L'Amiral me regarda dans les yeux, en souriant, comme si elle avait pu lire le fond de mes pensées. Elle me demanda :
— Que vas-tu faire, à présent, Jean ?
Je ressentais, plus que jamais, ce lien subtil qui nous unissait depuis toujours. Et bien que le bonheur intense d'avoir enfin retrouvé mon « âme jumelle » me donna envie de passer un peu plus de temps avec elle, je lui répondis sans hésiter :
— Permission d'emprunter l'un des quatre chasseurs de votre escadrille spatio-temporelle, Amiral... Il me reste encore une mission importante à exécuter.
— Et de quelle mission s'agit-il ? rétorqua-t-elle en me lançant un clin d'œil discret.
Je savais très bien qu'elle n'avait pas besoin que je réponde à cette question... Mais je me pris à son jeu afin de satisfaire la curiosité du professeur, qui écoutait notre discussion d'une oreille indiscrète.
— J'ai pris l'habitude d'accueillir l'arrivée des nouveaux visiteurs sur une petite lune, pas trop loin d'ici... je ne voudrais pas faillir à la tradition !
— Permission accordée. Clair Éther à toi « Maître Jean » ! me répondit-elle. Mais garde bien ce petit cristal accroché à ton cou, il se pourrait que j'aie à nouveau besoin de toi dans l'avenir. Personne ne sait vraiment ce qu'il nous réserve, n'est-ce pas ? Et s'il te plaît, plus d'Amiral entre nous. L'équipage a eu vent de ce nouveau concept de noms. Ils se sont aperçus que je n'avais pas encore eu le temps, ou l'inspiration, de m'en trouver un...
— Et alors ? lui demandai-je avec curiosité.
— Ils ont décidé, d'un commun accord, de m'appeler... « Mère ».
— Ainsi soit-il ! lui répondis-je, levant les mains vers le ciel en souriant.
Je pris congé de tous ceux qui m'avaient accompagné jusqu'ici, au cours de la formidable aventure que nous partageâmes. Nous nous promîmes de nous revoir bientôt, grâce à la capacité que nous avions acquise de communiquer, ainsi que de nous déplacer, à notre guise, dans l'espace et dans le temps !
Je me dirigeai vers mon chasseur qui m'attendait au fond du hangar. J'entamai d'y entrer les coordonnées du saut qui me ramènerait vers Magdala, sur Éden, à l'instant précis de l'arrivée de Marie Madeleine et nos compagnons... mais j'eus, soudain, un bref instant d'hésitation.
Je n'avais pas encore testé les limites de ma fabuleuse machine à voyager dans le temps. J'étais curieux de voir ce qu'il adviendrait de cette petite lune, dans les millénaires à venir. Nos chérubins arriveraient-ils à y faire s'épanouir leur race d'êtres, mi-humains, mi-oiseaux ? Et quel genre de société y installeraient-ils, au fil des siècles ? Je changeai donc la date de mon arrivée... en y ajoutant quelques zéros.
Les regards étonnés de mes compagnons, se demandant si j'avais changé d'avis, me motivèrent à initier la rotation de mon deuxième anneau. J'enclenchai, sans plus attendre, la commande de saut.
Le hangar et ses occupants disparurent, comme par enchantement. Je me retrouvai, après une brève décélération, au beau milieu d'épais nuages, entouré d'énormes colonnes de cristal. J'avais pourtant programmé mon saut pour arriver à une hauteur respectable au-dessus de notre cité. Je me mis à descendre prudemment en longeant la tour la plus proche.
Je vis enfin, sortant du brouillard, une multitude d'engins et d'oiseaux, en tout genres, se déplacer entre les hauts bâtiments hébergeant de nombreux individus. Leur structure cristalline abritait une dense végétation qui grimpait à partir de petits balcons suspendus.
VOUS LISEZ
Homo Sum 3 : l'éveil de l'humanité (Episode 3 : Libération)
Science FictionJean et ses compagnons ont réussi à échapper à l'emprise de la toute puissante Fédération à bord du vaisseau cargo TXL1138 qu'ils rebaptisèrent : « Nouvelle Chance ». Ils sont enfin arrivés au but de leur voyage, une petite lune du système solaire...