Jour 1

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Chicago, 1947, 14h34.

Habillé de son costume de sergent, Bucky venait toujours d'atterrir à Chicago. Bien que cette ville n'était pas la sienne, tout lui semblait si familier. Les costumes, les robes, la foule, les voitures et cette odeur si particulière qui n'existait plus depuis le vingt-et-unième siècle. Bucky se sentait presque comme à la maison. Malheureusement pour lui, il n'était pas à Brooklyn, retourner voir son ancien appartement ne lui serait pas possible, d'autant qu'à cette époque, il devait déjà être déclaré mort à la guerre et ces affaires vendues ou données. Un long soupir sortit de sa bouche tandis qu'il tirait sur les pans de sa veste pour se redonner un peu de contenance. Alors qu'il arpentait les rues de Chicago, Bucky glissa sa main dans sa poche pour en sortir la photo d'Amanda, sa langue tiqua. C'est vrai que dans les années quarante les photos étaient encore en noir et blanc. Il la devinait brune, mais ce genre de photo pouvait être trompeur. Tandis qu'il rangeait la photo à son endroit initial dans un râle exaspéré, un homme le bouscula violemment d'un coup d'épaule. Les sourcils froncés, Bucky se retourna, prêt à en découdre.

-Tu peux pas faire gaffe ? s'énerva-t-il.
-Sergent James Barnes ?
-Euh... oui ?
-Agent Brandson. Je vous cherchais. Vous avez quelque chose pour moi, je crois.

Bucky sortit de sa veste la lettre qu'Hank lui avait donnée et la lui tendit, le regard fixé sur cet homme étrange. En retour, il lui tendit une enveloppe kraft.

-On vous a trouvé un logement dans le même immeuble que Mademoiselle Dwight. Elle se trouve actuellement dans un café près de chez elle, je vous conseille de ne pas l'aborder aujourd'hui. Tout ce que vous devez savoir se trouve dans cette enveloppe. Bonne chance.

Confus, le soldat vit l'agent Brandson s'éloigner sans un mot, comme si leur conversation n'avait jamais eu lieu. Son attention se porta sur ladite enveloppe entre ses doigts dont il sortit le contenu. Un petit trousseau de clefs tomba à ses pieds. Tandis que Bucky se baissait pour le ramasser, il jeta un coup d'œil à ce qu'il venait de sortir. L'adresse n'était pas très loin d'ici, il y avait également un peu d'argent en liquide et d'autres informations qu'il décida de lire plus tard. Bucky plia l'enveloppe d'un geste brouillon, la fourra dans la poche intérieure de sa veste et fourra les clefs dans la poche de son pantalon. L'envie d'aller voir Amanda était tenace, il voulait savoir à qui il aurait affaire, mais sans doute était-il préférable de faire profil bas aujourd'hui et de se rendre dans l'appartement qu'il allait occuper pendant une semaine.

Malgré la mission qui l'incombait, Bucky affichait un air ravi. Le vingt-et-unième siècle était bien trop compliqué, et ce, sous n'importe quelle forme. Les relations, le travail, la vie, les gens... Bucky avait souvent rêvé de ses années passées dans les années 30/40. Tout était beaucoup plus simple, il était seulement Bucky, ce jeune homme d'une vingtaine d'années que les femmes s'arrachaient. Ce jeune homme qui n'avait pas encore connu la guerre. Soudain, les traits de son visage se déformèrent, une grimace qui traduisait un fort regret se dessina et un arrière-goût amer s'empara de sa langue. Bucky souffla. Chienne de vie, pensa-t-il en regardant sa main de métal. Il la dissimula rapidement dans sa poche et se rendit à l'appartement qu'on lui avait trouvé. D'après ce qu'il avait brièvement lu, il était au troisième étage, porte 7, deux portes après celle d'Amanda.

L'appartement n'était pas très grand. Le salon était jumelé à la cuisine, la salle de bain se trouvait juste après l'entrée et l'unique chambre se trouvait directement après le canapé. Bucky haussa les sourcils. C'était amplement suffisant. Il posa son képi et sa veste sur le porte-manteau, dénoua sa cravate et jeta l'enveloppe kraft sur la table. En feuilletant le dossier, il put s'apercevoir que beaucoup d'éléments de la vie d'Amanda y étaient répertoriés. Ses habitudes, ses goûts, ses activités, son emploi du temps... Bucky fronça les sourcils et posa le dossier sur la table. C'était complètement tordu, quelqu'un avait dû passer un nombre incalculable de jours à l'épier. Il était là pour la protéger, non pas pour l'espionner. Un lourd soupir fit vibrer ses lèvres. Il passa une main dans ses cheveux et laissa tomber pour cette après midi. Même s'il était rodé en matière de saut dans le temps, il se sentait tout drôle, mélancolique, excité et anxieux.

Tard dans la nuit, du moins c'est l'impression qu'en avait Bucky, plusieurs coups sur le bois de la porte vinrent le tirer de son sommeil. Lorsqu'il ouvrit les yeux, il eut comme un choc, cette même sensation que de se réveiller d'une longue sans savoir où l'on est et quand on est. Il ne reconnaissait rien et se demandait encore où il était. La lune au-dehors n'était pas encore haute et la nuit pas complètement tombée. Les coups sur la porte se faisaient de plus en plus insistants et il lui fallut quelques secondes pour se souvenir de ce qu'il faisait ici. Il traîna des pieds jusqu'à la porte, encore vêtu de son uniforme de sergent, froissé et débraillé. Dans le miroir de l'entrée, il en profita pour se repeigner de ses doigts, réajusta sa chemise dans son pantalon et retira complètement sa cravate qu'il balança sur le guéridon. Lorsqu'il ouvrit la porte, il tomba sur une jeune femme correspondant au mot près à la description d'Amanda. Une jeune femme d'une vingtaine d'années, les yeux vert clair, de longs cheveux bruns, ne dépassant pas le mètre soixante avec un charmant petit grain de beauté sous l'œil gauche, de légères fossettes lorsqu'elle sourit et des dents parfaitement alignées. Elle portait une jolie petite robe rose pâle qui mettait gracieusement sa fine taille en valeur et portait une longue cape bleue nuit que Bucky trouvait très moderne pour l'époque.

-Bonsoir, j'espère que je ne vous réveille pas, sourit-elle.
-Non, répondit poliment Bucky, en quoi je peux vous aider ?
-Je m'appelle Amanda Dwight, je suis votre voisine de gauche. Monsieur Fitzgerald, notre concierge, m'a dit que vous emménagiez aujourd'hui et je suis venue vous souhaiter la bienvenue !
-Euh... merci, c'est gentil...

Amanda s'évertua à le fixer, toujours ce même sourire aux lèvres.

-Moi, c'est James Barnes, mais tout le monde m'appelle Bucky.
-Eh bien Monsieur Barnes, si je peux faire quoi que ce soit pour vous aider, n'hésitez pas, je suis à la porte numéro 5 !
-Je vous remercie...
-Bien, je vais vous laisser, je vous souhaite une excellente nuit, Monsieur Barnes et peut-être à demain, dit-elle avec son doux accent britannique.
-À vous aussi.

Amanda lui fit un dernier sourire et fit claquer ses talons jusqu'à la porte numéro cinq derrière laquelle elle disparut presque aussitôt. Au moins, Bucky n'avait pas eu à faire le premier pas pour l'aborder et en avoir fait sa voisine était une très bonne idée. Il restait maintenant à espérer que tout se passe bien et qu'il puisse vite faire la lumière sur cette affaire pour découvrir qui voulait la tuer et quand ç'aurait lieu.

One Week - James « Bucky » BarnesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant