S1 E20 "01/05"

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Marinette

Je relève la tête et regarde Adrien qui semble réfléchir. Son visage n'est pas aussi fermé que je l'aurais pensé. Au contraire dans ses yeux je pourrais presque voir des étincelles. Cela ne m'empêche pas de ressentir un profond malaise au fond de moi, je me sens saisir par la gorge à bout de souffle. Ma question semble rester de trop.

— Tu n'es pas obligé de répondre, si tu ne veux...

— Il est mort.

Je me fige et regarde devant moi dans le vide. Des images remontent et jaillissent dans mon esprit et cela écorche mon cœur aussi fort qu'avant comme si le temps n'était jamais passé. Comme si ce qui était arrivé datait d'hier.

On ne se débarrasse jamais du passé et de tout ce qu'il transporte avec lui, n'est-ce pas ? Et je ne veux pas lui dire que je suis désolée car je me rappelle de ce que ça me faisait quand on me le disait. J'étais encore plus abattu que soulager. Faire son deuil c'est très long, très éprouvant et tellement dur que les autres ne peuvent pas comprendre comme on a mal de devoir vivre avec l'absence éternelle d'une personne qu'on aime plus que notre propre vie.

— C... comment tu te sens ? Murmuré-je, du coin de l'œil je le vois tourner la tête.

— Mieux. C'était il y a longtemps, j'étais petit.

— Hm.

Je comprends mieux pourquoi il ne voulait pas que je touche à ces cassettes. Elles renferment des souvenirs, des instants qu'il ne connaîtra jamais car on l'a privé de son père il y a des années. Même en grandissant perdre un parent n'est jamais une chose évidente et on peut dire tout ce qu'on veut car l'amour qu'on ressent pour eux est au-delà du possible. Peu importe combien on a souffert et peu importe les liens du sang, ils restent des personnes auxquelles on tient malgré tout. Pour une raison que je ne pourrais pas expliquer.

— Personne ne m'a jamais posé cette question. Quand il est mort..

— Tu n'es pas obligé de te justifier. Le coupé-je calmement.

— C'est bon, j'ai envie d'en parler avec toi, déclare-t-il et je me sens touchée par ses mots qui me font beaucoup de bien. Le jour où il nous a quitté, ma mère a été la femme la plus forte que j'ai jamais rencontré. Elle s'est occupée de moi elle a tout fait pour que je ne manque jamais de rien et j'ai eu le privilège de faire mon deuil à sa place. Mais je n'ai aucun souvenirs de mon père. Quand ma mère m'a donné ces cassettes, je n'ai pas compris. Mais... c'est tout ce qu'il reste de lui.

— Il ne te manque pas ?

— Si, quelques fois parce que j'ai besoin de lui. Mais c'est dur d'avoir le manque de quelqu'un dont on n'a aucun souvenir. Je ne le connais pas et je préfère vivre sans qu'il me manque plutôt que de ressentir le manque d'une personne avec qui je ne me serais peut-être pas entendu. Avec les années par obligation on relativise.

— Oui, t'as raison... Murmuré-je et je me triture les doigts jusqu'à sang.

Ce qu'il dit est vrai, mais je me rends compte qu'il a du beaucoup souffrir dans sa petite enfance. Il a dû voir les autres enfants sauter dans les bras de leur père à la sortie de l'école tandis que lui n'en avait pas et il a dû n'avoir personne à qui offrir un cadeau le jour de la fête des pères. Adrien a souffert étant enfant.

Cela peut expliquer le comportement qu'il adopte avec les gens maintenant. Ils ne lui ont pas fait de cadeau quand il était plus jeune. C'est sa manière à lui de se venger du mal qu'on lui a fait. 

— Mais je vais bien, hein ! Soupire-t-il en croisant les bras derrière sa tête. Je suis remis depuis longtemps il n'y a pas de quoi en faire tout un fromage.

Bad babysitting (réécriture)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant