La montée vers sa chambre se fait dans une douce torpeur. Nos mains sont toujours enlacées, nos yeux ne se quittent pas comme si l'un et l'autre avions peur que cet instant ne soit qu'un mirage.
Je n'en reviens encore pas d'être auprès d'elle. Moi qui m'étais fait à l'idée de rentrer chez moi, je me retrouve à quelques centimètres d'elle et j'ai du mal à savoir comment réagir. Je vois bien qu'elle n'est pas à son aise non plus. Ses doigts triturent les miens nerveusement mais c'est tellement bon de sentir son contact.
J'ai la sensation que cela a toujours été ainsi, elle et moi, ensemble. Que ses doigts caressant ma peau, ce n'est pas nouveau mais un geste ancestral. C'est difficile à expliquer mais mon corps reconnait et revendique le sien. C'est ça ! Elle est à moi sans que cela ne soit péjoratif. Elle l'est depuis toujours et je compte bien le lui prouver dès que nous serons entre les murs de sa chambre.
Je la sens trembler, ressens les frissons qui parcourent son épiderme. Je tire doucement son bras pour la blottir contre moi. Elle soupire contre mon cou et j'en frémis. Le souffle de sa respiration légèrement précipitée me colle le vertige. Depuis quand je réagis aussi violemment à un simple contact ?
À peine me suis-je posé la question que la réponse me revient tel un boomerang. Depuis Elle ! Il n'y a qu'avec elle que mon corps et mon esprit sont en accord. La savoir contre moi m'emplit de sérénité. Une paix que je ne me pensais plus capable de ressentir. J'aimerais que cet ascenseur ne s'arrête jamais. Qu'il nous laisse pour l'éternité dans ce cocoon où rien ni personne ne pourrait nous arracher ce bout de bonheur.
Un tintement nous sort de notre rêverie, aucun de nous ne bouge. Elle tremble de nouveau et c'est ce qui me pousse à la détacher de moi. Elle va attraper la mort si elle reste avec ses vêtements trempés et je n'ai pas comme projet de m'occuper d'une malade. Je la veux frémissante, fiévreuse mais ce sera dû à mes caresses et non à cause du froid.
— Viens mon cœur, il faut te mettre au chaud.
Je la pousse vers l'extérieur en la gardant la plus proche de moi. Je ne suis pas prêt à m'éloigner d'elle, même de quelques centimètres. Elle ne semble d'ailleurs pas contre l'idée car elle se sert un peu plus contre mon flan. Je lui prends la carte magnétique des mains et après avoir scruté l'étage, nous dirige vers ce qui me semble être une suite.
Lorsque j'insère la clé dans le boîtier, je suis pris d'un doute. Cette porte est comme une passerelle vers sa vraie vie. Je n'ai jamais eu le droit d'y pénétrer. Une fois, juste une petite fois, nous avons été ensemble et le lendemain elle repartait vers...
Je me tourne vers elle, la regarde et lui demande silencieusement ce qu'elle attend de moi. Nos yeux se cherchent, mes mains toujours bloquées sur la poignée, j'attends. J'attends qu'elle me permette d'entrer par la grande porte cette fois-ci.
Après ce qui me semble une éternité, elle sourit et ouvre elle-même. Elle passe le pas toujours un léger sourire aux lèvres. Bon dieu, ce qu'elle est belle !
— Entre.
Juste un mot, dit du bout des lèvres mais c'est comme si elle me l'avait crié. Il résonne en moi ! Le signe qu'elle m'accepte, moi l'homme de l'ombre, dans l'existence qu'elle menait jusqu'alors sans moi. Je fais un pas, puis un autre et me colle à elle. Je pousse du bout du pied la porte qui se referme sur notre baiser.
Un baiser tendre, pas comme ceux que l'on peut voir dans les films. Nous ne nous précipitons pas. Savoir que rien ne presse est une délivrance en soi.
Je l'embrasse lentement, amoureusement. La passion, je le sais, viendra plus tard.
Je veux qu'elle sache à travers ce baiser que je suis ici pour longtemps. Que demain et les jours qui suivront, nous continuerons de nous enlacer sans retenue, sans écran interposé, sans mari pour nous interrompre. Sans ces kilomètres qui nous narguent.
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À l'ombre d'une vie
RomanceOn dit que notre destin est écrit avant même de venir au monde. Et si une erreur s'était glissée entre les lignes de la destinée ? Une parenthèse écrite tout en bas de la page ? Deux âmes qui ne devaient pas se croiser, et qui pourtant vont s'aime...