2: Pourquoi es-tu parti?

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      Les vagues de la mer aux eaux noires se fracassaient contre les rochers en contrebas, de l'hôtel, la lune, pourtant seule lumière dans cet océan de noirceur, semblait bien fade face au milliers d'étoiles qui parsemaient le ciel, tel des braises s'échappant d'un feu ardent et le bruit lointain des derniers membres de la mafia qui avaient encore le courage de faire la sieste apparaissait comme une mélodie quelque peu anodine aux oreilles du rouquin.

Assis sur le rebord de la fenêtre de sa chambre, une cigarette entre les doigts le regard perdu dans le vide face à la mer en dessous de lui, les yeux rouges et cernés, une bouteille de Romané Conti à moitié vide à la main, c'est les lèvres tremblantes que Chuya lâcha un long soupir hachuré. Sa tête était vide, ses yeux d'habitude si brillants étaient à présent ternes sur son visage pâle sur lequel cascadaient ses cheveux emmêlés.
Le stresse accumulé ces derniers mois à résoudre un conflit à l'ouest du pays l'avait épuisé et, même si la mission s'était terminée quelques heures auparavant, il ne parvenait pas à décompresser. Pourquoi? Aucune idée. Tout ce qu'il savait c'est qu'il avait bu, beaucoup bu au cour de cette soirée. Il rentrait le lendemain à Yokohama et une chose était sûre: il avait extrêmement hâte. Retrouver son appartement, son lit, sa vue imprenable sur la ville depuis son salon.

Mais quelque chose l'empêchait de retrouver la sérénité. Une chose sur laquelle il ne parvenait pas à mettre le doigt. Pourquoi une telle énergie dépensée dans quelque chose dont il ignorait la nature? Trop de questions dans son esprit. Il était vite parti de la soirée, laissant ses hommes aux bons soins du personnel de l'hôtel qui devait désormais le maudire. Il avait besoin d'une nouvelle goûte d'alcool. D'un geste lent, il porta le goulot de sa bouteille à sa bouche et bu d'une traite le reste de vin qui lui restait. Pas assez. Ce n'était pas assez. Il voulait oublier cette sensation de brûlure dans sa poitrine dont il ne parvenait pas à se débarrasser. La cigarette ne faisait que le pourrir d'avantage et l'alcool ce n'était pas mieux mais qu'est-ce que l'alcool était meilleur que la clope. 
Chancelant, il se leva, tentant de s'accrocher du mieux qu'il pouvait au mur pour ne pas embrasser le sol de manière violente. Merde il avait abusé. La gorge déjà sèche, il dirigea son regard vers sa table de chevet où reposait une flasque et au moment même où il lâcha le mur, il s'écroula de tout son long sur le sol. Putain. Il n'avait même plus la force de bouger. Qu'est-ce qu'il avait bien pu faire à la vie pour qu'elle lui en veuille autant? Lui, tout ce qu'il voulait c'était oublier, faire abstraction de sa douleur. Et cette putain de douleur, d'où elle venait? Pourquoi avait-il l'impression d'être déchiré de l'intérieur ? Qui ou quoi pouvait bien le faire autant souffrir? Oh.

Ça lui revenait. La raison de son chagrin, de sa détresse et de son malheur. Ses yeux le brûlèrent soudainement et il raffermi sa prise sur sa bouteille avant de l'envoyer s'encastrer dans le mur à l'aide de son pouvoir.
Dazai. C'est vrai, Dazai n'était plus là. Il était parti.
Il l'avait abandonné. Il y a quatres ans, jour pour jour, il avait quitté la mafia, laissant Chuya derrière lui.

Un sanglot traversa la gorge du mafieux et dans un dernier effort, parvint à se mettre sur le dos pour respirer plus facilement. Et merde.

Pathétique. Il était pathétique.




~~~

Un matin, un peu plus de quatre ans avant que le jeune Atsushi Nakashima ne rejoigne l'agence des détectives armés de Yokohama, pénétraient dans l'entrée des locaux de la mafia portuaire de Yokohama, également la plus grande organisation criminelle du pays, le plus grand duo que le monde de la pègre n'ait jamais connu, le fameux Double Noir.

Il s'agissait d'un duo des plus inhabituel de croiser dans la rue: tout deux âgés de dix-huit ans, ils étaient d'une beauté à faire fondre n'importe qui: d'un côté le grand brun presque entièrement recouvert de bandages, le même sourire insupportable scotché sur le visage, et de l'autre le petit aux cheveux de feu horné d'un chapeau démodé lui saillant parfaitement et aux yeux d'un bleu rare et magnifique donnant l'impression de pouvoir faire fondre les glaciers de la mère du nord.

<<Solitaire Corruption / Receuil d'Os Soukoku>>Où les histoires vivent. Découvrez maintenant