42. Lui

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Je suis stationné sur une aire d’autoroute depuis une petite heure, je n’arrivais plus à avancer. Posé sur le siège passager, je triture mon téléphone, pris d’une nausée persistante. Même la légère brise qui s’engouffre dans l’habitacle n’y fait rien. La tête renversée sur l’appui-tête, les yeux clos, je m’oblige à respirer calmement.

Cette nausée ne passera pas. Elle ne me lâchera pas parce que j’ai rompu ma promesse.

Mon cœur cogne violemment en me rappelant son corps endormi et son léger sourire lorsque j’ai, le plus doucement possible, fermé la porte de la chambre d’hôtel.

Les premiers kilomètres, j’ai voulu faire demi-tour et lui demander de pardonner mon geste mais j’ai tenu bon. A chaque sortie possible, je me remémorais son état à fleur de peau, les pleurs qu’elle pensait silencieux.

Oui, je lui ai fait une promesse. Celle de ne partir que lorsqu’elle me le demanderait. Ce qu’elle a fait, inconsciemment, après ce fameux appel, par son aveu à demi-mot lors de notre repas hier soir et par son manque de réponse à la question qui me brûlait les lèvres depuis longtemps. C'est d’ailleurs ce dernier point qui m’a conforté dans ma décision. Partir était pour nous la meilleure solution. Cette dernière nuit était la plus magique mais aussi la plus dure que j’ai vécue. Je ferme les yeux et revit ses douloureuses heures.

Je décide de prendre le taureau par les cornes et d’aller la débusquer dans la salle de bain. Elle s’y est rendue à peine la porte de la chambre fermée. Cette pièce est devenue en quelques jours son refuge mais ce soir il n’en sera rien. À défaut d’avoir pris une décision durant notre dîner, nous devons le faire avant notre départ. Demain à dix heures la chambre doit être libérée et nous n’avons même pas discuter de l’après. Je souhaite qu’elle vienne vivre avec moi dans cet appartement trop grand pour un célibataire mais la convaincre va être une tâche ardue.

Je la rejoins devant le miroir qui fait tout le pan de mur et l’enlace par derrière. Je noue mes doigts sur son ventre légèrement rebondi et cale mon menton dans son cou. Son odeur empli mes poumons, un mélange de son parfum aux notes de Lys et de son odeur.

— Tu te caches ?

— Non. Je finissais seulement de me démaquiller. Mais j’arrive.

— Je préfère rester là si ça ne te dérange pas. J'adore te regarder prendre soin de toi.

— Comme tu veux mais ce n’est pas très intéressant.

— Laisse-moi seul juge. Et te voir te pencher en avant alors que je suis juste derrière toi et très loin d’être inintéressant crois-moi.

— Pervers, se moque-t-elle, s’inclinant lentement vers l’avant.

— Ho, ma douce ! Tu n’as pas idée...

Son clin d’œil me fait l’effet d’un coup de fouet et je ne résiste plus.

— Viens ! je la prie en attrapant son poignet.

— Attends, je n’ai pas fini d’enlever mon mascara.

— Pas grave, tu es parfaite comme ça.

— Je vais surtout ressembler à une mauvaise moitié de panda si je reste comme ça.

— Plus tard alors.

Je la fais basculer sur mon épaule et la pose délicatement sur le lit. J'ai envie d’elle, besoin d’elle, de la sentir autour de moi, de l’aimer comme moi seul en est capable. De ne faire qu’un.

À l'ombre d'une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant