CHAPITRE 6

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PLUS QU'UN BESOIN

Toute la semaine, cela s'était produit. Où que j'aille, dés que je croisais le Caporal Livaï, il me fuyait comme la peste. Toute la semaine, je m'étais sentie affreusement mal. Pourtant, une seule pensée me restait en tête : il ne m'avait pas repoussé. Il était partie, certes, mais il ne m'avait pas interrompu.

Le temps devenait plus clément ces derniers jours, mais même le soleil n'arrivait pas à me décrocher un sourire. Je crois que j'avais rarement été aussi malheureuse ici. Les sourcils froncés, je ressentais presque une envie de vomir. Je pouvais affronter toutes les douleurs, mais pas celle d'être éloigné de lui. Je pouvais bien ne pas le voir pendant des années, du moment que je savais que j'existais pour lui c'était le principal. Là, habitant pratiquement à coté, vivant dans le même endroit au quotidien, le croisant des milliers de fois par jour, je ne m'étais jamais sentie aussi lointaine de lui.

Je m'arrêtais devant une fenêtre et m'y appuyait, regardant le parc du château baigné de lumière.

- Ali Tainon ! J'entendis quelqu'un hurler en s'approchant de moi. 

Au fond du couloir, une nouvelle recrue courait vers moi. Elle s'arrêta devant moi, le souffle court.

- J'ai un message pour vous ! 

Je haussais les sourcils.

- Euh... tu peux me tutoyer tu sais... On a quasiment le même âge.

- Mais... vous êtes gradés, non?

- Ah non pas du tout ! Je riais. Tu as surement plus d'expérience que moi dans l'armée.

Elle fit les yeux ronds et prit de grandes inspirations. Elle prit quelques secondes pour reprendre son souffle, ses mains sur ses hanches. 

- Que se passe-t-il ? Je lui demandais finalement.

- Le Major vous... enfin te... enfin bref, il veut vous... non te... il veut te voir dans son bureau.

Ses oreilles devenaient rouges. Je la remerciais et partais d'un pas las vers le bureau du Major, quelques étages au dessus de nous. Je montais les marches blanches en pierre lentement. 

Arrivée devant l'entrée du bureau du Major, je reprenais doucement mon souffle. Je frappais trois coups distincts sur le bois sombre. Je remarquais la plaquette en or abimée où la gravure "Major du Bataillon d'Exploration" se mit à bouger, produisant un léger grincement. 

On m'ouvrit. Devant moi, Erwin Smith se mit sur le coté pour me laisser passer. Je le regardais sans comprendre et ses yeux m'évitaient. 

Je rentrais dans la pièce. A l'endroit où aurait du se trouver le Major, derrière le bureau, était assis un homme que je n'avais jamais vu : d'un âge assez avancé, il avait une petite barbe grisonnante et ses cheveux étaient mis long. Il portait l'uniforme des armées, un pantalon blanc, une chemise blanche et un long manteau vert. Mais il ne portait pas de signe d'une provenance d'un des trois corps d'armée sur sa veste. A la place d'avoir une licorne verte, une rose rouge ou des ailes bleus, il avait une simple croix grise sur les épaules.

- Ah, dit-il d'une voix grave et profonde. Ali Tainon, nous nous rencontrons enfin.

Il avait ses mains croisés devant lui, les coudes appuyés sur le bureau du Major. Je lançais un regard d'incompréhension à ce dernier, qui me tendit l'un des fauteuils d'une main. Je m'y avançais, mais ne m'y asseyais pas.

- Qui êtes vous ? Je lui demandais.

Sa voix me disait vaguement quelque chose mais je n'arrivais pas à mettre le souvenir dessus.

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