Chapitre 2

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J'entre dans la grande salle de réception du château de Kaer Morhen. Le jeune sorceleur est sur mes talons. Un grand feu est allumé dans le fond de la salle, réchauffant l'atmosphère lugubre de l'endroit. Cinq sorceleurs sont attablés autour d'une énorme table en bois de forme rectangulaire, des bougies et des pichets de vin sont disposés tout autour d'eux. Ils me regardent tous avec des yeux ronds tandis que mon attention se porte sur une jeune fille blonde, au teint très pâle et à l'apparence juvénile. Elle ne doit pas avoir plus de quinze ans vu son air frêle. Je me demande si elle a déjà tué un monstre... L'homme assis à côté d'elle s'est levé dans une posture de protection et a passé un bras devant la jeune fille, il me regarde durement, comme si j'allais les attaquer.

"Tout doux l'agneau, je ne vais pas l'égorger ta poupée" dis-je en m'avançant lentement. Le sorceleur aux cheveux blond platine et au buste massif continue à me jeter un regard noir et pousse un grognement gutural. Il me semble prêt à bondir sur moi au moindre de mes mouvements.

- Eskel, c'est qui ? Abboie t'il après celui qui m'espionnait. Je me tourne alors vers le jeune sorceleur.

- Alors comme ça tu t'appelles Eskel, c'est bizarre ça, tu n'as pas une tête de Eskel !

- Et toi, on peut savoir comment tu t'appelles enfin, pour que je te présente, ou tu comptes jouer l'inconnue mystérieuse encore longtemps ? Me rétorque Eskel, l'air vexé.

- Mais je ne joue pas, enfin si, un peu. Mais je t'assure que je ne suis pas une inconnue. Pas vrai Vesemir ? lançai-je en me tournant vers le vieil ami de mon père. Malgré les années, je me doutais que lui, m'aurait reconnu.

- Alienor... Te revoilà enfin parmi les tiens... dit Vesemir en s'avançant vers moi les bras grands ouverts. Ses cheveux ont poussé et tirent sur le blanc désormais, mais je reconnaitrai son regard gris et bienveillant entre mille. Il était comme un oncle pour moi.

- Vesemir, cela fait si longtemps, je suis heureuse de te retrouver, dis-je en lui rendant son accolade. J'observe du coin de l'oeil le sorceleur blond se détendre et s'asseoir de nouveau auprès de la jeune fille, le regard désormais plus interrogateur que soupçonneux.

- Tu as bien grandi ma fois ! s'exclame Vesemir en me souriant franchement. 

- Les années ont passé... je suis désolée de ne pas être revenue plus tôt, soupirai-je en contemplant la salle de réunion autour de moi. Je n'osais regarder Vesemir dans les yeux, je ne savais que trop ce qu'il allait me demander.

- Et tu es devenue une belle jeune femme... redoutable au combat, comme ton père j'imagine ! lance t'il en souriant faiblement. Je ne répondis rien et un silence gênant s'installa alors entre nous. Au bout de quelques secondes, Vesemir poursuivit : "Quel dommage qu'il ne t'accompagne pas... Est-il..."

- Il est mort il y a plusieurs mois, lâchai-je d'une voix froide, une horde de furies nous a pris par surprise. J'essayai de ne plus ressentir d'émotion, car la perte de mon père m'avait beaucoup trop affecté et je devais m'en préserver. Après tout, les sorceleurs n'étaient pas censés ressentir des émotions. 

- Je suis navré de l'apprendre, Alaric était un grand homme. Le meilleur d'entre nous. 

- Oui, il l'était, approuvais-je la gorge nouée.

- Pourquoi n'es tu pas rentrée à la maison aussitôt ? Continua Vesemir.

- J'avais une mission à terminer. Et... euh... J'avais besoin de temps. Avouais-je en baissant la tête. Malgré mes efforts, je sentais de nouveau la tristesse monter en moi, et je ne voulais pas qu'elle transparaisse sur mon visage.

- Je comprends, mais tu es là désormais. Et nous te souhaitons un bon retour à la maison. Viens, que je te présente aux autres".

Vesemir me prit par la taille et m'emmena devant la tablée. Les autres sorceleurs, qui n'avaient pas loupé une miette de notre conversation, se levèrent à leur tour pour me saluer. Vesemir me présenta alors tour à tour Coen, Lambert, Eskel, et enfin Geralt et Ciri. Je ne pus m'empêcher d'arrêter mon regard un peu plus longtemps sur eux, tous deux dégageaient une étrange beauté et un charisme hypnotiques, mais aussi une certaine forme... d'air de famille. Ils me faisaient penser à mon père et à moi, plus jeunes. Serait-il possible que Geralt soit son père ? Pourtant les sorceleurs ne pouvaient pas avoir d'enfant, en théorie, j'étais à ce jour l'unique exception à la règle, du moins à ma connaissance...  Vesemir, semblant deviner mes pensées, précisa  : 

"Geralt est en quelque sorte le protecteur de Ciri, ils n'ont pas de lien de parenté".

- Hum hum... fis-je simplement en continuant à les observer tous les deux.

- Tu es la fille d'Alaric, alors, le Alaric, celui qui a formé Vesemir et tous les autres sorceleurs avant lui ? me demande Lambert, l'air à la fois enthousiaste et intéressé.

- Oui... ce Alaric là, répondis-je en esquissant un faible sourire.

- Mais, je croyais que les sorceleurs ne pouvaient pas avoir d'enfant ? s'enquit Eskel.

- Ils ne peuvent pas. Alienor est la seule enfant de sorceleur, sa mère était... une puissante magicienne. Il n'y a pas eu d'autre enfant de sorceleur depuis, explique Vesemir. aux autres Je lui lance un regard plein de gratitude, car il est vrai qu'à cet instant je suis reconnaissante envers Vesemir de m'épargner les énièmes explications techniques à propos du miracle de ma naissance.

- Et pourquoi tu ne nous en as jamais parlé ? s'enquit à son tour Coen.

- Alaric et Alienor avaient quitté la forteresse bien avant votre arrivée à tous. Vous ne connaissez de lui, que ses histoires de combats épiques, chantées par les bardes. Je ne voyais pas l'intérêt de vous parler d'un homme que vous n'avez pas eu la chance de connaître, répondit Vesemir.

- Pourtant cela nous concerne tous... murmure Eskel, mais Vesemir fait semblant de ne pas l'entendre.

- Et pourquoi reviens-tu parmi nous, finalement ? Me demande cette fois Geralt directement. Pourquoi revenir, après tout ce temps ? Il me lance un regard transpercent, et pendant un temps, j'ai l'impression qu'il essaye de sonder mon âme. Cela me procure une sensation étrange. Après quelques secondes, je détourne mon regard du sien.

- Parce qu'ici c'est chez moi, répondis-je simplement. Et que j'en avais marre d'être toujours sur les routes, seule, ne pus-je m'empêcher d'ajouter. Je le regretta aussitôt. Nos regards se croisèrent de nouveau avec Geralt, un peu plus que ce que je ne l'aurai souhaité.

- et toi, c'est quoi ton histoire ? demandai-je en me tournant vers la jeune fille blonde en face de moi. Pour la rassurer, je lui adressa mon plus beau sourire. Elle m'était sympathique, pour une raison que j'ignorais. D'habitude, j'avais tendance à détester tout le monde d'emblée, mais pas elle.

- C'est très long et très compliqué, m'avoua t'elle en me rendant mon sourire. Mais je suis heureuse de compter une nouvelle présence féminine à bord. Je me sentais un peu seule... les autres sorceleurs rirent de bon coeur, sauf Geralt.

- Tu m'étonnes, toute seule avec ces rustres ! enchainai-je sur le ton de la plaisanterie. Comment as tu fait ?

- "J'ai survécu". Ces trois mots résonnèrent en moi étrangement. On se comprenait toutes les deux.

- Il va nous falloir plusieurs chopes pour nous raconter nos histoires, dis-je en m'attablant en face d'elle.

- Ciri ne boit pas, précisa Geralt froidement.

- Alors je boierais pour deux ! lançais-je en prenant un verre en face de moi et en le levant bien haut. Eskel arriva derrière moi pour le remplir.

- Finalement, je l'aime bien celle là !" lança mon espion en s'asseyant à mes côtés et en remplissant nos verres à tous. Une longue soirée de beuverie et d'histoires s'annonçait... 

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