VII. « dîner impré'v'u »

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19h48, le lendemain

Mon téléphone vibra au moment où je passai la porte de mon appartement. J'avais eu une bonne grosse journée, tout ce que je désirais était de prendre une douche bien chaude, de me préparer un repas et de m'endormir sous un plaid devant un film. Malheureusement, je vis en lisant le message de mon copain qu'il en avait décidé autrement.

De : Charlou
À : Soluna

« Hey, je t'emmène au restaurant ce soir, sois prête dans une demi-heure ;) »

Je rédigerai une réponse rapide, acceptant la proposition. Traînant des pieds, j'entrai dans ma chambre pour choisir un chemiser blanc et un pantalon noir quand ma meilleure amie m'appela.

- T'es prête pour ce soir ?
- De quoi tu parles, Eri ?
- Ne me dis pas que t'as oublié la soirée au bar...

Aïe.

- Je suis désolée, je..
- Tu peux pas venir, c'est ça ?, me dit-elle d'un air déçu.
- Charles m'a invitée au restaurant. C'était à la dern...

Elle raccrocha sans me laisser le temps de finir. Ok. Je soupirai et pris une douche rapide, puis je sortis de chez moi à 20h15.
Peu de temps après, la voiture de mon copain s'arrêta devant l'immeuble. J'y entrai tout en souriant.

- Bonsoir mon coeur !
- Salut toi, me dit-il en souriant.

Il portait une chemise et une cravate. Je regrettai un court instant de ne pas avoir opté pour une robe, puis je chassai cette pensée de mon esprit. Cette tenue-là m'allait aussi bien.

Après vingt minutes de trajet, nous entrâmes dans une salle composée uniquement de tables de deux personnes. Les lampes pendantes au-dessus de ces dernières créaient une ambiance particulière que j'appréciais beaucoup.
Le serveur nous proposa une table et nous présenta la carte. Je fronçai le nez en cherchant les prix. Je compris que nous étions dans un restaurant gastronomique quand je n'en trouvai aucun.

- Michel Sarran, il n'a pas fait l'émission « Top Chef », par hasard ?

Le serveur me répondit d'un ton posé, tout souriant.

- C'est bien cela, madame. Je vous laisse consulter la carte, n'hésitez pas à m'appeler si vous avez besoin d'un renseignement ou de quoi que ce soit d'autre.

Charles le remercia avant qu'il ne s'éloigne. Je posai la main sur celle de mon copain, placée sur la table.

- Tu es fou de nous emmener ici..
- Ça te plaît ?
- Oui, je n'étais encore jamais allée manger dans un restaurant gastronomique. Merci Charlou..
- Attends de voir les plats, tu vas être enchantée.

Je souris, il regarda nos mains. Ses sourcils se froncèrent quand il vit le numéro de Florian encore inscrit sur la mienne.

- C'est quoi ça, tu m'expliques ?, demanda-t-il en me regardant froidement.
- C'est rien, un client dont je devais noter le numéro pour le rappeler. Tu te souviens de monsieur Ordoñez ?
- Le gars qui devait récupérer un piano.
- J'ai voulu retirer son numéro de ma main après le boulot mais l'encre est en partie restée.

Quelques chiffres étaient effacés, cependant la plupart restaient visibles. Il retira sa main sur la table en levant les yeux au ciel.

- T'avais pas un papier à côté de toi ?
- Non, tu te doutes bien que je n'aurais pas écrit sur ma peau si c'était le cas.

Je ris nerveusement avant de reporter mon regard sur la carte.

- Il est beau, ce Florian ? Il a quel âge ?
- Pourquoi tu me demandes ça ?

Je relevai les yeux vers lui, ne comprenant pas le rapport.

- Réponds, dit-il froidement.
- Eh bien, ma réponse est que tu es le seul que j'aime. Les autres ne m'intéressent pas.
- Hum. Et son âge ?
- Je n'en sais rien, on n'a pas beaucoup discuté.

Je choisis une entrée en étant distraite. Pour chasser mes pensées sur Florian, je tournai la tête de gauche à droite. Charles entama une conversation sur son loyer mais je ne suivais qu'à moitié.

-

Après le repas, je posai la clé sur le meuble de l'entrée de chez moi. Charles se dirigea vers ma chambre. Il dormait chez moi ce soir et repartait tôt le lendemain matin pour voir un ami. Je le suivis et j'entrai dans la pièce.

- Tu veux qu'on se couche ? Ça te permettra d'avoir une bonne nuit de sommeil, proposai-je.

Il se tourna vers moi avec un léger sourire en coin avant de s'approcher. Mon copain posa ses mains sur mes hanches et il m'embrassa amoureusement. Il commença à faire des bisous dans mon cou tout en déplaçant ses mains sur mes fesses. Je fus légèrement surprise mais je le laissai faire. Il me poussa doucement jusqu'au lit pour m'y asseoir tout en commençant à retirer ma veste.

- Attends.. pas ce soir..

Charles se recula légèrement.

- Hein ?
- Je suis désolée, je n'en ai pas envie.
- Mais on est ensemble.. t'es censée vouloir de moi, non..?
- Pas ce soir. Je suis fatiguée, je te présente mes excuses..

Je baissai les yeux, rougissant de honte. Je commençai à me demander si je devrais coucher avec lui pour lui faire plaisir quand il me tira de mes réflexions.

- C'est dommage, on était bien parti pour.
- Charles..
- Tu veux pas, un peu... enfin, t'as pas envie là mais après...
- C'est non.

Il posa son index sous mon menton pour relever mon visage vers lui. Je le regardai dans les yeux, finalement déterminée à ne pas le faire si je n'en avais pas envie.

- D'accord. Je vais prendre une douche alors.

Je souris légèrement, soulagée qu'il soit compréhensif. Il sortit dans le couloir pour se diriger vers la salle de bain. Je décidai alors de remettre ma veste et de monter sur le toit.
En ouvrant la porte, l'air froid me fit frissonner. Je m'assis près du rebord en frottant mes mains pour tenter de les réchauffer. Les lumières de Paris brillaient devant moi, j'appréciais tout particulièrement cet instant où je n'étais qu'avec moi-même. Mon regard s'arrêta sur une silhouette un peu plus haut, au loin. La personne était debout et semblait regarder la Lune, la tête relevée.
Je sortis mon téléphone, mon regard s'arrêta sur ma main. M'autorisais-je à envoyer un message à Florian ? Il avait l'air étrange, mais ça me donnait envie de le connaître. Dans un élan, j'ouvris l'application Contacts et j'entrai son numéro en le nommant « Florian ». Je passai ensuite à l'application Messages et j'appuyai sur la petite icône pour en rédiger un nouveau.

« Hey »

Non. Il va se demander qui c'est.

« Hey, c'est Soluna (du magasin "La Lutherie de Capuani") »

Non plus, on ne se connaissait pas. Ça sonnait bizarrement.

« Bonsoir, c'est Soluna. Avez-vous continué à composer l'air au piano que vous aviez joué hier ? »

Ça me semblait être bien. Je m'apprêtais à l'envoyer quand mon pouce s'arrêta à quelques millimètres de la petite flèche. Je pinçai les lèvres et je supprimai le message.
Je restai quelques minutes dans le silence, écoutant le doux bruit du vent et les voitures roulant au loin. Il faisait froid mais c'était supportable. J'en profitai pour penser au dîner au restaurant avec Charles. Il avait payé plusieurs centaines d'euros pour un repas, pour nous deux. La conversation sur Florian l'avait tendu et m'avait fait me perdre dans mes pensées. Dans l'ensemble, nous avions tout de même passé une agréable soirée. Je jetai un coup d'œil à l'heure, de toute façon le dimanche était un jour où je ne travaillais pas.

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