Le panneau en bois heurtait fréquemment la devanture du commerce, balloté par le vent. L'Oeillet – Salon de thé. C'était là qu'Evonne avait rendez-vous.
Est-ce qu'elle avait bien fait d'accepter de revoir ce gars un peu louche qui l'avait abordé la veille, prétextant lui proposer un emploi ? Peut-être pas, mais la brune poussa néanmoins la porte et fit un premier pas décidé à l'intérieur. Le salon de thé était encore vide. L'homme lui avait dit de venir tôt, avant l'arrivée des premiers clients. L'endroit était sobrement décoré, mais avec goût et du mobilier de riche facture. Une femme d'âge mur, aux courtes boucles claires, passa la tête à travers le rideau blanc qui séparait le salon d'une autre pièce, probablement les cuisines, ou un cellier.
« Bonjour, bienvenue à l'Oeillet. Que puis-je faire pour vous ?
- Je viens voir... Pavas.
- Ha oui, suivez-moi, sourit-elle, il vous attend à l'arrière. »
Un couloir se dissimulait derrière la tenture. Au bout, une porte fermée. A sa droite, une porte ouverte. Le dénommé Pavas en sortit. Grand, plus très jeune, il avait néanmoins un regard vif sous sa calvitie naissante.
« Ravie de vous revoir. Entrez. Le bureau est plus indiqué pour parler embauche. »
Evonne s'installa sur la chaise que lui indiquait Pavas. Une fois la porte fermée, seule avec lui, elle se sentit très mal à l'aise. Son instinct lui criait qu'elle allait se mettre dans un sacré pétrin. Mais son ego d'ancienne militaire refusait de se laisser intimider. Elle était venu là pour un travail, elle ne partirait pas sans. La jeune femme en avait trop besoin.
« Commençons. Avant toute chose, signez ce papier s'il vous plaît. Vous vous engagez à ne rien révéler de cet entretien, au cas où vous ne seriez pas retenue. Parfait, merci. Bon. Vous avez les cheveux sombres et lisses, des yeux foncés et un teint pâle. Ce sont les critères de sélection principaux pour notre salon de thé. »
Un sourcil levé, Evonne retint le commentaire qu'elle avait sur le bout de la langue. Cette description ne correspondait pas vraiment à la serveuse.
« Notre salon de thé n'est pas tout à fait comme les autres. Nous demandons à nos filles de savoir aussi danser, chanter, et jouer d'un instrument de musique. Si ce n'est pas le cas, nous pouvons vous apprendre pendant votre formation de quinze jours. Il vous faut aussi être à l'aise pour tenir une conversation, qu'elle soit simple ou complexe.
- Je ne sais pas danser. Dans l'armée, on n'apprend pas à chanter, mais on chante quand même souvent, alors je me débrouille. J'ai joué de la flûte quand j'étais enfant.
- Hm. Pour moi c'est bon. Le boulot vous intéresse ?
- Pas avant d'en savoir un peu plus. Vous cherchez une serveuse, pourquoi devons nous savoir danser ou chanter ? »
Pavas la fixa, les mains croisées sous son menton. De toute évidence, il aurait préféré ne pas avoir à répondre à ses questions. Il souffla du nez et baissa les yeux vers les papiers qui s'étalaient, sur son bureau.
« Nous sommes un établissement de standing. Ceux qui viennent ici paient une sacrée somme, ils attendent un service de qualité, ce qui pour nous inclut également du divertissement. C'est ainsi que nous les faisons revenir, en proposant quelque chose qu'ils ne trouvent pas ailleurs, et ils y mettent le prix. Mais si cela ne vous ne dit rien, peu importe, nous trouverons quelqu'un d'autre très rapidement. »
Evidemment. Il voulait lui mettre la pression pour qu'elle accepte. Cela devait cacher quelque chose, mais Evonne ne pouvait pas faire la fine bouche.
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Bienvenue à l'Oeillet
ПриключенияA la frontière entre Rose et Sina, les riches s'amusent parfois au dépend des lois. Et pour les avertis, L'Oeillet est bien plus qu'un salon de thé. C'est un lieu de libertés, d'effluves d'alcool, de rires, de chants et de danses. Depuis son départ...