Chapitre 8 : Thysen

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Je m'éloignai de la pièce, dégouté. Elle n'avait pas hésité une seconde avant de répondre. Un non massif était venu se heurter contre mon cur. Dès l'instant où je l'avais vue dans la foule ce jour-là, j'avais su que ce serait elle. Puis, jour après jour, j'avais compris pourquoi j'avais ressenti ce sentiment. La pierre n'y avait rien à voir. Je ne m'attendais pas à ce qu'elle tombe amoureuse de moi en si peu de temps, même si je l'espérais. Je pensais cependant avoir gagné sa sympathie. Alors je tombais de haut. Un non qui sera diffusé dans tout le pays. Mon estomac se noua de colère. Oui, il serait diffusé partout, en avait-elle conscience ? Y avait-elle seulement pensé ? Nous l'avions prévenue de faire attention à ses propos, peut-être l'avait-elle fait à dessein. La rage monta en moi.

Je ne croisai pas Lluliana du reste de la journée. Elle était partie chez ses parents après avoir terminé son entretien et y resta jusqu'au soir. Je ne pris pas la peine de faire semblant, je l'ignorai à son retour. Mon comportement ne passa pas inaperçu. D'abord mes aides, puis mes parents et mes surs. Ils eurent tous droit à la même réponse. Cest-à-dire que c'était un problème qui ne les concernait pas. Ils n'avaient pas insisté. Ils savaient que si je ne me confiais pas de mon propre chef, on ne pouvait me forcer.

Le lendemain, je regrettai mon comportement puéril. Et j'en eu honte lorsque je vis sur la table de notre chambre une tasse de thé avec une note écrite par Lluliana : « Tu semblais contrarié hier, j'espère qu'aujourdhui te permettra de résoudre ce problème. » Je restais en colère. Je n'avais pas le droit de lui en vouloir de ne pas m'aimer. Je ne pouvais m'en empêcher pourtant. La vérité était que je ne supportais pas.

Je passai la journée au bureau. Je ne vis donc qu'Akki et Nehmrou. Le soir, la famille se réunit pour regarder notre interview. La tradition voulait que personne ne sache le contenu avant qu'il ne soit diffusé. Autre partie de la tradition, la famille la regardait ensemble. Impossible que j'y échappe. Je devrais subir ce rejet devant mes parents, mes surs et frère ainsi que mes beaux-frères.

Je m'assis sur une chaise le plus loin possible de Lluliana. Elle me jeta un coup d'il, but une gorgée de son jus de baies vertes. Les lumières furent baissées, le cristal allumé. Je regardai à nouveau Lluliana. Ses yeux étaient fixés sur l'écran, mais je sentais qu'elle cachait de la tristesse. Regrets ? Je ne savais pas.

Mon entretien était le premier à passer.

— Prince Thysen, vous nous avez raconté l'arrivée de votre femme dans le cercle familial, son apprentissage de la politique et de l'étiquette, mais tout ceci ne nous en dit pas beaucoup sur votre relation en tant que couple en dehors du rôle que vous avez envers le pays. Parlez-nous de votre relation en tant que Thysen et Lluliana. Excusez l'appellation familière.

— Nous apprenons à nous connaître au fil des jours. Pour elle comme pour moi, ce n'est pas facile de débuter une relation ainsi du jour au lendemain avec une personne que nous ne connaissons pas.

Les questions passaient et je n'écoutais qu'à moitié les réponses. Je les connaissais. Sur le cristal, je quittai le siège blanc et rouge, Lluliana prit ma place, son interview se déroula sous nos yeux. Puis vint finalement la question que je ne voulais plus entendre.

— Princesse Lluliana, êtes-vous heureuse d'avoir épousé le prince Thysen ?

— Non.

Je remarquai que tout le monde dans le petit salon changea de position. Le malaise s'était joint à nous.

— Oh ! Ne vous entendez-vous pas ?

— Non, ce n'est pas la raison. J'aurais préféré qu'il soit tout sauf prince.

— Intéressant ! Dites-m'en plus !

— Peu importe la sincérité de mes mots, on en détournera toujours leurs sens. Il y a des dizaines de raisons d'aimer un prince. Son pouvoir, sa richesse, ses relations et j'en passe. Alors que s'il avait été un simple homme dans la foule, on aurait cru à la sincérité de mes sentiments.

— Que voulez-vous dire, princesse Lluliana ?

— S'il n'avait pas été prince, alors j'aurais pu lui dire que je l'aimais sans que l'on m'accuse d'en vouloir à son argent, à sa position. Alors non, je ne suis pas heureuse d'avoir épousé le prince.

— Mais vous êtes heureuse d'avoir épousé Thysen.

— Oui. Je suis heureuse d'avoir croisé son regard ce jour-là, au milieu d'une centaine de personnes.

Elle avait répondu oui avec une assurance qui fit dissoudre ma colère.

La couronne d'EdymontOù les histoires vivent. Découvrez maintenant