34. L'Étang de Feu

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Pendant ce temps, non loin de la plateforme utilisée afin d'effectuer les derniers sauts, l'Amiral et son Second conversaient avec Lucifer. Celui-ci semblait visiblement très satisfait de la tournure que prenaient les événements.

Ils assistèrent, à travers l'immense hublot du hangar, au départ de la deuxième coupole. Le professeur les observait de derrière sa console. Il tentait discrètement d'entendre ce que l'Amiral, le Second et Lucifer pouvaient bien se dire...

— Les insurgés sont tous à bord Amiral, déclara le Second, avec satisfaction. Les derniers chasseurs viennent de nous contacter. Ils sont en approche et vont bientôt apponter. Plus rien ne nous empêche d'entamer notre voyage retour !

Il fit face au frêle adolescent en continuant :

— Comme vous pouvez le voir, la coupole qui contient vos petits protégés vient de se détacher de notre vaisseau. Nous la guidons vers la surface de votre lune. Où désirez-vous qu'elle se rende ?

— Très bien Commandant, répondit Lucifer. Faites-la se poser près des installations des Indésirables. Qu'elle vienne se connecter directement aux quatre autres. Cela lui permettra de se maintenir en équilibre en position verticale.

— Très bonne idée, reprit l'Amiral. Vous ne manquez ni d'organisation ni de ressources. J'ai l'impression que vous allez créer un vide en nous quittant. Nous avions commencé à nous habituer à votre présence... Êtes-vous certain de vouloir rester sur cette lune inhabitée, avec pour seule compagnie vos petits dragons volants ?

Le professeur et le Second se regardèrent discrètement, se demandant quelle mouche avait bien pu la piquer. Était-elle réellement en train de proposer à ce monstre de rester à bord ? Ou bien essayait-elle simplement de l'amadouer en gagnant sa confiance ? L'adolescent ne répondit pas à cette question. Il regarda la coupole s'éloigner d'un air songeur... L'Amiral, feignant de comprendre la raison de ce long silence, reprit de plus belle sa tentative de séduction :

Vos derniers déplacements ont dû vous exténuer... Puis-je me permettre de vous offrir un de nos chasseurs, en guise de souvenir de notre brève rencontre ? Il pourra vous être très utile en vous permettant de vous rendre où bon vous semble sur votre nouveau monde, sans avoir à trop vous fatiguer... Et grâce aux réserves d'hydrogène qui sont encore à bord du vaisseau cargo vous n'aurez aucun risque de pénurie de carburant ! Je suis certaine que l'individu qui vous a si gracieusement offert l'hospitalité de son enveloppe charnelle saura rapidement vous aider à en comprendre le fonctionnement...

Le Second faillit intervenir, il réprima une grimace écoeurée en tentant de ne pas interrompre sa supérieure. L'énorme cicatrice qui barrait son menton s'étira le long de son visage, exprimant sa désapprobation silencieuse.

— Quelle excellente idée Amiral ! répondit Lucifer. Ce serait plutôt moi qui devrais vous demander de m'accompagner sur mon nouveau monde. Nous pourrions y régner ensemble. Je suis certain que nous ferions un couple... extraordinaire !

Ne m'en veuillez pas si je refuse une offre si alléchante. Mais la différence d'âge qui nous sépare est, à mon avis, un peu trop importante... répondit-elle avec une pointe d'humour qui sembla satisfaire son interlocuteur.

Ce dernier se dirigea, guidé par l'Amiral, vers l'un des quatre chasseurs de l'escadrille spatio-temporelle installé sur la plateforme. Elle lui donna très brièvement quelques explications qui lui permirent de comprendre, ou plutôt de se rappeler, le fonctionnement de son engin.

Remarquant avec joie combien leur hôte avait hâte de décoller, elle se laissa flotter vers le sol après avoir refermé la verrière du chasseur. Celui-ci ne tarda pas à s'élever d'à peine quelques centimètres au-dessus de la plateforme...

Exactement au même instant Jean, toujours endormi dans son cachot, sembla sortir d'un affreux cauchemar en s'écriant :

Maintenant Judas... actionne la petite manette jaune qui se trouve juste à côté de celle du train d'atterrissage !

L'adolescent exécuta, sans même réfléchir, ce que son ami venait de demander à son « Moi Supérieur ». Le démon qui l'habitait n'eut pas le temps de réagir. Le deuxième anneau de son appareil se mit dans la position verticale ; il était prêt à effectuer un saut spatio-temporel...

Le regard de Judas redevint normal, pour une fraction de seconde. Il fixa le professeur en souriant, comme s'il avait su, et acceptait pleinement, ce qui allait lui arriver... De petits éclairs bleutés remplacèrent son chasseur qui disparut sous les yeux étonnés du Second.

Le professeur s'écria alors d'un ton mitigé, ne sachant s'il devait rire ou pleurer de ce qui venait de se passer :

— Record battu ! C'est le plus long saut que nous ayons jamais programmé... en distance du moins. Et le premier à prendre la bonne direction.

— Mais où l'avez-vous envoyé ? lui répondit le Second, stupéfait de ce qui venait de se passer.

— Je lui ai procuré un aller simple, quasi instantané, vers la naine rouge qui accompagne les deux étoiles d'Alpha dans leur course... Il doit être en train de s'y rematérialiser à l'instant même Commandant. Un certain Max, qui prétend être aux commandes du vaisseau que nous avons rencontré, nous a aidés à manigancer ce stratagème, la nuit passée ! Il m'a également donné quelques conseils qui pourraient rendre notre voyage retour encore plus court que nous le pensions...

— Et pourquoi avez-vous choisi « Proxima » ? demanda L'Amiral, qui avait retenu le nom de la petite étoile. Pourquoi pas dans l'une de ses deux sœurs ? N'aurait-ce pas été plus facile... et efficace ?

— Max m'a expliqué que la Merkaba artificielle de Lucifer ne lui permettait d'effectuer que de petits bonds, limités dans l'espace et le temps. Il fut néanmoins capable de se translater de notre troisième planète vers la sixième de notre système pour rejoindre le TXL1138... Il aurait dès lors également pu effectuer un tel bond d'Alpha vers Éden ! Nous avons considéré que Proxima, cette naine rouge ne possédant aucune planète, constituait, dès lors, le choix idéal... Il restera prisonnier à l'intérieur de sa fournaise pour l'éternité, n'ayant aucune forme de vie assez proche de lui pour s'y incarner de force !

Le Second se retourna alors vers l'Amiral ne sachant que penser ni comment réagir. Celle-ci l'observait avec contentement, impatiente de lui en apprendre un peu plus.

— Max... Proxima ? reprit-il tout étonné.

— Je crois que nous avons quelques explications à vous donner Commandant, répondit l'Amiral en souriant... tout en appuyant sur le bouton qui commandait l'auto-destruction de la deuxième coupole !

Homo Sum 3 : l'éveil de l'humanité (Episode 3 : Libération)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant