Au fur et à mesure que l'interview avançait, je stressais de plus en plus. J'étais cependant apaisée d'une certaine manière. Cela pouvait paraître contradictoire et je ne comprenais pas moi-même comment c'était possible de se sentir autant comme une mer calme qu'une mer en pleine tempête. C'était pourtant ce que je ressentais.
Je n'osai pas regarder les autres. Je gardai mon regard obstinément fixé sur l'écran jusqu'à la fin. Ou plutôt, jusqu'à ce que Thysen me prenne par le poignet et me tire hors de la salle. Il ne le lâcha qu'une fois la porte refermée. Nous nous fîmes face dans le couloir. Il n'y avait personne d'autre. Aucun serviteur ne portait de plateau, aucun garde en ronde, ni de messager. Les bougies des chandeliers et des candélabres avaient été allumés. Aux bouts du corridor, les fenêtres se détachaient sur un fond bleu nuit.
— Lluliana.
Thysen me regardait. Soudainement, il cacha ses yeux d'une main, détournant légèrement la tête.
— Je ne suis pas en train de lire tes pensées, je me pressai de lui affirmer.
— Je sais que tu n'as pas besoin de ton don pour comprendre ce que les gens ressentent. Je me trompe ?
— Non, comment tu le sais ?
— Mes parents sont doués pour ne pas montrer ce qu'ils pensent et ressentent, et pourtant, tu adaptes à la perfection ton comportement suivant leurs humeurs. Eux, mais pas seulement. Au début, j'ai cru que tu utilisais ton don malgré ta promesse, alors j'ai fait davantage attention à tes yeux. Ils ne devenaient jamais rouges. Je ne sais pas comment tu fais mais je ne veux pas que tu devines dans quel état je suis. En ce moment, je dois être un livre ouvert.
— Honnêtement, je répondis d'une petite voix, tu es le plus difficile à comprendre pour moi.
Thysen me regarda à nouveau dans les yeux. Un sourire naquit sur ses lèvres. Je ne saisissais pas où allait cette discussion.
— Alors lis dans mes yeux.
— Pardon ?
— Utilise ton don. Lis mes émotions.
J'hésitai, je craignais qu'il ne soit pas conscient de ce que cela impliquait véritablement et qu'il le regrette par la suite.
— Je sais ce que cela fait lorsque quelqu'un entre dans mon esprit. Je sais également que tu seras plus délicate que celui qui est entré dans mes souvenirs il y a longtemps. Fais-le.
Prudemment, je me concentrai sur les énergies alentour. Plus particulièrement sur celles émanées de Thysen. Je rouvris les yeux sachant que mes iris s'étaient colorés de rouge. Peu à peu, je laissai mes émotions et sentiments pour mieux ressentir ceux de Thysen. Plus que les sentir, je les voyais. Je les voyais plus clairement que tout ce que j'avais expérimenté jusqu'à aujourd'hui.
— Alors ?
Je papillonnai pour faire disparaitre la magie de mes yeux. Le brun reprit sa place.
— Je veux savoir si ce que tu ressens est identique à ce que tu viens de lire, me dit Thysen.
Je souris et hochai la tête. Oui, la fumée violette existait aussi dans mon cur. Thysen se détendit et son visage s'illumina. Il prit ma main et l'embrassa.
— J'ai eu peur que ce ne soit pas le cas lorsque tu as dit ne pas être heureuse de m'avoir épousé.
— Désolée. C'était d'avoir épousé un prince. J'aurais dû le formuler autrement, je ne suis pas encore rôdée pour les interviews. Et puis, ce n'est pas vraiment que je ne suis pas heureuse, c'est juste que ce titre n'apporte pas uniquement des avantages.
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La couronne d'Edymont
FantasyLluliana Pryi est une jeune fille a grandi dans une famille ordinaire. Son quotidien est bouleversé le jour de la Comassion du prince Thysen - cérémonie au cours de laquelle une pierre enchantée désigne la personne destinée à être l'épouse du garçon...