~25~ La douleur d'un raté

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Jean ne dit pas un mot pendant tout le trajet, concentré sur la route obscure à cette heure tardive. Plus d'une fois, j'essaie d'ouvrir la bouche, mais les mots restent bloqués dans ma bouche à cause du douloureux serrement dans mon cœur. Pourquoi m'a-t-il embrassé avec tant de passion s'il est incapable d'en assumer les conséquences? L'idée que notre magnifique amitié vient d'éclater en morceau me terrorise, m'inquiète. Tout ce que je souhaiterais, c'est que mon meilleur ami me prenne dans ses bras en me susurrant des mots doux dans le but de chasser les vilaines larmes qui brulent mes yeux.

Le garçon fait pénétrer la voiture dans la minuscule cour de mon bloc d'appartements, puis il détourne la tête vers la fenêtre. Je le fixe, priant pour qu'il dise quelque chose avant de me laisser partir. Un simple sourire ferait toute la différence.

-Bonne nuit, Jean, soufflai-je en réalisant qu'il reste silencieux.

-Bonne nuit.

Sa réponse est froide, pire qu'une gifle. Les lèvres pincées pour m'empêcher de fondre en larmes sous ses yeux, j'agrippe mon sac contenant mon maillot de bain trempé, puis je quitte le véhicule. Je marche rapidement vers mon appartement, peinant à conserver une respiration stable. Tout tourne alors que j'essaie d'une main tremblant d'enfoncer la clé dans la serrure de la porte. Pourquoi doit-il ainsi me rejeter? Tout allait tellement bien... Malgré la peur d'être attrapé par un fou furieux armé d'une batte de baseball, cette soirée avait quelque chose de magique. C'était le début de quelque chose de nouveau, de beau.

Un rideau d'eau salée entrave ma vue lorsque je parviens enfin à déverrouiller la porte d'entrée. J'entre en essayant d'être silencieux, ne souhaitant pas réveiller ma mère ou ma mamie. Si elles me voyaient dans un tel état, elles feraient de Jean leur pire ennemi et refuseraient de le voir à nouveau me rendre visite. Personne n'a le droit de faire pleurer leur petit garçon.

Une fois dans ma chambre, je me laisse tomber en pleurs sur mon lit, me moquant de le mouiller avec mes cheveux encore humides. J'aimerais me confier à quelqu'un au sujet de la douleur que je ressens actuellement, mais mon confident habituel est le responsable de mon chagrin. J'en ai assez de souffrir chaque fois que je crois que tout va pour le mieux.

D'une main tremblante, j'agrippe mon téléphone et j'appelle en vidéo Thomas. Il est le seul qui peut m'écouter en cet instant, même si ses conseils sont souvent minables. Le blond ne connait rien à l'amour, mais il fait toujours un effort pour m'aider. Ça sonne... Alors que je crains qu'il soit couché, l'écran laisse place au visage souriant de mon ami. Ses yeux, ainsi que la bouteille de mojo shot vert dans ses mains indiquent qu'il est potentiellement en état d'ébriété. D'immenses lunettes de soleil trônent au sommet de sa tête, tout comme un ridicule collier de fleurs en plastique de style hawaïen pend à son cou.

-MARCO! crie-t-il en me voyant, HEY GUYS, IT'S MY FRIENDS MARCO!

Derrière lui, de nombreuses personnes répondent en criant : « hi » ou « HELLO MARCO! ». Thomas se trouve-t-il dans une fête? Je ne reconnais pas le décor de la maison où il est, mais la musique populaire et la foule indiquent que je le dérange en pleine soirée. J'essuie les larmes sur ma joue du revers de ma main.

-Je vais rappeler demain, soufflai-je, désolé de te déranger...

-Mais non, ne dis pas ça! Tu ne déranges jamais, OK? Est-ce que tu pleures?

Le blond perd son sourire en voyant mon état lamentable. Je refuse de gâcher sa soirée avec mes problèmes, donc je me force à lui sourire. Ce geste banal me demande un effort incommensurable.

-Non, ne t'en fais pas, mentis-je, je te rappelle plus tard, OK?

-OK... Je reviens bientôt dans le coin pendant quelques jours afin de voir de mes yeux si c'est vrai que les Titans sont moins minables qu'avant. Je vais te faire un gros câlin, promis.

Histoire d'équipe: Maux de cœur d'un geek indécisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant