En ondes radioactives

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Maxence Clermont ne connaissait pas grand-chose au système judiciaire.

Sinon, il n'aurait pas porté plainte contre moi pour une simple entrée par effraction dans son laboratoire. Il aurait porté plainte contre moi parce que j'avais publié sur les réseaux sociaux une photo de son chimpanzé, ce qui lui avait fait perdre une subvention.

Je lui avais causé préjudice. Sa plainte aurait été valide au sens de la loi et il aurait même pu me poursuivre.

Il aurait d'ailleurs probablement gagné sa poursuite, et moi j'aurais perdu beaucoup d'argent.

Heureusement, donc, qu'il ne possédait pas un petit manuel de loi sur le coin de son bureau comme moi.

C'était la raison pour laquelle j'avais seulement récolté une amende après avoir subi un interrogatoire en bonne et due forme au poste de police. Une amende de quelques centaines de dollars, mais tout de même, c'était moins pire qu'un séjour en prison.

La facture me narguait chaque fois que je passais devant. Elle était maintenue en place sur la porte de mon réfrigérateur par un aimant en forme de banane. Cela faisait quatre jours qu'on me l'avait remise, mais je ne parvenais pas à me résoudre à la payer. J'attendais de participer à l'émission Les matins de Joshua et de rendre la monnaie de sa pièce à Maxence. Après cela, nous serions quitte.

Parlant d'émission, il était grand temps que j'extirpe mes fesses du fauteuil dans lequel je prenais racine si je ne voulais pas arriver en retard à mon entrevue télévisée.

Nous étions dimanche matin et il était ridiculement tôt, mais j'étais animée par une joyeuse fébrilité à la perspective de passer à la télévision pour la première fois de ma vie.

Sherpa, mon chien d'aveugle à la retraite, m'observait attentivement alors que je ruminais devant ma penderie.

— Comment doit-on s'habiller pour avoir l'air crédible? marmonnai-je en écartant tour à tour chacun de mes t-shirts.

La plupart du temps, je portais un jeans, un t-shirt et mes bottes de travail tachées de terre et de gazon. C'était plus pratique pour effectuer les petits travaux imprévus au refuge et m'occuper de mes chimpanzés. Ce matin, toutefois, je ne voulais pas attirer l'attention sur mon habillement un peu bancal lors de mon passage en ondes. Je voulais que les gens écoutent ce que j'avais à dire, alors je devais m'habiller de façon à ce qu'ils n'aient rien d'autre à commenter que mes propos.

J'arrêtai mon choix sur un pantalon noir qui m'arrivait à la cheville ainsi qu'une blouse corail. Je balançai dans un sac la seule paire de talons hauts noirs que je possédais. Je les enfilerais à la dernière minute.

— Souhaite-moi bonne chance, Sherpa, lançai-je d'une voix niaise à mon chien en m'accroupissant pour lui caresser la tête.

J'effectuai le même manège avec mon chat, Thymine, qui m'ignora superbement, et ma perruche, Castafiore, qui eut la délicatesse de me crier dans les oreilles.

Je quittai ma ménagerie en quatrième vitesse et m'installai au volant de ma voiture avant de prendre la route.

Lorsque j'arrivai devant l'établissement où se déroulait le tournage des Matins de Joshua, la fébrilité avait cédé place à la nervosité.

J'avais déjà participé à des entrevues téléphoniques, figuré dans quelques articles de journaux et même été invitée à une émission de radio. Cependant, c'était la première fois que je mettais les pieds sur un plateau de télévision. Ce que j'allais dire aujourd'hui serait entendu par des centaines, des milliers de téléspectateurs.

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