m'arrive ?!"
Je m'empresse alors de la retirer et de la poser rageusement sur mon lit avant de partir de cette chambre, devenue trop étouffante, en prenant soin de claquer la porte derrière moi.
Romaric m'avait attendu à l'entrée du stade ce matin-là, et quand il me vit arriver, contre toute attente, il avait l'air plutôt inquiet je dois dire.
- Hey Anne ça va ?! Il t'a dit quoi ?! C'était comment ?! Tu sais j'ai flippé en vrai !
- Rien tout va bien, je dois simplement lui laver sa veste et la lui rendre demain chez-
Attendez.
Chez lui ?
Il avait bien dit chez lui ?!
oh non dites moi que je rêve !
J'allais devoir rendre visite le soir au Capitaine Aleksandrov ! Mais il est fou ! Que penseront les gens si ils me voient trainer dans les parages ?!
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A la margelle
RomanceAnne, une jeune infirmière fraîchement diplômée de 22 ans, intègre pour la première fois son régiment de l'armée de terre, situé dans le sud de la France. Les étoiles pleins les yeux et motivée comme jamais, elle fait peu à peu face à la réalité de...