Chapitre 20 - Face à l'inconnu

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Doudinka, Sibérie

Le petit avion bi-moteur plane à toute vitesse au dessus des plaines enneigées.
Semblable à un cerf-volant perdu en altitude, l'appareil ne cesse d'être balloté dans tout les sens à cause des violents courants d'air en provenance de l'Arctique. Aucune lumière, aucune habitation, aucune route, aucune trace de civilisation humaine n'est visible dans cette immensité glacée. Le givre envahit les hublots de l'appareil et rien n'est perceptible depuis l'intérieur de l'avion.
Emmitouflée dans une large doudoune adaptée au froid du grand Nord, la tête de Louisa peine à se mouvoir tellement son cou est enrobé de couches de vêtement. Son regard perdu dans l'immensité enneigée, elle ne cesse de repenser à la conversation avec son frère. Pourquoi est-il devenu si imprudent et si cruel ? Pourquoi cette rage s'est-elle subitement emparée de sa famille ? Louisa peine à comprendre les causes concrètes qui ont mené à la destruction de sa famille, mais elle reconnaît que l'assassinat du policier, ami du lieutenant Bérard, a définitivement clos toute tentative d'explication. Sa mère ne s'en remettrait jamais et Louisa le sait parfaitement. Elle peut comprendre cette rage, cette incompréhension de voir sa propre fille ôter la vie d'un homme d'une manière si cruelle, brutale et froide. Mais Louisa pensait, sans doute naïvement, que sa famille était beaucoup plus soudée et prompte à affronter les défis. Malheuresement, elle reconnaît s'être trompée...
Soudain, un trou d'air fait basculer brutalement l'avion sur la gauche. Louisa agrippe l'accoudoir, terrifiée par cette violente turbulence.

Pourquoi on a dû prendre ce mini-avion de la mort ?! argue-t-elle tétanisée sur son siège.
La ville de Doudinka est l'une des plus isolée de Sibérie voir du monde, et l'aéroport n'est adapté qu'aux petits avions à cause des conditions climatiques très hostiles. C'est une ville portuaire, il est plus facile d'y accéder par la mer que par les airs surtout en cette période de l'année mais cela prendrait des semaines de navigation. C'est Zaklov, le chef du cartel Russe, qui a choisi cet endroit.

Ces réunions improvisées à l'autre bout du monde, pour rencontrer des personnes dangereuses et surtout inconnues, laisse Louisa toujours perplexe. Pourtant, la prudence est le maître-mot chez ALLOS.

Et pourquoi ce Zaklov a choisi de nous rencontrer au fin fond de la Sibérie ? T'es sûr que c'est pas piège André..? Avec la Norway Arctic derrière nous, je ne pense pas que ce soit très prudent.
—Impossible. J'ai eu la confirmation que les deux canadiennes seraient présentes à la réunion et Henrique Tavares m'a appelé en personne pour me confirmer sa venue. Il devrai déjà y être d'ailleurs. T'inquiète pas, ce sont de potentiels clients et si nous allons à cette réunion, c'est surtout pour nous protéger.
—Toujours être prudent... marmonne Louisa dans sa veste.
Nous le sommes. Tu ne me fais pas confiance ?
—Bien-sûr que si André. Mais la dernière fois que tu as pris l'initiative de te rendre à une réunion improvisée, tu as finis enchaîné dans les caves d'un manoir slovaque.

André reste silencieux, un peu refroidit par cette remarque.
Louisa comprend l'avoir vexé.

Justement... je me suis rendu seul à la réunion avec les Balaz car je n'étais sûr de rien, reprend-il doucement. Jamais je ne mettrai ta vie en danger Louisa... Jamais... Tu es bien trop importante comparée à moi.
—Désolé André... Je suis stressée et sous tension alors je dis n'importe quoi... Heureusement que tu es là.

Enfin, de faibles lueurs apparaissent sous leurs pieds. La petite ville portuaire de Doudinka émerge du néant glacé tandis que l'avion amorce sa descente. Face à l'inconnu, Louisa prend une profonde inspiration et commence à rentrer dans son personnage de Reine d'Europe.

À LA TÊTE DU CARTEL : IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant