Chapitre 25

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PDV Livaï

J'ai tout dit, enfin. Pour la première fois depuis la mort de Farlan, j'ai tout dit, de mon plein gré. Je me suis libéré d'un poids dont je ne mesurais même plus la lourdeur. Pendant tout ce temps, il était là, sur mes épaules, me nargant chaque jour de ma vie. Et moi, je l'ai conservé, je lui ai donné de l'importance. Inconsciemment, j'ai tout fait pour garder ce poids sur mes épaules. Je m'accrochais à lui, il était devenu ma raison de vivre. Depuis la mort de Farlan, j'étais persuadé que ce poids n'était autre que mon châtiment. Je devais vivre avec, je devais me punir pour ce que j'avais fait à mon meilleur ami. Et au fil du temps, je ne savais même plus comment vivre sans lui. J'étais persuadé que s'il venait un jour à partir, ce serait parce que j'aurais oublié Farlan. Pire, je me suis vu vivre avec toute ma vie, jusqu'à ce que j'expire pour de bon.

Mais Eren m'a tendu la main, et malgré toutes mes pensées contradictoires, j'ai attrapé cette paume. Elle était là, elle ne demandait qu'à me libérer un peu de ce poids sur mes épaules, de le porter avec moi. Et j'ai accepté. Pour la première fois de ma vie, j'ai accepté de léguer un petit peu de ce fardeau, de le céder à mon entourage. Pour la première fois, j'ai enfin écouté toutes ces voix qui me répétaient sans cesse la même chose.

Tu n'es pas tout seul.

Oui, je ne suis plus seul. Désormais, ce secret qui me ronge a été partagé, scindé, diminué. Je ne sens presque plus le poids de la tristesse sur mes épaules. Mes épaules se sont enfin dénouées, mes mâchoires déssérées. Pour la première fois depuis plus d'un an, je peux respirer. Un air frais, revigorant, pur. Je l'ai senti pénétrer mon corps, circuler à travers mes organes pour m'apporter toute la vitalité que j'avais perdue. Lorsque ce nouveau souffle a raisonné en moi, j'ai compris une chose : j'ai le droit de vivre. La vie de Farlan s'en est allée, mais moi, j'ai le droit de vivre la mienne. Je n'ai pas à porter ce fardeau sur mes épaules toute ma vie. Je n'ai pas à trembler en m'endormant, craignant les multiples images que m'imposera mon esprit tourmenté lorsqu'il viendra se lover dans les bras Morphée. Je n'ai pas à prendre tous ces médicaments pour espérer trouver le sommeil. J'ai le droit de sortir du brouillard, j'ai le droit de savourer ce que m'offre la vie sans me demander si je le mérite. J'ai le droit de rire, de sourire sans culpabiliser. J'ai le droit de sortir avec mes amis sans me demander si je mérite vraiment leur amour. J'ai le droit d'embrasser mon petit ami, de le prendre dans mes bras, de lui offrir mon amour et de recevoir le sien sans craindre qu'il me prenne pour un monstre.

J'ai le droit de vivre, tout simplement.

Mais ce droit, j'ai tout d'abord eu du mal à en profiter.

Juste après avoir tout avoué à Eren, je me suis senti incroyablement plus léger, plus tranquille. Mais cette tranquillité a été de courte durée. Les heures qui ont suivi ont été les plus atroces de toute ma vie.

Je me suis réveillé plusieurs fois dans la nuit, secoué par des images que mon esprit avait enterré du plus profond qu'il le pouvait. Et cela a duré plusieurs jours. Je dormais mal, me réveillant trempé, en nage, les joues inondées de larmes, la gorge nouée. Et, dans ma chambre, je croyais même sentir l'odeur âcre de l'urine, celle qui m'a hanté pendant des mois après le drame.

Mais Eren était là, il a toujours été là. Il prenait le temps de me consoler en pleine nuit lorsqu'il venait dormir chez moi. Sans ses bras pour m'enlacer, je crois que je serais devenu fou.

Tout cela a duré une semaine entière. Une semaine durant laquelle je n'ai pas mis un pied au lycée. J'étais une véritable loque, incapable de comprendre ce qu'on lui disait. Mon cerveau n'arrivait pas à saisir les informations, encore embrouillé par les cauchemars.

Laisse-moi juste t'aider ! (Ereri)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant