33. Mari

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La nuit a été un enfer... comme la précédente, la douleur en plus. Quelle idée nous avons eu de boire aussi... encore. Alcool et antidouleurs ne font pas bon ménage, je devrais le savoir à mon âge. Je me suis retourné toute la nuit, ma main me lançant et ma tête ne voulant pas se mettre en pause.

J'ai tenté de mettre mes pensées au clair, j'ai dû avoir l'air fin avec ma feuille blanche et mon crayon mordillé entre les mains. Cette feuille est d'ailleurs restée vierge. Non pas que je n'ai rien trouver à lui dire, au contraire, mais je n'arrivais pas les fixer sur ce fichu bout de papier. Je ne suis vraiment pas doué avec les mots...

Je me suis levé à de nombreuses reprises, faisant des allers et retours entre la cuisine et les toilettes. Si je n'avais pas arrêté de fumer depuis de nombreuses années, je m'en serais griller une ou deux. Cela m'aurait sûrement plus détendu qu'un pauvre verre d'eau. Dommage que je n'en aie pas eu sous la main.

Ces va-et-vient ont duré jusqu'au lever du jour. Je vais encore avoir la tête des grands jours. Heureusement pour moi, que je ne commence mon nouveau travail que dans trois semaines car les cernes sous les yeux, quand on sort de deux ans de chômage, ça le fait moyen.

La tête toujours coincée dans mon oreiller, j'entends mon ami qui s'agite de l'autre côté du mur. Je dois aussi me bouger mais mon corps qui manque cruellement de sommeil ne l'entend pas de la même oreille. C'est en caleçon et en traînant des pieds que je le rejoins dans la cuisine. Une odeur de café et d'œufs brouillés m'accueille, me monte aux marines.

— Bon sang, comment fais-tu pour avaler ça au petit déjeuner ? fais-je la grimace en me servant ma précieuse tasse d'or noir, la seule substance que j'arrive à absorber au réveil.

— C'est le repas le plus important de la journée, je te rappelle. Et j'ai besoin de protéines vu la nuit que tu m'as fait vivre. J'ai dû dormir quatre heures à tout casser alors si je veux tenir le rythme au taf, j'ai intérêt à être en forme. Et chez moi, ça passe par la bouffe.

Je me doutais bien que je n'avais pas été aussi silencieux que je l'aurais voulu. J'ai même cru à un moment voir la lumière sous le pas de sa porte mais ça a été si furtif que j'ai cru avoir eu une hallucination.

— Désolé, ma main m'a fait un mal de chien, les médocs n'ont eu aucun effet.

Je lui montre mon bandage en faisant la moue.

— En parlant de ça, ton rendez-vous est à quelle heure ? Si c'est sur mon chemin, je peux te déposer.

— Ça va aller, t'en a déjà assez fait pour moi. Je n'ai pas envie que tu sois à la bourre à cause de moi. Je vais prendre le bus. Ça me laissera le temps de réfléchir au message que je dois envoyer à ma future ex-femme.

Ce mot me fait mal mais c'est ce qu'elle sera dans un avenir proche si je ne fais rien pour qu'elle me revienne.

— Ok, comme tu veux. N'hésite pas à me contacter dès que tu as de ses nouvelles. Je serais souvent en réunion mais je laisserai mon portable en vibreur au cas où.

Je le vois jeter un œil à l'horloge et mettre son assiette et autres ustensiles dans le lave-vaisselle.

— Laisse-ça, je vais le faire et tout nettoyer. Fonce te préparer si tu ne veux pas te faire virer.

— Tu sais comment te servir de cette machine ? C'est nouveau ça !

Son sourire en coin me donne envie de lui en mettre une pour se foutre de moi ouvertement. Je suis d'accord pour dire que je ne participe pas beaucoup aux tâches ménagères mais quand même.

Il se reçoit le torchon qui gisait sur le plan de travail.

Il se marre, me le renvoie et file rapidement dans la salle de bain. Il ressort quelques minutes plus tard, vêtu de ses affaires de la veille.

À l'ombre d'une vieOù les histoires vivent. Découvrez maintenant