- Alors dis-moi, comment tu vas aujourd'hui ?
- Bien, je crois.
- Tu crois, ou tu en es sûr ?
- Est-ce que des patients vous ont déjà répondu à cette question en disant qu'ils n'allaient pas bien ?
- Bien sûr. Et c'est normal. Tu me fais penser à moi, plus jeune. Je me souviens avoir posé cette question à mon psychologue, à ton âge.
- Vous êtes allé chez un psychologue, vous ?
- Et oui. Mais je n'en n'ai plus besoin, maintenant.
- Vous pensez qu'il y a des gens qui ont besoin d'un psychologue et d'autres non ?
- Non. Je pense que tout le monde, à un moment de sa vie, a besoin d'être guidé, de parler, de savoir. Tout le monde devrait voir un psychologue, mais aujourd'hui je pense avoir trouvé la paix, c'est tout.
- Vous exercez ce métier depuis combien de temps, exactement ?
- Je suis plus proche de la retraite que de mes débuts, c'est sûr.
- C'est peut-être pour ça, que vous n'avez plus besoin de psychologue. Vous êtes devenu le vôtre.
- J'avais envie de devenir psychologue pour pouvoir aider les autres, mais il est vrai que ma profession a pu me permettre de m'apporter de l'aide, à moi-même. J'ai beaucoup appris. Mais aujourd'hui, on est là pour parler de toi, Maël.
- C'est vrai. Du coup... C'est juste que... il y a ce garçon, au lycée.
Une fois la séance finie, je ferme les volet derrière moi, éteint les lumières de mon bureau et verrouille la porte à double tour, pour retourner à ma voiture et rentre chez moi. Il fait nuit, évidemment. J'ai toujours aimé la nuit, elle détient des caractéristiques réconfortantes. J'ai aimé vivre la nuit, pendant ma jeunesse, parce tout était plus beau, et paradoxalement, plus vivant. La nuit est calme, mais étrangement sauvage. La nuit est mystérieuse, attrayante, fascinante à découvrir. Tout change dans l'obscurité, quand seule la Lune peut nous guider.
Je me gare devant la maison, sors de la voiture, et rentre dans le salon, là où personne ne m'attend. Je ne m'habituerai sûrement jamais à la solitude. Cela ne fait que quelques jours, mais cela m'a semblé être une éternité. J'aime la solitude, bien sûr. Mais je l'apprécie quand elle est choisie, pas imposée.
J'ai trouvé la paix, mais je l'avais auprès de toi, après tout. Je m'allonge sur le canapé, reniflant son odeur sur la couverture qui me réchauffe par ce soir d'hiver. Je m'assoupis quelques minutes.
J'entends sonner à la porte. Je me relève tant bien que mal, le plus rapidement possible, mais mes vieux os ne me permettent plus d'acquérir une flexibilité que j'avais autrefois. Ah... Le temps d'autrefois. Quel bon souvenir, mais j'aimerais que ce ne soit plus qu'un souvenir. Je ne veux pas ressasser le passé, mais il m'arrive d'envier celui que j'étais, du moins physiquement, plus jeune.
- Surprise papa !
- Ma fille chérie... Qu'est-ce que tu fais là ?
- On devait venir demain, mais... C'était important pour nous de passer avant, pour se soutenir. Alors on est parti tout à l'heure, et on s'est dit que tu aurais peut-être de la place pour nous ? On prendra un hôtel, si tu veux.
- Vous êtes gentils... Bien sûr que j'ai de la place pour vous. Faites-moi entrer ce petit monde !
Ma fille Élisa pénètre dans la pièce, accompagnée de son mari Antoine et de ma petite-fille, Elyn. J'aperçois derrière, mon fils, Evan. Il a l'air détruit, également. Sauf qu'il le montre, lui.
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Eden with love
Romansa(tome 2) Cher Eliot, Tu as vécu de sombres moments. En fait, ta vie a toujours été assez sombre. Au début de l'année, alors que tu pensais avoir perdu ta lumière, tu en as trouvé une nouvelle. Mais certaines lumières ne suffisent pas à rallumer un...