Victoria
—Nous sommes en privé ici.
—Avec ta soeur qui écoute derrière la porte d'entrée ? demande-t-il, un sourcil arqué.
—Bien que ma soeur ait l'oreille collée contre la porte, elle n'entendra rien avec l'épaisseur de celle-ci.
Il acquiesce, dubitatif. Je vais m'asseoir sur la balancelle au bout du porche sans attendre. Il me faudra être assise pour cette conversation. John se dirige vers la voiture quant au père de mon fils, il s'avance vers moi pour échouer sur le bord de la rambarde. Nous nous toisons dans le silence, livrant une bataille qu'aucun de nous deux ne veut perdre. Je ne cèderais sur aucun point et lui non plus apparemment.
—Vas-tu jouer au roi du silence encore longtemps ?
Je laisse mes yeux errer autour de nous, décidée à le laisser faire le premier pas.
—Je me demande comment tu as pu être aussi inconsciente, commence-t-il. Tu n'es pas en sécurité dehors et tu le sais, pourtant tu n'en fais qu'à ta tête et tu te mets toi et notre fils en danger !
—Je ne veux pas revenir dans une maison où un homme est mort par ta main. J'ai réalisé que Brian représentait ton héritier, comme tu étais celui de ton père. Il est hors de question que mon fils ne devienne un tueur.
—Notre fils. Eh bien-sûr que non il ne deviendra pas un tueur. Je n'ai jamais dit que je voulais qu'il soit mon successeur Victoria.
Je secoue la tête, peu encline à croire les mots qui sortent de sa bouche. Il y a forcément pensé. Il s'approche de moi pour s'agenouiller et prendre mon menton dans ses mains. Il dirige mon regard sur le sien pour être sûr que je l'écoute.
—Ecoute-moi bien. Jamais je ne prendrais une décision par rapport à Brian sans te consulter. En ce qui concerne la raison pour laquelle tu es partie, sache que l'homme que j'ai abattu est celui qui a vendu la mèche sur toi et Brian aux italiens. Il était un des hommes en qui j'avais le plus confiance mais il m'a trahi. Il ne pouvait pas vivre, est-ce que tu comprends ?
Je hoche la tête, incapable de parler tant je suis choquée. Si cet homme n'avait pas trahi Aaron, je n'aurais jamais vécu cet évènement traumatisant mais plus que tout, je ne l'aurais peut-être jamais retrouvé. Je prends conscience à quel point je suis attachée à lui quand il m'est impossible d'imaginer mon futur sans lui. Chacun des derniers mois passé ont été lent et je me demandais ce qu'aurait été notre vie si nous avions gardé contact. J'ai beau savoir qui il est, ce qu'il fait de sa vie, le monde dans lequel il vit ; je n'ai pas peur de lui. Son regard protecteur me promet la sécurité et le sacrifice. Ses doigts autour de mon menton me disent la tendresse qu'il éprouve pour moi. Tout chez lui n'évoque que contradictions en moi. La raison ou le coeur ? J'ai déjà choisi. Je l'ai choisi ce soir-là. Et rien ne m'aurait fait changer d'avis ni cette nuit-là ni jamais.
—Tu vas devoir me promettre deux choses si tu veux que je revienne.
—Tout ce que tu veux, souffle-t-il.
J'inspire profondément.
—Premièrement, je veux une réponse à ma question d'hier soir.
—Et deuxièmement ?
—Je veux que tu sois honnête avec moi, toujours. Peu importe le danger, peu importe si tu penses me protéger. Je préfère être blessée ou avoir peur avec toi qu'être dans l'ignorance.
Un silence polaire nous envahi. Sa main retombe sur son genou et il brise le contact visuel. Tout chez lui hurle les non-dits, la frustration. Je lui laisse ce qui me semble une éternité pour me répondre mais il se maintient dans son mutisme. Mes pieds touchent le sol et avancent d'eux-mêmes en direction de la porte d'entrée. Sa voix se fait entendre quand ma main gauche touche la poignée. Il est hésitant. Il se racle la gorge. Je ne me retourne pas pour lui faire face de peur d'être de nouveau déçue.
—Tout est vrai.
Mon silence l'invite à poursuivre tout seul.
—Je n'ai jamais ressenti une connexion aussi forte avec quelqu'un. De ma vie, je n'ai jamais été plus sûr d'une personne que je le suis de toi. Et... Merde, c'était si rapide, continue-t-il, incrédule face à ses propres sentiments. Le boulot n'a pas marché, le sommeil non plus. J'ai rêvé de ton rire un millier de fois.
L'émotion se fait sentir dans sa voix et j'ai enfin la sensation que tout ce que je ressens à l'égard de cet homme est réciproque. Je pivote, sentant son corps se rapprocher du mien à mesure que mon cœur bat. Plus vite, plus fort jusqu'à atteindre un point de non-retour quand ses mains se placent dans le bas de mon dos. Son cœur est frénétique. Ses yeux océans me transpercent d'un sentiment nouveau, une affection nouvelle.
—Je promet de toujours te dire la vérité même si je pense devoir te la cacher pour ton bien. Et je veux que tu me promette en retour quelque chose.
J'acquiesce.
—Je sais que tu as peur, reprend-t-il, de moi et de mon mode de vie. Mais je te demande juste de réfléchir à nous deux, à notre fils. A moi.
—Je t'en fait la promesse.
Son sourire est communicatif.
—Tu peux rester chez ta soeur le temps qu'il te faudra pour penser à tout ça, cependant quelques-uns de mes hommes resteront ici pour vous protéger. Et j'exige d'avoir des photos de mon fils, conclu-t-il.
Je rigole en guise de réponse tellement je trouve ça mignon.
—Tu ne viendras pas le voir ?
—Si je veux que ta réponse soit la plus sincère qui soit, je ne peux pas m'imposer et influencer ton jugement ; de quelque manière que ce soit.
—D'accord.
Il me demande s'il peut voir son fils avant de repartir et qui suis-je pour l'en empêcher. Je lui prend la main pour le guider à travers la maison. Ma soeur et son mari sont aux abonnés absents. Nous continuons notre chemin à l'étage. Arrivés dans la chambre de Brian, Aaron se dirige rapidement vers le berceau. Il le prend dans ses bras et le couve de cet amour paternel et inconditionnel. Je leur laisse un peu d'intimité et retourne en bas. Je cherche ma soeur qui se trouve dans la cuisine en compagnie de sa parfaite petite fille. Ma nièce accourt pour m'embrasser les joues quand elle me voit en criant.
—Tatie Vic !!!
—Coucou princesse, ça va ?
Elle hoche frénétiquement la tête avec un grand sourire. Des pas se font entendre dans les escaliers et ma nièce fait les gros yeux en regardant derrière moi. Je me doute qu'il ne s'agit pas de son père. Un léger rire secoue mon corps mais Lili reste stoïque dans mes bras. Je sens Aaron s'approcher de nous à pas de loup et la petite se recule autant qu'elle le peut.
—T'es un ami de ma maman ? demande-t-elle.
—Non je suis un ami de ta tatie, réponds doucement Aaron. Je peux te dire un secret sur tatie Victoria si tu veux, continue-t-il sur le ton de la confidence.
Lili gigote et tend les bras vers le père de son cousin, attirée par le secret qui lui est promis. Il ricane en triomphe et regarde ma soeur pour attendre ce qui semble être son approbation. Octavia hoche la tête tout en se rapprochant de nous. Elle arrive à mes côtés quand sa fille est dans les bras de Aaron. Lili entoure ses bras frêles autour du cou tatoué et tend l'oreille avec impatience. Il se penche vers elle pour lui chuchoter des paroles que ni ma soeur ni moi ne pouvons entendre. C'est sans compter sur la discrétion d'une enfant qui vient d'apprendre quelque chose sur sa tante préférée. Elle rigole et tourne la tête vers nous en criant.
—C'est ton amoureux ! C'est ton amoureux !
—Aaron ! criais-je, pensant le réprimander mais ne le faisant que rire davantage, entraînant aussi Octavia dans sa bêtise.
Celle-ci me regarde l'air de dire que ce n'est pas faux et je suis seulement capable de rougir comme une tomate au soleil. Le petit diable qui me sert de nièce descend des bras d'Aaron pour courir dans le jardin, nous laissant entre adultes. Je ne suis pas sûre de ce que nous sommes censé faire maintenant qu'il a dit au revoir à Brian. Ma soeur le salue et pars dans le jardin surveiller sa fille. Le silence nous enveloppe à nouveau, nous figeant dans le temps. Aucun de nous deux ne veut le briser de peur de se dire au revoir pour toujours. Pourtant, au plus profond de moi je sais que je ne le laisserai plus jamais disparaître de ma vie tout en sachant qu'il aime notre fils de tout son être. Je ne lui enlèverai pas ça.
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Un homme dangereux (en réécriture)
RomantizmVictoria Miller, galeriste d'art, rencontre Aaron James dans un bar un soir d'avril. Elle est une femme au caractère bien trempé, une businesswoman aguerrie à seulement 25 ans. Elle est d'une famille respectable. Lui est le patron de la mafia la pl...